Karine Brailly, artiste peintre de 56 ans, atteinte de la maladie de Charcot, avait obtenu, de l'équipe médicale de l'hôpital Purpan, la sédation profonde qu'elle demandait. Un acte finalement reporté au dernier moment.
Mise à jour le 16 janvier 2025 à 12h : Selon ses proches cités par ICI, Karine Brailly s'est éteinte dans la nuit du 15 janvier, suite à sa mise en sédation profonde, conformément à sa volonté.
"Ce report, c'est un bouleversement complet pour Karine, ses proches et amis, c'est très douloureux, Karine s'était préparée à la sédation profonde". Dans la voix de Jérôme Pelissier, la colère. Ce mardi 14 janvier 2025 devait en effet être le jour de la sédation profonde demandée par Karine Brailly, cette femme de 56 ans, atteinte de la maladie de Charcot.
Au préalable accepté par l'équipe médicale de l'hôpital Purpan, l'acte d'endormissement a été finalement reporté, au dernier moment. Contacté, le CHU indique ne pas souhaiter "commenter la situation de notre patiente." Mais selon nos informations, la médiatisation et les manifestations autour de la situation de Karine Brailly auraient incité l'hôpital à attendre un climat plus serein.
La sédation profonde, demandée par Karine Brailly, rentre dans le cadre de la loi Léonetti dont l'objectif est de "soulager une personne malade qui présente une situation de souffrance vécue comme insupportable alors que le décès est imminent et inévitable". S'il s'agit ici d'un "report", et que la volonté de Karine Brailly sera respectée, cette décision est une épreuve supplémentaire pour Karine et ses proches, après des années de lutte pour bénéficier de traitements.
Karine lutte contre cette maladie depuis 2013
La maladie de Charcot, dont est atteinte Karine, a fini de venir à bout de sa combativité, comme l'explique son auxiliaire de vie, Daphné Vilallon : "On se bat avec Karine pour arriver à vivre correctement. Tous les jours, il y a de nouveaux malades diagnostiqués et à part leur dire "ne déprimez pas, vous avez une espérance de vie entre 2 et 5 ans", il n'y a pas de solution. Karine a tenu bon pour se battre un maximum mais là, c'est souffrir pour ne pas voir d'évolution, ça devient trop compliqué pour elle."
Après s'être battue, en vain, depuis des années pour bénéficier d'essais cliniques, Karine Brailly déplore que finalement "la mort est plus accessible".
"Laissez-nous avoir de l'espoir"
Karine Brailly est soutenue dans ses épreuves de fin de vie. Gérard de Biasi est un de ses amis, atteint lui aussi de la maladie de Charcot. "Je suis triste et en colère. Karine démontre l'absurdité du système jusqu'au bout. On lui permet de mourir mais pas d'espérer... C'est sûr que morts, nous coûtons moins cher à la société. C'est aux politiques que je lance cet appel 'Laissez-nous avoir de l'espoir, nous sommes déjà condamnés, quel est le risque supplémentaire?'", explique celui qui est aussi président de l'association SLA qu'ès aquo.
L'espoir demandé, par les malades atteints de cette maladie, réside dans l'accès à des essais cliniques ou d'essayer des traitements qui sont déjà validés pour d'autres pathologies. Un collectif existe, "le droit d'essayer", pour avoir enfin "le droit d'essayer de vivre et d'essayer des choses qui peuvent peut-être les soulager ou peut-être faire avancer la science". C’est le combat mené de longue date par Karine, qui se bat jusqu'à la fin pour que d'autres puissent enfin en bénéficier et aider aux progrès de la science sur la prise en charge de la maladie de Charcot.
Je tiens à informer les malades de Charcot et autres maladies neurodégénératives qu'il existe une loi qui nous permet d'utiliser les nouveaux traitements expérimentaux à titre compassionnel, il est important que tout le monde le sache, merci à tous de le partager
Karine BraillyEntretien avec Jérôme Pélissier - membre de l'association Handi-Social
Un rassemblement de soutien à Karine a eu lieu, mardi 14 janvier 2025 devant l'hôpital. Des proches et aussi des membres de l'association Handi Social qui dans un communiqué déclare : "Nous affirmons que la liberté de choisir sa mort ne peut être réelle que si l’on garantit d’abord une vie digne et autonome. Aujourd’hui, ce choix est illusoire pour des milliers de personnes handicapées. Handi-Social soutient Karine dans son droit de choisir et réaffirme que ce choix doit être respecté. Mais nous dénonçons avec force les conditions inhumaines qui la poussent à envisager la mort comme la seule issue possible. Nous refusons une société où la mort est le seul choix face à l’impossibilité de vivre."
Liberté de choix ?
Une liberté finalement questionnée au vu du report de la mise en sédation profonde demandée par la malade. Au même moment, comme un symbole, le premier ministre François Bayrou annonçait qu’un nouveau débat sur la « fin de vie » se tiendrait devant l’Assemblée nationale. Le précédent n'avait pu aller à son terme, stoppé quelques jours avant le vote, par la dissolution.
D'après un sondage réalisé en mai 2024 par l’Ifop pour l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD) plus de neuf Français sur dix (92%) se déclarent favorables à l’euthanasie lorsque le patient, atteint d’une maladie insupportable et incurable, en formule la demande.