Portraits d'agriculteurs face aux défis environnementaux. Rencontre avec Jean-Pierre Venture, vigneron bio à Aniane (Hérault) en Terrasse du Larzac. Depuis plusieurs années, il cherche des solutions pour lutter contre la sécheresse.
"C'est tellement beau ici qu'on est amené à venir naturellement vers cette philosophie ou cette pratique car l'environnement est préservé." Ici, 80 % des caves particulières de l'appellation sont labellisées bio.
Jean-Pierre Venture est vigneron à Aniane, dans l'Hérault, à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Montpellier, en appellation Terrasse du Larzac. Près de son vignoble de 17 hectares, des sites classés Grands sites de France : le cirque de Navacelles et les Gorges de l'Hérault.
Vigneron à 43 ans
L'homme a eu plusieurs vies. Directeur d'une usine de fabrication de biscuits (300 salariés) à Castelsarrasin, après cinq changements d'actionnaires, il réussit à négocier son départ. Il aime la gastronomie et découvre le vin. Jean-Pierre deviendra vigneron.A 43 ans, il fait le grand saut et reprend ses études à l'Agro de Montpellier en viticulture oenologie. Doyen de la promotion 1997-1998, ces professeurs vont devenir ses conseillers.
Son premier millésime est récompensé par les guides. Le bio ? Jean-Pierre Aniane va y arriver peu à peu. "En 2006, j'arrête les désherbants, puis les produits de synthèses. 2012 sera mon premier millésime bio."
"Ce n'était pas une évidence, j'ai commencé en agriculture raisonnée. petit à petit, on se dit que pour sa propre santé, il faut préserver le sols. Nous avons un forage mais si on le pollue pas, on se pollue nous-même. Il faut faire attention à l'environnement. On se protège soi-même."On se protège soi-même
Entretien permanent du sol
Les difficultés : "la grande difficulté du bio est l'entretien permanent du sol pour enlever les herbes. J'ai dû acheter un tracteur spécifique qui ne fait que ça quasiment toute l'année."Sur 17 hectares, poursuit-il, je suis presque la moitié du temps à labourer pour éviter que les herbes n'envahissent la vigne. C'est donc une grosse difficulté consommatrice de temps et d'investissements supplémentaires. "Je suis presque la moitié du temps à labourer pour éviter que les herbes n'envahissent pas la vigne
Une vigne plus fragile
"On a moins de produits adaptés pour concurrencer les maladies. On a des produits plus souples. Le cuivre uniquement mais à doses limitées. Il faut que ce soit respectueux de l'environnement avec des produits le moins toxiques possibles."Un petit secret : augmenter la hauteur de la vigne
Jean-Pierre a aussi un petit secret : augmenter la hauteur de la vigne. "Je me suis rendu compte qu'on était trop bas. Le circuit des sèves arrive plus facilement aux grappes et donnent une maturité plus rapide."Maintenant, j'ai tendance à mettre le fil 10 à 15 centimètres plus haut, à 60-70 centimètres de hauteur comme ça on retarde un peu la maturité et on va dans le sens de la lutte contre le réchauffement climatique. Les grappes vont avoir plus de temps à mûrir et peut-être donner moins de degrés parce qu'elles recevront moins de sucre durant la période par la photosynthèse".Les grappes vont avoir plus de temps à mûrir
Des cépages plus résistants à la sécheresse
Il expérimente aussi des cépages plus résistants à la sécheresse. "J'ai profité d'avoir cette parcelle très homogène (bonne rétention d'eau et moins de risque de sécheresse) pour faire un essai de cépages adaptés au réchauffement climatique. Je suis par exemple le premier en France à planter le cépage italien Montepulciano. J'ai obtenu des dérogations.Je suis le premier en France à planter le cépage italien Montepulciano
Sur cette parcelle, j'ai planté neuf cépages dans le but de sélectionner ultérieurement des cépages de l'appellation qui seront, nous l'espérons, mieux adaptés au réchauffement climatique. Par exemple des cépages de Grèce, d'Italie donc et des cépages anciens de l'appellation comme le picpoul noir, le morrastel ou le rivairenc. Des cépages un peu anciens et abandonnés parce qu'ils étaient trop tardifs. Aujourd'hui, c'est un avantage.
5 à 6 ans avant les premiers résultats
Ce test est suivi par la chambre de l'agriculture, l'appellation, l'INAO et pour avoir les résultats, il faudra attendre 5-6 ans pour savoir si l'essai est concluant."Absent au salon de l'agriculture
Jean-Pierre Venture ne se rend pas au salon de l'agriculture cette année : "En fait je n'y vais jamais car je n'ai pas assez de vin à vendre. Mais c'est une belle vitrine de la qualité française."
L'appellation "Terrasse du Larzac" est elle bien représentée. Deux vignerons proposent leur production tous les jours sur le stand du département de l'Hérault.