Surprise, dimanche soir en Lozère ! C'est bien la candidate de la NUPES qui termine en tête du premier tour dans ce département rurale traditionnellement à droite. Mais ses réserves de voix pour le second tour paraissent limitées et compromettent ses chances de l'emporter face au député sortant Les Républicains Pierre Morel à l'Huissier.
"On va gagner, on va gagner ! " : les chants de victoire ont rythmé la soirée des militants de la NUPES dimanche à Mende, une fois les résultats connus. Des sympathisants portés par l'excellent score de leur candidate Sandrine Descaves qui a réuni 25,41% des voix du premier tour, terminant largement en tête devant le député sortant qui n'a convaincu "que" 18,74% des électeurs. Une ambiance de victoire, confirmée par la candidate dans ses premières déclarations : "C'est une immense joie et une charge importante à porter mais on va confirmer tout ça et je suis confiante pour le second tour."
Mais passée l'euphorie de ce premier tour réussi, les chances de la candidate de la NUPES paraissent minces dans ce duel gauche/droite. Car les réserves de voix paraissent bien plus nombreuses pour le député sortant que pour Sandrine Descaves.
Des réserves de voix importantes pour le candidat de droite...
Le maire de Mende, Laurent Suau, termine troisième de ce scrutin avec 17,64% des voix. Mais les électeurs de cet élu socialiste ne se reporteront pas forcément tous à gauche : le maire de Mende présente la particularité d'avoir été investi par le mouvement présidentiel "Ensemble", et incarne sans doute une vision plus centriste, plus social-démocrate du socialisme.
En quatrième position, un candidat "Divers droite", Patrice Saint-Léger, frère de l'ancien député UMP Francis Saint-Léger (entre 2002 et 2012, à l'époque où la Lozère comptait deux circonscriptions).
En cinquième position ,figure Jean-François Pardigon, le chef de file du rassemblement national, qui réalise traditionnellement des petits scores en Lozère, a convaincu 10,90% des votants. Enfin, à la cinquième place, avec 6,01% des voix, on trouve Christophe Castan, le candidat "Résistons", le mouvement de Jean Lassalle.
Je pense que tout le monde va quand même comprendre qu'il faut s'allier, s'unir et ne pas attaquer.
Pierre Morel à l'Huissier, député Les républicains de la Lozère
Autant de voix qui semblent majoritairement acquises au député sortant Pierre Morel à l'Huissier, lui-même incarnation d'une droite rurale et plutôt conservatrice, comme le premier intéressé semblait l'admettre dès les résultats connus : "Ce sont des adversaires mais ce sont des gens que je connais bien. Donc à partir de là on peut quand même se parler et voir ensemble l'intérêt majeur de la Lozère. Je pense que tout le monde va quand même comprendre qu'il faut s'allier, s'unir et ne pas attaquer."
...et bien plus maigres pour la NUPES
Cinq autres candidats étaient présents pour ce premier tour : ils réalisent tous moins de 5%. Parmi eux, le candidat écologiste Dorian Blayac plafonne à 1% des voix exprimées. La candidate de Lutte Ouvrière Annie Souchon, elle n'a convaincu que 0,79% des électeurs lozériens.
Les réserves de voix sont tout autour de nous, partout !
Sandrine Descaves, candidate NUPES sur la circonscription unique de la Lozère
Mais interrogée au soir du premier tour, sur ses réserves de voix, Sandrine Descaves a donné dans le volontarisme, affirmant "être confiante pour le second tour". La candidate NUPES pense pouvoir mobiliser encore un peu plus le 19 juin prochain : "C'est vrai qu'on peut regretter l'abstention toujours importante, donc oui je vais appeler les électeurs à se mobiliser. Les réserves de voix sont tout autour de nous, partout ! Le programme correspond en fait aux besoins de la population, que ce soit en santé, pour l'éducation, les transports, etc. Donc les réserves de voix sont partout !"
Mais au delà de la légitime envie de galvaniser les troupes, on peut se demander à quelle mobilisation la candidate NUPES fait allusion : car pour le premier tour du 9 juin, 58,37% des électeurs lozériens se sont déplacés. C'est déjà bien plus qu''au niveau national (le taux d'abstention atteint 52,49%) ou qu'au niveau régional. Pas sûr qu'il soit possible de mobiliser beaucoup plus, même si la dynamique nationale derrière l'union de gauche peut sans doute jouer un peu en ce sens.
Le vote des agriculteurs pourrait être décisif
Et dans ce département rural et agricole, la candidate NUPES va faire face à un autre handicap : invitée, comme tous les autres candidats par le très puissant syndicat agricole de la FDSEA à signer une charte pour l'agriculture locale, Sandrine Descaves est la seule à avoir refusé d'y apposer sa signature. Assumant sa position anti "agro-industrie' et opposée au productivisme, mais condamnant aussi peut-être ses espoirs d'attirer le vote paysan.
Le seul espoir, mince, qui subsiste pour la gauche unie, est finalement de réussir à capitaliser sur l'usure du pouvoir du député sortant, en place depuis 2002. Et qui peine à se dépêtrer des "affaires" sorties depuis 2019 par le journal Médiapart. Mais Pierre Morel à L'Huissier, lui l'assure, ce contexte ne pèsera qu'à la marge : "Ce qui m'a étonné c'est que jamais personne ne m'en a parlé dans les réunions publiques. Jamais, jamais ! On m'a parlé de ruralité, de pouvoir d'achat, de difficultés de la société mais jamais de ce type d'affaire. Ca peut avoir une incidence mais je ne l'ai pas ressenti très directement."
La première place et les excellent résultats décrochés par Sandrine Descaves au soir du premier tour des législatives pourraient finalement n'être qu'une victoire à la Pyrrhus.