Mardi soir, à l'issue du 2e jour d'audience, Sandrine Pissarra a reconnu d'un petit "oui", les violences commises durant six ans contre sa fille morte de faim le 6 août 2020. Puis, d'un "oui, je reconnais", elle avoue les humiliations, les tortures et l'avoir confinée et affamée. Des aveux, la tête basse, la voix frêle, puis une larme.
Il aura fallu attendre la toute fin du 2e jour de procès, aux Assises de l'Hérault, pour que Sandrine Pissarra, 54 ans, sorte de son mutisme et, en deux phrases de quatre mots au total, reconnaisse sa culpabilité dans le décès de sa fille Amandine.
Une adolescente de 13 ans, morte de faim le 6 août 2020, d'un arrêt cardiaque, au domicile familial de Montblanc, près de Béziers, dans l'Hérault.
"Oui", puis "oui, je reconnais" en réponse au président de la cour d'assises
Coups, privations de nourriture, humiliations, tortures, accusée d'avoir affamé à mort Amandine, sa mère a pour la première fois reconnu les faits mardi soir. Du "totalitarisme familial" a résumé le président de la cour d'assises.
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La collégienne ne pesait plus que 28 kg pour 1,55 m, quand elle est décédée, victime des "actes de torture ou de barbarie" pour lesquels sa mère est jugée depuis lundi, avec son beau-père.
Des faits que l'accusée a donc enfin reconnus, après avoir nié depuis quatre ans, et pour lesquels elle encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Un moment difficile qui a saisi la salle d'audience d'effroi.
Sandrine a enfin pu mettre des mots sur les faits indicibles qui lui sont reprochés. L'enregistrement a dû créer une émotion en elle. Même si ses silences et son attitude depuis le début étaient la traduction qu'elle ne pouvait pas exprimer les faits.
Louis Dolez, avocat de Sandrine Pissarra, mère d'Amandine
Avant de suspendre l'audience mardi soir, le président de la cour, Eric Emmanuelidis, fait diffuser un enregistrement audio, effectué en 2019 par des voisins. On distingue la voix de Sandrine Pissarra et les cris, les pleurs et les sanglots d'Amandine, alors âgée de 12 ans. "Aïe, aïe, arrête, pas ça, j'ai mal...", supplie la jeune victime en appelant sa mère "Madame".
"Madame, reconnaissez-vous les violences commises sur Amandine entre 2014 et le 17 mars 2020", date du début du confinement dû au Covid, demande le magistrat. "Oui", répond faiblement la mère de famille qui a eu huit enfants.
"Ainsi que les actes de torture et de barbarie commis entre le 17 mars et le mois d'août, notamment les humiliations, de l'avoir confinée dans une pièce pendant des semaines, de l'avoir affamée ?", poursuit-il. "Oui, je reconnais", répond Sandrine Pissarra, sans donner d'explications.
"C'est la première fois que je vous vois pleurer", relève le magistrat.
C'est la vertu des procès, d'amener à une prise de conscience et faire sortir la vérité. On a une avancée, il faut continuer, chercher à comprendre... et tirer des leçons de l'ensemble de ce drame en trouvant une juste sanction.
Jean-Marc Darrigade, avocat de Sandrine Pissarra
Dans la foulée, son compagnon, Jean-Michel Cros, 49 ans, qui encourt 30 ans de réclusion pour avoir "privé de soins ou d'aliments" sa belle-fille, reconnaît également les faits. "J'ai une culpabilité énorme là-dessus", avoue-t-il.
3e jour d'audience : "une scène de frayeur", le père d'Amandine à la barre
Ce mercredi 22 janvier, le père d'Amandine était entendu comme témoin devant la cour d'assises.
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Frédéric est dévasté par la culpabilité de ne pas avoir su ou pu agir à temps. Il n'avait pas la garde d'Amandine et, comme ses deux autres enfants, il ne la voyait plus depuis 2018.
"C'est une scène de frayeur, je ne l'ai pas reconnue tout de suite", raconte le père d'Amandine. Il se souvient de ce jour de 2020 où il découvre le corps de sa fille. Puis, il ajoute dans un sanglot : "son visage était squelettique et couvert d'hématomes".
La cour cherche à savoir, s'il a fait le nécessaire pour récupérer sa fille et s'il aurait pu empêcher le supplice et la mort tragique d'Amandine.
Le père d'Amandine est là pour la vérité, même si elle est très dure à entendre. Il souhaite que la mémoire de sa fille soit respectée et que sa mère et son beau-père puissent nous dire ce qu'ils lui ont infligé jusqu'au bout.
Florian Médico, avocat de Frédéric Florès, père d'Amandine
Cet après-midi, les deux autres enfants du couple seront appelés à la barre.
Le verdict est attendu vendredi 24 janvier 2025 au plus tard.