Pauline Poinot, chercheuse à l'université de Poitiers, développe une nouvelle technique de dépistage des cancers à l'aide d'une molécule génératrice d'une odeur spécifique chez un patient malade. À terme, une simple prise de sang permettrait de détecter la maladie. Dans le cas du cancer du sein, ce dispositif serait une alternative à la mammographie que seule une femme sur deux pratique.
Une Poitevine est mise à l'honneur pour ses travaux de recherche sur le cancer du sein : le Dr Pauline Poinot, enseignante et chercheuse à l'Institut de chimie des milieux et des matériaux à l'université de Poitiers (IC2MP), est l'une des lauréates du prix Ruban rose qui récompense chaque année des projets liés à la prévention, au diagnostic et au traitement des cancers. Elle est distinguée pour ses travaux sur la volatolomique induite, soit, selon le site du CNRS, "une nouvelle approche intégrée allant de la détection de marqueurs tumoraux jusqu’à la découverte de nouveaux agents thérapeutiques". Son travail "permet de mettre en évidence des spécificités enzymatiques du micro-environnement tumoral", précise le site du laboratoire IC2MP.
L'objectif est d'essayer de diagnostiquer les patients qui ont un cancer en leur faisant générer une odeur.
Pauline PoinotEnseignante et chercheuse à l'IC2MP
Rencontre avec le Dr Pauline Poinot.
Marie Radovic : Qu'est-ce que la volatolomique induite exactement ?
Dr Pauline Poinot : C'est un concept que nous avons créé à l'IC2MP avec mon équipe. L'objectif est d'essayer de diagnostiquer les patients qui ont un cancer en leur faisant générer une odeur. On va injecter une molécule que l'on appelle une molécule sonde. Dans le corps des patients atteint d'un cancer, elle va se transformer en odeur et on va la retrouver dans l'haleine du patient. On a ensuite transposé cette stratégie pour qu'elle soit utilisable directement avec des prélèvements sanguins, ce qui évite d'injecter une molécule aux patients. Donc, on va faire un prélèvement sanguin. Dans ce prélèvement, on va mettre notre molécule sonde. Et, si le patient est malade, alors le prélèvement sanguin va dégager une odeur particulière.
Le dépistage via la mammographie fonctionne, mais près d'une femme sur deux ne le fait pas.
Dr Pauline PoinotEnseignante et chercheuse à l'IC2MP
Marie Radovic : Est-ce que ça permettrait de gagner du temps dans le diagnostic ?
Dr Pauline Poinot : Effectivement, ça permettrait de gagner du temps. Les dispositifs de dépistage avec la mammographie fonctionnent. Cela étant, certaines femmes ne vont pas faire ces stratégies de dépistage (...). Presque une femme sur deux ne va pas se faire dépister avec la mammographie. Finalement, le prélèvement sanguin pourrait être une réponse, car il est facile de faire un prélèvement sanguin dans le cadre d'une stratégie de dépistage, au même titre que la mammographie.
À LIRE AUSSI : Dépistage du cancer de sein : encore trop peu de femmes se font dépister (Santé publique France)
Marie Radovic : Le prix Ruban rose que vous avez reçu est doté de 225 000 €. Concrètement, que va permettre cet argent ?
Dr Pauline Poinot : Avec cet argent, on va payer le salaire d'un chercheur qui travaillera sur le projet. Mais également du matériel et payer une étude clinique avec le CHU de Poitiers. Les essais n'ont pas encore débuté. On va travailler sur cette étude-là avec le centre d'investigation clinique. On va avoir plusieurs centaines de patients et de volontaires sains pour tester la stratégie. (...) L'échéance est à plusieurs années, mais on a déjà une entreprise qui a utilisé une de nos sondes pour la tester. En Angleterre, en l'occurrence."
Le Dr Pauline Poinot était l'invitée du ICI 19/20 Poitou-Charentes, jeudi 23 janvier 2025 et était interrogée par Marie Radovic.