L'association enfance en danger s'était portée partie civile lors du procès des parents de la petite Marina aux assises de la Sarthe en juin 2012, l'association annonce son intention de se pourvoir en cassation pour faire reconnaître la responsabilité de l'État et organise une marche demain à Paris
Une nouvelle marche en mémoire de Marina se tient ce dimanche 13 octobre à Paris au départ du Trocadéro, le cortège devrait ensuite prendre la direction du ministère de la Justice ou de celui des Affaires sociales.
Le 26 juin 2012, les parents de la petite Marina, morte en 2009 à l'âge de 8 ans sous les coups après une courte vie de torture et d'humiliation, étaient condamnés à 30 ans de réclusion par la Cour d'assises de la Sarthe.
Un an plus tard, l'association "innocence en danger", représentée par le bâtonnier Olivier Sur, assignait l'agent judiciaire de l'État devant le tribunal d'instance du XIIIe arrondissement de Paris pour "faute lourde", sans obtenir gain de cause.
Le régime de la responsabilité du service public mis en cause
Décidée à ne pas en rester là, l'association de défense des droits de l'enfant a décidé de se pourvoir en cassation contre ce jugement, avec le renfort de Me François-Henri Briard, en présentant trois requêtes dont une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) pour tenter d'obtenir satisfaction. Un mémoire sera déposé avant le 6 décembre devant la juridiction la plus élevée de l'ordre judiciaire français.Me Briard conteste notamment le régime de la responsabilité du service public (art L.141 du code de l'organisation judiciaire) qui ne peut être aujourd'hui engagée que "par une faute lourde ou un déni de justice".
"Cette référence à une faute lourde a existé en matière hospitalière et fiscale mais a aujourd'hui disparue. Elle reste cependant en vigueur pour les opérations de police et les faits de justice", fait-il remarquer. Il souligne également que la Cour de cassation a ouvert une brèche en considérant en 2001 "qu'une succession de fautes simples pouvait caractériser une faute lourde". (affaire Grégory).
État de souffrance et de désespoir
"Nous pensons que ce régime qui date de 1972 n'est plus adapté pour les activités d'enquête et qu'aucun justiciable, aucune victime ne pourra jamais atteindre le niveau de faute lourde exigé aujourd'hui. Nous allons dire dans une QPC que cet article est contraire à la constitution (article 16 de la déclaration des droits de l'homme de 1789) car trop général et contraire la garantie des droits à un recours effectif et demander à la Cour de cassation de transmettre cette question au Conseil constitutionnel.A titre subsidiaire, nous dirons que cet article n'est pas non-plus conforme à la convention européenne des droits de l'Homme et, enfin, que le jugement du tribunal d'instance n'a pas tiré les conséquences légales de faits qu'il a lui-même constatés.
Les deux enseignantes n'ont pas été entendues
Car, pour les deux avocats, la responsabilité des pouvoirs publics ne fait aucun doute dans cette affaire. "Alors que la petite Marina était en état de souffrance et de désespoir, il y a eu un signalement au parquet d'enseignantes qui n'a rien donné car le dossier a été classé sans suite", rappelle Me Sur "Nous trouvons choquant dans le déroulement de la procédure que les services de gendarmerie n'aient pas entendu les deux enseignantes qui ont fait un signalement très impressionnant. Entre les lignes, on comprenait qu'elles se posaient la questionde savoir si elles allaient revoir la petite Marina vivante", explique l'avocat.
"Les gendarmes n'ont pas entendu non plus le médecin qui l'avait examinée pas plus que les parents, se contentant d'un mot d'excuse de leur part", poursuit l'avocat pour qui "il y a la clairement une faute, un dysfonctionnement du service de la justice que l'avocat général a lui-même reconnu à l'audience".
L'enfant n'a pas été protégée
Au cours du procès, Me Sandrine Bourdaist avocate agent judiciaire de l'Etat avait expliqué: "Marina ne se plaint de rien, explique chacun des nombreux coups relevés sur son corps" et "rien ne permet alors d'imputer ces faits à ses parents". Marina ne fait non plus "aucune révélation" au médecin scolaire qui l'examine quinze jours après le signalement, ni aux gendarmes "spécialisés" qui l'entendront, avait-elle ajouté. "Cette enfant n'a pas eu la protection qui lui était due", avait déclaré le représentant du ministère public dans ses réquisitions.Pour Me Sur, "s'il n'y avait pu eu le classement sans suite des signalements, Marina ne serait pas morte".
avec AFP