En novembre 2024, le Conseil d'État a mis fin aux recours judiciaires contre le projet de la Tour Occitanie à Toulouse. Le permis de construire du premier gratte-ciel de la ville rose a été validé, mais le premier coup de pioche se fait encore attendre. Le promoteur, Philippe Journo, s'en explique. Entretien.
Après sept années de bataille judiciaire engagée par un collectif d'opposants et trois associations, le permis de construire de la Tour Occitanie a été définitivement validé en novembre 2024.
"Tout était prêt, nous avions déjà dépensé quatre millions d'euros, assure Philippe Journo, son promoteur, deux mois et demi plus tard. Nous avons attendu le dernier recours." Mais le chantier de la troisième ligne de métro, lui, n'a pas attendu.
"Huit à neuf mois de reprise d'études"
La Compagnie de Phalsbourg, dont Philippe Journo est le fondateur et président, a remporté l'appel à projets en 2017. Le permis de construire est déposé en juillet 2018. Et la Tour Occitanie devait être sortie de terre en 2022 avant que la troisième ligne de métro ne soit creusée. Mais les recours ont tout changé au calendrier.
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Résultat : des modifications pourraient être déposées au permis de construire initial. "Le trajet du métro a changé", explique Philippe Journo. Ce qui pourrait avoir un impact sur l'une des fondations du bâtiment. "Quand vous bougez une fondation, vous devez revoir tous les autres éléments. C'est une question de sécurité. On doit reprendre les études. On a huit, neuf mois de reprise d'études. Et nous espérons pouvoir donner le premier coup de pioche pour la fin de l'année. Et ensuite, il y aura quatre ans de travaux." L'architecture, elle, restera celle dessinée notamment par l'architecte américain Daniel Libeskind.
Quelles qualités environnementales attribuées au projet ?
"La première qualité, c'est que d'abord, on n'est pas du tout dans l'étalement urbain, puisqu'on construit 40.000 m² à partir de 2500m² déjà artificialisés. S'il fallait faire la même chose sur un sol normal, il faudrait plus d'un hectare, un hectare et demi pour faire cela", nous répond Philippe Journo.
La Tour Occitanie doit s'élever sur un terrain appartenant à la SNCF, à la place d'un ancien dépôt de marchandises, "hyper amianté", précise le promoteur, à côté de la gare Matabiau. "Un endroit où on reconstruit la ville sur elle-même."
Deuxième qualité de ce projet, selon Philippe Journo, "C'est qu'évidemment, nous serons aux dernières normes environnementales." L'une des préoccupations du promoteur est de faire des économies en eau. "Cela fait 15 ans que partout dans les projets de la compagnie de Phalsbourg, on utilise par exemple des urinoirs sans eau. Pourquoi ? Parce qu'un urinoir dans un lieu public, c'est 100 mille litres d'eau potable qui sont gâchés."
Concernant le ruban d'arbres, les essences choisies seront régionales, adaptées au climat local. "On va tout faire pour être le plus économe en termes de bilan carbone sur le projet. Et il est bien meilleur en fonctionnant comme cela verticalement que si nous étions sur l'étalement urbain."
"Quand vous voulez changer la règle du jeu dans un quartier, il faut créer une œuvre"
Ce qui a amené Philippe Journo et la compagnie de Phalsbourg à répondre à l'appel à projets, c'est l'ambition de la ville de Toulouse d'affirmer son statut de capitale régionale, mais aussi de grandes villes d'Europe. "La hauteur a toujours été un symbole d'affirmation", glisse le promoteur. Et il y a cette volonté des élus toulousains de se réapproprier le quartier de la gare. Mais comment intégrer un gratte-ciel dans la ville rose dont la brique de terre cuite est la chair ?
"Vous prenez la gare Matabiau, elle n'est pas faite en briques, argue Philippe Journo. Elle est faite en pierres de taille. C'est l'hypercentre-ville qui est fait en briques." Et le promoteur de prendre en exemple l'une de ses dernières réalisations, dans la ville de Nice. "La ville était en train d'être classée à l'UNESCO et en fait, ils ont demandé à l'UNESCO si notre projet de verre et d'acier gênait. Non seulement il ne gênait pas, mais en plus, ils veulent déjà le mettre dans le patrimoine UNESCO alors qu'on vient juste de le terminer."
Et pour le promoteur, il n'est pas interdit d'oser dans le cadre de l'amélioration d'un quartier. "Ce qui est intéressant, c'est que, justement, quand vous voulez changer la règle du jeu dans un quartier, il faut créer une œuvre, ce que j'appelle une œuvre architecturale. On l'aime, on ne l'aime pas."
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La Tour Occitanie, "bâtiment-ville d'environ 30.000 mètres carrés", doit accueillir des bureaux, des logements haut de gamme, un restaurant et bar panoramiques, un hôtel quatre étoiles, des commerces et des locaux de la SNCF. Après le premier coup de pioche attendu pour la fin 2025, il faudra compter quatre ans de travaux.
De leur côté, les riverains opposants indiquent qu'ils étudieront la possibilité, "s'il y a fondement à le faire", de recours amiables contre un ou plusieurs éventuels permis modificatifs.