Il n'y a pas que la culture qui souffre de la baisse des subventions annoncées récemment par le Conseil régional. Le sport aussi, avec une enveloppe divisée par deux. Les conséquences sont immédiates, notamment pour les sportifs de haut niveau. Exemple dans l'athlétisme avec le départ de la nantaise Laura Valette de son club d'origine.
Inscrite depuis 12 ans dans le club de Nantes Métropole Athlétisme, Laura Vallet, championne spécialiste du 100 mètres haies, est un pur produit de l'athlétisme made in Pays de la Loire. "Laura est vraiment l'exemple type de ce que nous avions fait de mieux dans la filière de haut niveau", explique Serge Mottier président de la Ligue d'Athlétisme des Pays de la Loire.
"Laura a été découverte et entraînée par son club puis par la section sportive athlétisme du Lycée la Colinière et ensuite par le pôle Espoir" détaille-t-il.
Laura a été accompagnée par son club qui touchait des subventions régionales et départementales. Et elle avait une bourse régionale. Tout ça a disparu depuis quelques jours.
Serge MottierPrésident de la Ligue d'Athlétisme des Pays de la Loire
En cause la décision du Conseil régional des Pays de la Loire de baisser drastiquement ses aides pour le budget 2025 et faire 100 millions d'économie. Des coupes budgétaires qui ont déjà suscité la mobilisation du monde de la culture et celui du social.
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La jeune athlète de niveau international âgée de 27 ans et aux douze titres de champion de France s'entraîne sur la piste couverte du stade Pierre Quinon au nord de Nantes quand nous la rencontrons.
Elle nous annonce avoir quitté le club nantais de Nantes Métropole Athlétisme pour un autre club de la région parisienne,sans préciser lequel dans l'attente de l'annonce officielle.
Un départ dans le respect des fondamentaux
Quand elle brillera de nouveau au palmarès de l'élite des spécialistes françaises des haies, c'est donc un autre club qui récoltera les fruits de son travail, rendu possible grâce à toute la structure sportive régionale.
En cause l'arrêt des subventions régionales versées à son club qui fragilise sa carrière. "C'est un peu compliqué dans un sport individuel de trouver une stabilité financière" avoue Laura Valette. "J'avais la chance d'avoir ça avec le Nantes Métropole Athlétisme pendant 4 ans. Et malheureusement, ce contrat-là s'est arrêté", ajoute la Nantaise.
"C'est vrai que je ressens le besoin encore plus à mon âge maintenant d'avoir cette stabilité-là" sourit-elle. "C'est aussi pour ça que je me sens un petit peu obligée de partir de Nantes" explique Laura Valette.
Une filière made in Pays de la Loire menacée
Inscrite depuis 12 ans dans ce club, Laura est un pur produit de l'athlétisme made in Pays de la Loire. Même si elle reste à Nantes qui accueille le pôle national de sa spécialité et qu'elle garde le même entraîneur, c'est un pincement au cœur pour cette athlète.
"Mon quotidien ne va pas forcément changer. Je reste à Nantes, je garde le même entraîneur, je garde le même groupe d'entraînement", avoue Laura Valette.
Je vais représenter un autre club, mais je reste nantaise. Les objectifs, ça va rester les mêmes : aller jusqu'aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 2028. Et là, il y a les championnats d'Europe cet hiver et les championnats du monde cet été.
Laura Valetteathlète spécialiste du 100 mètres haies
La mixité sociale du sport en question
À ses côtés, son entraîneur Richard Cursaz accuse aussi le coup. Celui qui est aussi le responsable du Pôle National de sprint et haies installé à Nantes, voit le sort de plusieurs athlètes reconnus, rendu beaucoup plus incertain. Mais cette baisse de moyen remet également en cause la détection des futurs espoirs dont il s'occupe.
"À court terme, dès la rentrée prochaine, peut-être que je vais identifier des jeunes sur l'ensemble du territoire des Pays de la Loire qui seront à potentiel pour aller en Equipe de France", explique l'entraîneur nantais, "mais habitant au Mans, à Angers ou ailleurs, ils ne pourront pas venir financièrement sur la structure parce qu'ils ne seront pas accompagnés par les institutions".
L'assistance d'accompagnement et de formation, ça allait de 800 à 2000 euros. Sur lesquels ils pouvaient être accompagnés quand ils arrivaient à l'internat ou à la fac, par rapport à leur hébergement, par rapport à l'inscription sur la structure qui est payante, par rapport aux entraîneurs qui sont rémunérés.
Richard Cursazresponsable du Pôle National de sprint et haies
Au-delà, ce spécialiste du sport régional regrette la fin, selon lui, d'une certaine idée de l'insertion sociale inhérente au sport en général et à l'athlétisme en particulier.
"J'ai une mission de service public et je dis la performance, oui, mais pas à n'importe quel prix", affirme Richard Cursaz.
"Il est nécessaire que l'ensemble des institutions, que sont l'État et les collectivités locales puissent accompagner ces jeunes qui, parfois, socialement, n'auront pas les moyens de faire cette pratique de haut niveau", continue l'entraîneur nantais.
Les seuls qui vont pouvoir pratiquer la performance, ou s'inscrire dans un Pôle espoir, ou dans un Pôle France, ou sur une section sportive d'excellence, ça va être des familles qui vont avoir les moyens de pouvoir payer l'inscription.
Richard Cursazresponsable du Pôle National de sprint et haies
400 000 euros pour tout le sport régional
Au-delà de l'athlétisme, c'est toute la filière sportive qui voit son enveloppe divisée par deux. Cette enveloppe devrait représenter 400 000 euros pour 2025 dont à peu près la moitié pour l'athlétisme.
"C'est énorme comme baisse", souligne la présidente du Comité Régional Olympique et Sportif. "Je confirme que tous les clubs de haut niveau ont été informés ", affirme Anne Cordier qui tient à préciser : " toutes les aides sont supprimées dans les cinq départements de la Région".
"Pour ce qui est du développement du sport dans le club à tous les niveaux, nous savons que l'enveloppe de 400.000 euros correspond à 50% en moins par rapport à l'année 2024. 50% c'est énorme", souligne la présidente du Comité Régional Olympique et Sportif.
C'est une baisse drastique à tous les niveaux et qui nous interroge parce qu'on était dans un élan extraordinaire après les Jeux Olympiques et Paralympiques. On a toujours envie de se dire qu'on va relever le défi. Quelles sont les valeurs que l'on veut laisser aussi aux générations qui montent sur le sport comme facteur d'intégration, facteur d'épanouissement?
Anne Cordierprésidente du Comité Régional Olympique et Sportif des Pays de la Loire
Les championnats de France d'Athlétisme hors d'Angers?
L'organisation de plusieurs compétitions sportives de prestige en Pays de la Loire pourrait aussi être remise en cause pour 2025. De son côté le Président de la Ligue d'Athlétisme des Pays de la Loire, Serge Mottier craint que des événements de prestige comme la tenue des championnats de France d'athlétisme à Angers ne puisse plus se faire dans la région pendant plusieurs années.
"Si on n'a plus les aides on aura beaucoup de mal à boucler nos budgets sur nos compétitions régionales", se lamente Serge Mottier.
"Ce qui est un non-sens, puisqu’économiquement, pour les clubs, c'était très bon", souligne, amer, le responsable de la Ligue d'Athlétisme des Pays de la Loire .
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