L'analyse de la bande son de la caméra GoPro du terroriste pose question aux enquêteurs. Lors de la mort de Imad Ibn Ziaten, y-avait-il un troisième homme ? Etait-ce le frère de Merah ? Rien n'est moins sûr.
Dix mois après les assassinats perpétrés par Mohamed Merah, les enquêteurs continuent de chercher d'éventuelles complicités. Un nouvel élément a été versé au dossier. Il s'agit de l'enregistrement audio de la caméra GoPro
que portait le tueur. Notamment le jour où il a abattu le premier militaire à Toulouse, Imad Ibn Ziaten, piègé par Merah qui proposait de lui acheter sa moto.
Voici le script du dialogue tel qu'il a été retranscrit par l'Agence France Presse :
Le 11 mars 2012 à 16H00, les images de la caméra placée sur lui par le tueur et dirigée sur le guidon du scooter, montrent l'arrivée de Merah à son rendez-vous, à Toulouse, avec Imad Ibn Ziaten, contacté pour lui acheter sa moto. Imad Ibn Ziaten se gare devant le scooter de Merah. Tous
deux portent un casque.
"Allo ? T'es là pour la moto ?", demande Merah.
"Ouais", répond Imad, selon les documents consultés jeudi par l'AFP.
Merah : "Ouais parce que là j'ai pas pris le camion. J'ai pris le scooter aujourd'hui. Vas-y, suis moi, on va à droite (...) hein. Tu veux te mettre où, là? On s'y met."
Le parachutiste semble alors s'interroger sur quelqu'un.
"C'est un pote à toi?".
"Hein? c'est mon frère", répond Merah.
"Ah, OK", dit Imad.
La suite du dialogue est confuse:
"Eh, moi j'ai le mien t'a vu, parce qu'il va arriver là. On l'attend dedans si tu veux", indique Merah.
Présence d'un autre homme ? Du frère de Merah, Abdelkader, seul mis en examen dans les sept assassinats de Toulouse et Montauban pour lesquelles il nie toute responsabilité ? Coup de fil reçu par Merah ? Personne d'autre n'apparaît sur les images. Elles attestent en revanche que le téléphone portable du tueur est posé sur le guidon droit du scooter. Des sources proches de l'enquête se montrent très prudentes quant à l'interprétation à donner à cet échange entre le tueur et sa victime. D'autant que des témoignages versés au dossier affirment qu'Abdelkader joue à la même heure au foot.
Bruits de moteur en arrière plan, Merah insiste ensuite pour avoir des détails sur son interlocuteur:
"T'es à l'armée, t'es militaire"? demande-t-il à plusieurs reprises à Imad qui n'entend pas parce qu'"il y a de la musique dans le casque".
Les questions de Merah sont "accompagnées d'un bruit de +clic+", notent les enquêteurs.
Merah demande des précisions sur la caserne et le nombre d'années que Imad Ibn Ziaten y a passées.
Puis : "Mets-toi à plat-ventre. Je rigole pas, mets-toi à plat-ventre", ordonne-t-il alors en sortant une arme. Il la montre à sa victime puis l'insère dans un sac avant de la pointer sur Imad. La caméra enregistre un "clic double", notent les enquêteurs. "Le chien du pistolet a été armé", écrivent-ils.
"Tu ranges ça tout de suite", réagit Imad. "Je ne me mettrai pas à plat ventre. Tu dégages. Je ne me mettrai pas à plat ventre, je reste".
Merah réitère son ordre, le militaire lui fait front :
"Tu vas tirer? Vas-y, ben tire".
Une détonation retentit. La victime s'écroule.
"Au nom d'Allah est grand", dit plusieurs fois Merah en réarmant son arme. Nouvelle détonation, le scooter redémarre.
Mais le meurtrier revient, à la recherche d'une douille.
"Elle est où? Là, elle est là". Il la ramasse et lance à sa victime qui gît : "C'est ça l'islam mon frère : tu tues mes frères, moi je te tue".
Il ajoute: "Il a rejoint l'ange de la mort, je n'ai pas peur de la mort".
Il est 16H04, Merah repart à toute allure.
Merah se filmera encore le 15 mars à Montauban, tirant de sang froid sur trois parachutistes de dos, et à nouveau quatre jours après lors du quadruple meurtre de l'école Ozar Hatorah de Toulouse.
Des images "insoutenables", ont raconté ceux qui les ont visionnées.