Occitanie : vers une pénurie de miel d'ici la fin de l'année ?

Publié le Mis à jour le
Écrit par Valérie Luxey

Le froid du début du printemps, puis la canicule et la sécheresse font s'effondrer la production française de miel 2019. Les abeilles meurent de faim et de nombreuses colonies pourraient ne pas passer l'hiver. D'où la détresse des apiculteurs d'Occitanie, l'une des plus grandes régions apicoles. 

"On va indéniablement vers une pénurie de miel français d'ici la fin de l'année" : Christian Pons, trésorier de l'Union Nationale de l'Apiculture Française (UNAF) et président du syndicat L'Abeille Héraultaise, est pessimiste en cette fin d'été 2019. Une catastrophe écologique et économique pour l'Occitanie, l'une des plus grandes régions apicoles françaises.


Les abeilles meurent de faim


Car la production hexagonale de miel est en chute libre, sous l'effet conjugué du froid du début de printemps, puis de la canicule et enfin de la sécheresse, qui privent depuis plusieurs mois les abeilles de nourriture. Relayée par l'UNAF sur sa page Facebook, la vidéo réalisée par un jeune apiculteur de la région Auvergne Rhône-Alpes pour crier son désespoir a été vue plusieurs dizaines de milliers de fois.
  

Une production divisée par 2 ou 3 en Occitanie


Dans les seuls départements d'Occitanie, surtout ceux de l'ex-Languedoc-Roussillon et de l'Aveyron, les volumes devraient être divisés par 2 ou 3 par rapport à 2018. En France, ils ne devraient pas dépasser les 10.000 tonnes, alors que les Français en consomment 40.000 par an. Et la situation pourrait aussi avoir des répercussions sur la récolte 2020. Car les colonies meurent et les reines ne pondent plus, comme l'explique Christian Pons :
 

Quand il n'y a pas de nourriture, la reine bloque la ponte. Les abeilles d'hiver, qui naissent normalement à partir de la fin de l'été jusqu'à fin novembre et peuvent vivre pendant 120 jours, ne sont pas là. C'est la mort assurée des colonies avant la fin de l'hiver.


Des stocks jusqu'en décembre


En privilégiant les petits conditionnements (pots de 250 grammes) par rapport aux gros, les apiculteurs devraient pouvoir alimenter le marché jusqu'à la fin de l'année, mais après il n'y aura plus de stock. Et pour les consommateurs, les prix risquent fort d'augmenter en raison de cette pénurie.


Pas de miel de garrigue cette année


Dans nos départements, surtout dans l'Hérault et le Gard, il n'y aura pas de miel de garrigue, ni de miels de thym et de romarin. Le miel de châtaigner sera très rare. Car avec la sécheresse, les végétaux sont en souffrance hydrique et ne produisent pas de nectar, quand ce ne sont pas les fleurs qui ont brûlé sous l'effet de la chaleur. 
  

Les abeilles, forcées de se nourrir avec leurs stocks, ne produisent plus de miel


Une sécheresse qui prive de nourriture des abeilles déjà durement éprouvées par la fraîcheur des nuits de mars et avril, qui ont affecté les plantes et ont obligé les colonies à consommer tout ce qu'elles avaient butiné pour pouvoir se nourrir. Elles ont aussi entamé leurs stocks d'hiver et ne produisent plus (ou peu) de miel, passant leur temps à chercher de l'eau pour rafraîchir les ruches.


Fonte de la cire sous l'effet de la canicule


Car à ces froids de fin d'hiver et à cette sécheresse, il faut ajouter l'effet de la canicule, qui a provoqué la fonte des cires dans les ruches, le point de fusion étant situé autour de 58 à 59 degrés. Cette fonte a englué les abeilles et les reines et provoqué, sous le poids, l'effondrement des structures.

Sur son exploitation de Cournonsec, près de Montpellier dans l'Hérault, Christian Pons a perdu 80 de ses quelque 400 colonies.


Seule solution : transhumer ou nourrir les abeilles

Ceux qui le peuvent ont misé sur la transhumance, déplaçant leurs colonies vers des zones moins touchées par ces dérèglements climatiques, mais cela est resté compliqué car l'ensemble de la France, mises à part la Bretagne et la Normandie, est touchée.

Pour les apiculteurs, le coût financier est énorme. D'autres ont choisi de nourrir les abeilles avec du miel ou du sirop pour tenter de sauver leur cheptel. Un surcroît de dépenses et de travail auquel certains ne pourront pas faire face longtemps, comme l'explique Christian Pons :
 

Ceux qui n'ont pas encore fait de déclaration de perte de cheptel et qui tardent à demander d'exonération de charges seront en difficulté.


Il est possible de faire ces démarches sur le blog du syndicat apicole l'Abeille Héraultaise.


40 apiculteurs ont signalé des difficultés


Dans les 5 départements de l'ex-Languedoc-Roussillon, l'Abeille Héraultaise, affiliée au syndicat majoritaire UNAF qui regroupe près de 2000 apiculteurs (dont 400 dans le seul département de l'Hérault), a lancé une enquête auprès de ses adhérents.

Bilan : 40 exploitants auraient déjà signalé être en difficulté financière pour le seul département de l'Hérault. Les jeunes, installés cette année ou depuis 2 ans à peine, sont les plus exposés. Certains pourraient jeter l'éponge.
 
Dans l'Hérault, les abeilles ont beaucoup souffert de la sécheresse et de la canicule. ©F3 LR : D.de Barros et C.Chabeud


Demande de reconnaissance de l'état de calamité agricole


Dans l'Hérault, la DDTM (Délégation Départementale des Territoires et de la Mer), en lien avec la chambre d'agriculture élabore en ce moment un dossier de demande de classement en calamité agricole qui devrait être déposé en préfecture d'ici fin septembre. Mais la reconnaissance ne devrait pas intervenir avant janvier 2020. En attendant, certains pensent déjà à repeupler leurs colonies avec une espèce locale, moins productive mais plus adaptée à notre climat et à ses changements.
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