Deux mois après la mort de Paul, un jeune cycliste écrasé par un automobiliste à Paris, la Ville et la préfecture de police ont reçu des associations qui appellent à "sécuriser d'urgence" les carrefours les plus à risque. L'objectif : protéger les usagers de la route "les plus vulnérables".
"Il faut toujours faire attention, les voitures ne respectent pas toujours les priorités. C'est vrai que je ne me sens pas toujours hyper en sécurité sur certains croisements. Et certains automobilistes pètent vite les plombs face aux vélos à Paris", explique Julie, une cycliste croisée sur la place de Clichy ce vendredi. Il s'agit de l'un des 200 carrefours les plus dangereux de la capitale selon Paris en Selle et Mieux se déplacer à bicyclette (MDB). Les deux associations ont publié une carte en ligne qui recense les lieux concernés.
Suite à la mort de Paul, un jeune cycliste écrasé le 15 octobre dernier par un automobiliste aujourd’hui mis en examen pour meurtre et écroué, Paris en selle et MDB ont présenté jeudi cette cartographie des "200 carrefours potentiellement à risque" auprès de la Ville et de la préfecture de police (PP), lors d'une table ronde. L'objectif : demander des "aménagements cyclistes prioritaires" et mettre en place "un plan d’actions en vue d’assurer la protection durable de tous les usagers de la route et notamment les plus vulnérables, cyclistes comme piétons", peut-on lire dans un communiqué commun de la mairie et de la PP.
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Le communiqué met en avant la poursuite du "plan vélo" parisien et l'engagement d'un "budget de 50 millions d’euros" par la Ville de Paris "sur 2025-2026", avec pour objectif "l’aménagement d’une trentaine d’axes". "L’objectif partagé est d’étudier les 200 carrefours signalés par les associations, qu’il s’agisse d’y engager des aménagements physiques ou un renforcement conjoint de la présence policière", notent la mairie et la PP.
Ces dernières mettent aussi l'accent sur "la priorisation de la verbalisation des infractions routières touchant les usagers les plus vulnérables (et notamment le respect des priorités au profit des cyclistes comme des piétons), et également sur des actions de prévention, de sensibilisation et de communication communes sur le partage de la route". "Les forces de police seront mobilisées de manière renforcée par des opérations régulières sur les axes et les carrefours les plus dangereux, par de la présence physique ou de la vidéoverbalisation", promet le communiqué.
Alors que MDB appelle à "sécuriser d’urgence les 200 carrefours les plus dangereux de la capitale", Alexis Frémeaux, le président de l'association, indique à France 3 Paris Île-de-France avoir eu une "réaction très positive" suite à la réunion. "La mairie et le préfet s'engagent à entamer un travail ces prochaines semaines pour sécuriser les carrefours en question et finaliser le plan vélo. Ces annonces sont faites main dans la main, on sait que c'est important si l'on veut que ça avance", se réjouit-il.
"Tout ça peut créer de l'énervement, et donc parfois des violences"
"Il y a des milliers de carrefours à Paris, on a dû faire des choix en priorisant les plus à risque : ceux où les plus de vélos passent et où les interactions sont les plus compliquées. La carte se base sur un travail de nos adhérents, pour recenser les signalements des cyclistes. Il y a environ 10 carrefours par arrondissement, ça reste un échantillon limité mais ça lance une dynamique. Alors que la pratique du vélo a explosé, il faut que les aménagements suivent", souligne Alexis Frémeaux.
"Aujourd'hui, on a un double mouvement, poursuit-il. D'une part, certains automobilistes font de plus en plus attention aux cyclistes, parce qu'ils sont bien obligés en un sens, face à l'augmentation des vélos. D'autre part, en parallèle de cette évolution positive, il y a malheureusement une partie des automobilistes qui refusent ce changement. Tout ça peut créer de l'énervement, de la colère, et donc parfois des violences entre usagers."
Quand les esprits s'échauffent sans policiers aux alentours, ça peut laisser place à une forme de loi du plus fort
Alexis Frémeaux, président de l'association MDB
"L'une des clés, c'est le changement des comportements, estime Alexis Frémeaux. Le soir, où lorsqu'il y a de grands événements, il y a parfois très peu de présence policière visible. Quand les esprits s'échauffent sans policiers aux alentours, ça peut laisser place à une forme de loi du plus fort, au bénéfice de ceux qui sont bien au chaud dans leur carrosserie."
Aymeric Cotard, chargé de mission pour l'association, précise les facteurs de dangerosité concernant les 200 carrefours signalés : "Il y a les refus de priorité sans se préoccuper des cyclistes. Il y a aussi les véhicules stationnés sur les pistes cyclables, sur le boulevard de Sébastopol, vers Balard ou encore à proximité des gares du Nord et de l'Est par exemple. Enfin, il y a les carrefours où les aménagements n'ont pas encore assez pris en compte l'importance des flux de cyclistes."
Du côté de Paris en selle, la porte-parole Marion Soulet indique que l'association est "très contente de la méthode proposée". "Il faut réunir tout le monde autour de la table et avancer de façon efficace, pour sécuriser les carrefours les plus dangereux rapidement. Certains carrefours peuvent dans un premier temps faire l'objet d'une sécurisation légère avec par exemple des potelets", réagit-elle. La porte-parole de Paris en selle estime par ailleurs "utile de prévoir au fur et à mesure des points de passage avec la mairie et la PP, avec des indicateurs de suivi pour améliorer la situation".