Inscrit au barreau de Toulouse, Julien Brel ne travaille plus depuis deux ans. L'avocat est atteint d'un Covid long depuis novembre 2022. Sportif d'endurance avant d’attraper la maladie, il est désormais invalide. Cinq ans après l'apparition du virus, il a accepté de nous livrer son sentiment sur la gestion de la crise sanitaire jusqu'à aujourd'hui.
C'était le 11 janvier 2020. Le jour où la Chine annonçait officiellement le premier mort d'un mystérieux virus. L'épidémie, née dans la province de Wuhan, va dans les semaines et mois qui vont suivre, se transformer en pandémie mondiale. Le coronavirus, le Covid, va bouleverser la vie de millions de personnes en France. Parmi elles : Julien Brel, avocat à Toulouse. Contaminé à deux reprises en 2022, et bien que vacciné, il est atteint de la forme longue de la maladie. Deux ans qu'il ne peut plus travailler. Mais il se bat. Notamment pour un autre discours des autorités de santé publique.
"Il y avait cette volonté d'être rassurant à l'excès"
Le coronavirus fait son apparition dans les journaux télévisés de France 2 et M6, le 18 janvier 2020. Julien Brel n'y prête pas encore vraiment d'attention. Cinq ans plus tard, nous dit-il, "ce dont je me souviens surtout, c'est à partir de la mi-février, quand il y avait des foyers importants qui apparaissaient avec des informations venant d'Italie notamment."
"Je me rappelle à l'époque des discours du gouvernement déjà extrêmement rassurants. Et je trouvais ça assez étonnant, alors qu'il y avait une situation qui était déjà très difficile en Italie, qu'on ait un discours aussi rassurant en France alors même que la situation italienne allait forcément arriver. Il n'y avait pas de raison que ce ne soit pas plus difficile chez nous que de l'autre côté des Alpes."
Julien Brel se souvient d'un discours d'Agnès Buzyn à l'époque. "Qui, je crois, a dit : tout va bien, nous sommes prêts. C'était... Avec ce qu'on sait de la suite des événements, c'était déjà cette volonté d'être rassurant à l'excès pour finalement ne pas être prêt."
Les trois premiers cas de la maladie en France sont recensés le 24 janvier 2020. Le premier mort, le 15 février. Un premier confinement est décrété au lendemain du premier tour des élections municipales, le 17 mars. Il faut ensuite attendre les masques, les vaccins...
"Je ne faisais pas partie des vulnérables et j'ai basculé dans l'invalidité"
Dès la campagne de vaccination anti-Covid lancée, Julien Brel répond présent. Mais l'avocat contracte le virus une première fois en janvier 2022. "Cela ne m'a rien fait de particulier, j'ai eu une vie tout à fait normale ensuite, et ma vie a basculé après la deuxième contamination en septembre 2022", raconte-t-il. L'avocat est atteint de la forme longue de la maladie. Le Covid long qui peut atteindre le système cardio, pulmonaire, digestif et neurologique.
"Chez moi, c'est bien fixé au niveau neurologique. Avec une énorme fatigue. Ce n'est pas la fatigue que je connaissais avant, qui est rattrapée par du repos. On peut se reposer autant qu'on veut, on est toujours dans un état de fatigue importante. On a une fatigue extrêmement envahissante et très invalidante et presque des difficultés pulmonaires me concernant et puis des douleurs de type neuropathique dans les membres inférieurs et puis des fois sur les membres supérieurs aussi. C'est très changeant, ça migre."
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Un an et huit mois que Julien Brel est en arrêt de travail. "J'étais sportif, j'étais actif d'un point de vue professionnel. Je ne faisais pas partie de la catégorie qu'ils aiment bien mettre en avant, les vulnérables. Et j'ai basculé dans l'invalidité. J'ai une reconnaissance d'un taux de handicap entre 50 et 69%."
"Le virus circule encore et la prévention est loin d'être à la hauteur"
Depuis son Covid long, Julien Brel participe à la lutte contre "l'invisibilisation dans laquelle on voudrait nous laisser, comme un mauvais souvenir d'une période qu'on voudrait oublier. Faire reconnaître cette maladie, faire reconnaître les droits attachés à notre nouvelle situation, ça a été un peu la traversée du désert. Ça l'est encore aujourd'hui", nous confie-t-il.
On ne peut pas passer sur cette chose-là. On a enterré des personnes mortes du Covid. On a des personnes qui sont en situation d'invalidité par le Covid. Certaines meurent à petit feu.
Julien Brel, malade du Covid long et en invalidité
Mais, cinq ans après l'apparition du virus, ce qui l'insupporte par-dessus tout, c'est que "le Covid est aujourd'hui présenté comme quelque chose de tout à fait bénin, traité comme une grippe, comme un pseudo-virus d'hiver." Fini, le port du masque. "Comme si la pandémie était terminée. Or, on sait que le virus circule encore et la prévention est très, très loin d'être à la hauteur." Un exemple : la vaccination ouverte seulement au 15 octobre.
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Pour l'avocat, il est clair que le discours des politiques et des autorités de santé n'est toujours pas adapté à la situation. "Le seul discours de prévention qu'il y a autour du Covid, c'est pour les personnes vulnérables et les personnes âgées. Et ça, en fait, c'est criminel, comme discours", nous dit l'ancien sportif d'endurance qui, deux ans et demi après sa dernière contamination, se promène avec une canne. Et pour défendre une autre politique de santé publique, Julien Brel a rejoint les rangs de l'association Winslow.