Les amateurs de sport de glisse peuvent désormais surfer sur la mer sans la polluer, grâce à une planche fabriquée à partir de déchets plastiques recyclés. Explications à Montpellier de Romain Paul, dans l'atelier de fabrication de la startup Yuyo et sensations de glisse avec Robin, surfeur-testeur de la planche sur la mer Méditerranée.
La très grande majorité des planches de surf sont polluantes et ne sont pas ou très peu recyclables. Face à ce constat une jeune entreprise de Montpellier créée par Romain Paul s’est lancée en 2018 sur un créneau plutôt étonnant : fabriquer des planches écologiques.
En apparence, c’est une planche de surf comme les autres. Mais en réalité, elle est faite à base de bouteilles en plastique recyclées qui sont broyées et amalgamées grâce à l’impression 3D. Ensuite, la planche est recouverte de fibres naturelles et de résine végétale.
A Palavas-les-Flots, c’est jour de vagues. Parmi une vingtaine de surfeurs face à la mer Méditerranée, Robin. Il s'apprête à tester l'une des planches écologiques fabriquée par l'entreprise de Romain.
Cette planche ressemble à toutes les autres mais elle est constituée à 98% de matériaux naturels ou recyclés, ce qui est unique au monde.
Robin Bartholi, surfeur amateur.
Le paradoxe du surfeur
C’est là que Robin qui pratique le surf depuis 15 ans en amateur me raconte avant de se mettre à l’eau que le surfeur est confronté à un paradoxe. Il pratique un sport proche de la nature et utilise du matériel très polluant. Car la majorité des planches sont fabriquées en mousse polyéther ou polyuréthane issue donc du pétrole.
Déchets plastiques comme matière première
Pour en savoir plus, direction l'atelier de fabrication des planches écologiques conçues par l’entreprise Yuyo. Romain Paul, son co-fondateur me montre sa matière première c’est-à-dire des déchets plastiques, uniquement des PET (polytéréphtalate d'éthylène). Ce sont par exemple des bouteilles en plastiques ramassées sur le littoral méditerranéen par des associations comme Wings of Ocean.
Il recycle également les déchets qui proviennent du milieu médical en particulier des plateaux qui servent à stériliser les outils de chirurgie et travaille également avec les déchets produits par la restauration ou des particuliers.
Une fois cette matière récupérée puis triée, il la broie en paillettes. Ensuite ces flocons sont transformés en bobine de filaments plastiques.
Imprimantes 3 D pour façonner la planche
Les imprimantes 3D permettent de concevoir des objets en déposant de la matière par couches successives. C’est avec ce système que Romain crée le noyau de sa planche. La machine met une trentaine d’heures pour créer une structure creuse et alvéolaire.
Plusieurs avantages pour Romain : « L’intérêt premier c’est qu’on utilise du déchet. Ensuite on ne produit aucun déchet supplémentaire à la différence d’une découpe de mousse polyuréthane. On prend uniquement la quantité de matière nécessaire pour fabriquer la planche. Autre avantage : on peut créer des planches à la demande, sur mesure et s’adapter donc aux envies et aux besoins de chaque pratiquant. »
Fibre de basalte pour l’étanchéité et la solidité
Pour assurer l’étanchéité et la solidité du matériel, Romain drape le noyau de sa planche d’une fibre de basalte. C’est une roche naturelle qu’il achète en Belgique : « Elle vient remplacer la traditionnelle fibre de verre qui est constituée d’énormément de composants qui viennent de partout dans le monde. Donc côté impact carbone c’est du 1 pour 10. C’est considérable. » Pour finir, il applique une résine végétale.
L’école des Mines d’Alès comme support technique
Pour trouver les bons matériaux, Romain et ses associés ont fait 5 ans de recherche et développement en partenariat avec l’école des Mines d’Alès où l'entreprise Yuyo a été incubée.
L’école a aidé à élaborer le procédé de fabrication mais aussi à choisir les matériaux : « C’est notamment l’école qui nous a conseillé la fibre de basalte car d’un point de vue mécanique c’est très performant » explique Romain Paul.
Bientôt des planches 100% recyclables ?
L’entreprise Yuyo est sans cesse dans une démarche d’innovation. A chaque nouvelle planche, Romain essaie de faire mieux que la précédente. Il vient par exemple de tester une nouvelle résine, qui n’est pas encore sur le marché, à la fois biosourcée (issue essentiellement de ressources renouvelables) et recyclable. Il pourrait donc créer à l’avenir des planches 100% recyclables.
Et côté glisse, quelles sensations Robin ?
Robin, qui a du mal à sortir de l’eau m’explique que les planches écologiques fabriquées par Yuyo sont très réactives : « Elles ont cependant un peu plus de poids et donc leur propre inertie. Il faut se laisser guider par elles mais l’avantage c’est qu’elles peuvent très bien s’adapter à de très grosses vagues. »
Surfer en mer Méditerranée, sur une planche conçue avec des bouteilles plastiques collectées en Méditerranée… Un bel exemple de préservation de notre littoral en Occitanie.