Biodiversité : au Jardin des plantes de Nantes, trois espèces menacées réimplantées en milieu naturel

Faune, flore, de plus en plus d'espèces sont menacées, voire ont disparu. Sur plus de 3 000 végétaux répertoriés en Pays de la Loire par les scientifiques, 25% seraient menacés. Au Jardin des plantes de Nantes, les botanistes sont inquiets.

Pollution, urbanisation, agriculture intensive, pesticides...la liste des causes est longue, très longue et les scientifiques inquiets. Au 20e siècle, les espaces naturels ont connu un recul sans précédent.

Résultat : presque un tiers des espèces végétales sont en voie d'extinction. Au jardin des Plantes de Nantes, trois plantes font l'objet d'une attention particulière. Protégées, elles sont réintroduites au fil des ans dans leur milieu naturel. 

"Tous les milieux qui étaient un peu anecdotiques, à la marge, bizarres, un peu plus humides, un peu plus secs, on a tendance a tous les niveler. Soit ils ont disparu parce qu'on a urbanisé, soit l'agriculture a détruit les espaces pour que les machines toujours plus groses puissent passer. On a tout remis à plat danc il n'y a plus cette différence où chaque plante avait sa petite spécificité. On est dans une banalisation des sols très très forte", constate amèrement Romaric Perrocheau, directeur du jardin des Plantes de Nantes.

Sur certains sites, on voyait des plantes à foison il y 20 ans. Aujourd'hui, on s'émerveille de voir seuls quelques specimens comme si c'était une petite réserve naturelle. C'est comme de voir un moineau. J'ai l'impresion que ça fait 3 ans que je n'ai pas vu un moineau se promener, alors qu'avant on jetait un bout de pain et il y avait vingt moineaux qui venaient. Ça fait un peu bizarre de se dire que ce que je contemplais au quotidien est devenu exceptionnel - Romaric Perrocheau
 

Des pesticides dévasteurs

 

Il a beau être passionné, enjoué, le botaniste a bien du mal à rester optimiste.

Faire peur pour faire peur ce n'est pas mon style mais il suffit de se rendre compte du nombre d'instectes qui s'écrasaient sur les pare-brises des voitures avant, combien on voyait de mésanges, de primevères, de petites orchidées sauvages, toutes ces fleurs qui recouvraient les fossés et qu'aujourd'hui on ne voit plus. C'est très inquiétant !

Et ne lui demandez pas à qui la faute. Les pesticides ? Une évidence..." J'entendais quelqu'un de très haut placé dire l'autre jour, le glyphosate, il va falloir faire des centaines d'études pour prouver que ça tue les plantes. C'est incroyable de dire des choses pareilles ! Ce produit a quand même était fabriqué pour ça ! Il n'y a pas besoin de grandes études pour savoir que ça a été fait pour ça et très bien fait. Ça détruit tout sur son passage et le glyphosate est quand même la molécule la plus utilisée", s'étrangle Romaric perrocheau.

Et d'ajouter: "On a fait disparaître  les zones humides. On les a toutes busées ou mises dans des fossés, ça a tué tous ces milieux". 


Trois espèces en sursis

 


Il a beau être un botaniste en colère, Romaric Perrocheau redevient serein lorsqu'il retourne au chevet des espèces qu'il protège au quotidien. Le Jardin des plantes surveille de très près trois plantes en danger. Notamment "L'angelique de l'Estuaire". Ce végétal ne pousse que sur quelques kilomètres carrés en bords de Loire. A moyen terme, il pourrait disparaîre.

" Naturellement l'Angélique vit naturellemnent sur une zone extêmement limitée. C'est une plante endémique. Elle se développe entre Saint-Nazaire Nantes et Mauves-sur-Loire. Sur à peine 50 kilomètres. Elle n'a que quelques kilkomètres carrés pour s'épanouir. Et si on doit y faire des ports bétonnés, des habitations, une route ou une piste cyclabe en enrobé, la plante disparaît. Il faut donc être très très vigilant sur ces bords de Loire qui sont les seuls endroits dans lesquels elle peut vivre", explique Romaric Perrocheau.

Pour éviter l'extinction de la variété, le Jardin des plantes, essaie de la préserver : "l'île de Nantes, c'est le plus gros spot d'Angélique des Estuaires au monde. C'est vraiment incroyable tout ce qu'il y a là-bas. Quand il y a des travaux sur cette zone, on va faire des inventaires avant. On en prélève des jeunes pieds, évidemment sous couvert de la loi. On prélève des graines. On les met en culture ici et puis, quand le chantier est fini, on les réimplante. C'est une plante qui, quand on lui donne tout ce dont elle a besoin, n'est pas si difficile que cela à cultiver."

 

Une réimplantation en milieu naturel


Cette autre espèce, protégée sous un grillage ressemble comme deux gouttes d'eau a un trèfle à quatre feuilles. La petite fougère aquatique n'a pourtant pas eu de chance. Sauvée in extremis en 1977, elle végète au Jardin des plantes et a été réimplantéee dans le Maine-et-Loire il y a deux ans.

"Parmi les plantes menacées, il y a souvent les plantes de zones humides parce que les zones humides on les a drainées, on les a mises dans des tuyaux, des canaux ou des fossés. Du coup, on a réduit ces zones là. La Marsilea à quatre feuilles pousse dans des endroits qui sont sous trois mètres d'eau et qui sont asséchés l'été, des zones assez particulières. Elle est très peu combative, elle ne supporte pas d'autres espèces qu'elle. Sur tout le long de la Loire, il n'en existe plus que trois stations. On l'a récupérée après une forte sécheress en 1977, explique le responsable du Jardin des plantes.

"On l'a cultivé pendant 40 ans. On a pu la réimplanter il y a deux ans dans le Maine-et-Loire pour qu'elle recolonise son milieu naturel. Ici, elle a unintérêt pédagogique mais ce n'est pas au Jardin des plantes qu'elle pourra reconstruire une population sauvage. On la suit de près. Sur les deux sites, un a très bien pris, l'autre moins", poursuit Romaric Perrocheau.

Elle, n'est plus en fleur : la tulipe sauvage. Une variété qui est loin d'être sauvée. Sur une parcelle où grandissent quelques vignes la fleur a pu être conservée. "Aujourd'hui nous avons réussi à convaincre les vignerons bio. Il nous on suivi dans notre démarche de préservation et nous avons semé des graines sur leurs domaines pour que l'espèce reparte".

Romaric Perrocheau le sait mieux que personne, la situation est alarmante. Il ne veut pas pour autant baisser les bras. Chaque jour, lorsqu'il arpente les allés où s'épanouissent ses petites protégées, il espère, même s'il a conscience que tout cet équilibre reste particulièrement fragile.


 

Chiffres clés en Pays de la Loire
  • 3 270 plantes en Pays de la Loire
  • 1 750 plantes évaluées
  • 4 % de la flore a disparu
  • 24 % de la flore est menacée ou quasi-menacée
  • 27 plantes ont peut-être disparu
  • 206 plantes dont les données sont insuffisantes
Source : Conservatoire botanique national de Brest
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