Dans l'Aveyron, des écoles publiques affichent croix et statues de la Vierge. Un professeur d'histoire et un ancien instituteur mènent, depuis des années, un combat pour que l'État fasse disparaître ses signes religieux ostentatoires.
Le 9 décembre 1905, le Parlement vote la loi dite de séparation de l'église et de l'État. Presque un siècle après son adoption, deux enseignants aveyronnais estiment que ce texte fondateur n'est toujours pas appliqué dans l'Aveyron.
Deux écoles publiques du département affichent des signes religieux ostentatoires. Un professeur d'histoire et un ancien instituteur interpellent, depuis plus de 10 ans, le Rectorat, les autorités locales et les services de l'État. Sans succès.
Des années de mobilisation et un mur d'indifférence
Jean-François Hébrard et Gérard Olié se défendent de tout "anticléricalisme primaire". Mais ils ne parviennent pas à se résigner. Les deux enseignants - qui se revendiquent "libres penseurs" - reconnaissent que le phénomène est limité. Il s'agit de deux écoles publiques sur les 251 établissements que compte le département de l'Aveyron.
Mais, comme le souligne Gérard Olié, "ancien instituteur, je ne me suis jamais résolu à laisser les enfants de l'école publique (de Vailhourles) cernés de croix et de statues religieuses". Pour lui, c'est une question de principe, pas question de tolérer dans un établissement public : "une croix sur le toit, une croix sur le portail d'entrée, une croix sur le portail arrière, un Christ en croix sur un socle en pierre et une statue de la Vierge entourée de croix colorées".
Professeur d'histoire dans un lycée (public) à Villefranche de Rouergue, Jean-François Hébrard dénonce une violation de l'article 28 de la loi du 9 décembre 1905 : " l'enseignement dans toutes les écoles publiques doit écarter toute référence au confessionnel. Elles sont destinées à recevoir les enfants de toutes origines".
Depuis des années, Gérard Olié et Jean-François Hébrard multiplient les interpellations auprès des mairies propriétaires des écoles concernées, du Rectorat ou de la préfecture. Des courriers ont également été envoyés à des associations de parents d'élèves ou de défense de la laïcité.
Les deux "croisés" de la Laïcité ont tenté d'embarquer dans leur croisade des syndicats, de la CGT Éducation, en passant par la FSU ou l'UNSA.
Rien n'a bougé et n'a changé. Les croix et autres crucifix sont toujours bien en place. Mais les deux enseignants ne se découragent pas. Ils ont même mené un "inventaire" sur l'ensemble de l'Aveyron et dans le département voisin du Tarn. Pour le moment, seules deux écoles aveyronnaises posent question.
Et c'est toujours la même demande : "que Madame la préfète exerce son pouvoir de contrôle, constate la non-application de la loi et exige que les écoles soient totalement laïcisées".
L'argument de la "tradition patrimoniale"
La mobilisation et la motivation des deux enseignants ne sont pas partagées par le maire de Vailhourles. Pour Christian Chanut, il n'y a "rien de choquant" s'agissant des signes religieux présents sur l'école de la commune. L'école est un ancien couvent et, précise le maire, il a été acheté "en l'état". Christian Chanut estime que c'est "un élément patrimonial".
À 140 kilomètres, à l'école du Rougier, le maire de la commune estime que la loi de 1905 ne s'applique pas malgré la présence, sur le toit du bâtiment municipal, d'une imposante croix en pierre. "On n'a pas le droit de mettre de signes religieux sur les bâtiments religieux à partir de 1905. Mais ce qui existait avant, ça reste" souligne Patrick Rivemale.