Musicien de jazz emblématique et compositeur de musiques de films, Martial Solal est décédé à 97 ans. Depuis les années 1950, il avait participé à populariser le jazz en France et à Paris.
Le célèbre pianiste de jazz s'est éteint ce jeudi à Versailles. Né à Alger en 1927, il a marqué les clubs de jazz parisiens et d'Île-de-France à partir des années 1950. Compositeur de plusieurs bandes originales pour le cinéma, il est reconnu comme l'une des figures de l'histoire du jazz en France. Directeur de la rédaction de Jazz Magazine, Frederic Goaty répond aux questions de France 3 Paris Île-de-France pour évoquer le très important legs de Martial Solal sur la scène jazz à Paris. Entretien.
En quoi Martial Solal a-t-il marqué l'histoire du jazz à Paris ?
Frédéric Goaty : Il y est arrivé en 1950 après avoir passé sa jeunesse à Alger. Il s'est très vite intégré dans les jazz clubs de Paris à une époque où la capitale se transformait en "deuxième Mecque du jazz mondial" après New-York. À l’époque, il jouait dans le même club durant plusieurs semaines parfois un mois entier. Il accompagnait au piano d'autres stars du jazz comme Django Reinhart.
Il était d'ailleurs très admiratif des grands jazzmen américains qu'il évoquait comme des modèles. Parallèlement, il a servi de modèle aux générations de musiciens français qui sont arrivées après lui. Le fait de jouer avec eux le rendait heureux. Eux-mêmes bénéficiaient également de ses talents grâce aux nombreuses collaborations entre artistes. À cette époque, il y avait beaucoup plus de clubs de jazz à Paris et en Île-de-France. L'idée pour Martial Solal était d'arriver à l'heure au club, de comprendre la musique et de pouvoir reprendre les standards du jazz aux Etats-Unis pour les faire découvrir au public français.
Quels mots utiliseriez-vous pour le décrire en tant que musicien ?
F.G : C'est un génie, un virtuose. Un improvisateur hors norme au piano. Comme tous les jazzmen européens, il voulait également être reconnu comme un grand compositeur. Martial a fait du jazz en France une musique sérieuse mais jamais trop sérieuse. C'était une personnalité singulière avec beaucoup d'humour.
En témoignent par exemple les noms de plusieurs de ses compositions à base de jeux de mots. Il a enfin essayé de rapprocher le jazz, une musique moderne de son époque avec la musique classique.
Le pianiste a écrit certaines de ses compositions pour le cinéma. En quoi est-ce un symbole de son époque ?
F.G : Lorsqu'il est arrivé en France le cinéma se servait encore beaucoup du jazz pour la musique des films. Les réalisateurs utilisaient cette musique novatrice pour l'époque. La part d'improvisation des musiciens de jazz plaisait beaucoup aux cinéastes.
Son arrivée coïncide aussi avec celle sur les écrans de la "Nouvelle Vague" dans le cinéma français. C'est d'ailleurs pour l'un des grands réalisateurs de cette génération, Jean-Luc Godard qu'il a composé la très célèbre bande originale du film "À bout de souffle."