Dans dix ans, la sphère numérique aura-t-elle troqué les rencontres réelle pour des vidéoconférences, les débats infinis pour des tweets incisifs. Exit l’humain, place à l’individu ? Pas si sûr...
Chacun à son clavier, ses Google glass ou son smartphone. Finalement, à la conférence LeWeb, tous les regards ont été rivés sur des écrans, bien souvent personnels. On en vient à craindre que dans le futur, dans ces fameuses 10 prochaines années -"the next ten years" était le thème de LeWeb en 2013- le sphère numérique aura troqué les rencontres réelle pour des vidéoconférences, les débats infinis pour des tweets incisifs. Exit l’humain, place à l’individu ? Pas si sûr...
D’abord, parce que "paradoxalement, le développement du numérique recréé des liens là où il n'y en avait plus". C'est ce qu'estime Fleur Pellerin, Ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, de l'Innovation, et de l'Economie numérique. Dans l'économie collaborative par exemple, le numérique rapproche l'investisseur de l'entreprise, les personnes de projets économiques. "Vous pouvez décider d'investir dans des projets via le financement participatif, sans passer par des banques ou des organismes financiers", précise la Ministre.
>> Voir en intégralité notre interview de Fleur Pellerin, Ministre de l'Economie Numérique, lors de son passage au Web'13 Paris :
sociaux. Tous les jours vous pouvez commenter sur les réseaux sociaux, donc vous pouvez raturer votre bulletin de vote. Et tous les jours sur les réseaux sociaux vous pouvez poster vos propres opinions : vous vous présentez au suffrage des autres”.
C’est la notion même de notre démocratie représentative qui est bouleversée.
>> 3 questions à Guillaume Buffet :
Ce grand espace civique à une particularité : “il n’est composé que d’acteurs privés”, poursuit Guillaume Buffet.
On en a vu défiler quelques uns au Web 13. Comme Afrikamarket, cette start-up dédiée à la diaspora africaine. Elle se propose de "subvenir aux besoins de base de la population en permettant un transfert d’argent "cash to goods" dédié à la diaspora africaine", explique Rania Belkahia, présidente co-fondatrice. Concrètement, l'argent que vous envoyez est immédiatement transformé en biens de nécessité première : alimentaires, scolaires et de santé. Vous êtes donc sûr que les 10 euros que vous envoyez seront bien utilisés pour acheter un médicament, et pas autre chose. Pour des frais bien moins élevés qu'en passant pas les circuits classiques. "Nous remettons le transfert d'argent dans le circuit formel en contribuant ainsi au développement du pays", poursuit Rania Belkahia. Pour la jeune Marocaine, la dimension citoyenne serait même le nouveau défi des entrepreneurs aujourd’hui, qui s’efforcent de l’intégrer dans leurs applications. “Parce qu’il ne faut pas oublier que le consommateur, c’est un humain”.
Autre projet citoyen : la plateforme digischool, un annuaire éducatif qui rassemble les contenus du monde entier pour les proposer gratuitement. “Des contenus payants comme les annales du Bac sont gratuits sur notre plateforme. Nous apportons quelque chose dans la société”, résume son fondateur, Thierry Debarnot. Le jeune homme a fait ses études dans une banlieue
chaude de Lyon. “On ne trainait qu’entre banlieusards. Sur digischool des jeunes de milieux aisés discutent avec des jeunes de milieux moins aisés. Dans les sites dédiés au Bac par exemple, ils discutent beaucoup sur la formation et leur futur parcours”.
La plateforme compte aujourd’hui 3 millions de membres inscrits. L'application dédiée aux révisions et aux résultats du Bac à fait l'objet de 500 000 téléchargements en 2013.
Et cette citoyenneté web, elle s’est également manifestée en creux, dans les débats suscités par la loi sur la programmation
militaire qui ont montré la face humaine du web : un monde certes virtuel mais fait de personnes capables de s’insurger lorsqu’elles craignent pour la protection de leurs données personnelles.
Reste à voir comment cette citoyenneté va s’incarner dans le monde numérique dans les années à venir. Vaste chantier. “Beaucoup d’éléments de notre démocratie vont être upgradés”, estime M Buffet. Pour le président de Renaissance Numérique, “nous avons un travail extraordinaire à faire pour devenir, nous les citoyens, le 578eme député de l'Assemblée Nationale".
>> L'analyse de Guillaume Buffet sur la loi de programmation militaire :