Allocation adulte handicapé : une adoption peut-être dès cet été, le député Yannick Favennec veut le croire

Le député Horizons de la Mayenne Yannick Favennec a déposé un amendement au projet de loi pouvoir d'achat du gouvernement, visant à déconjugaliser l'allocation adulte handicapé. Le texte est sur le point d'être débattu à l'Assemblée Nationale.

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Aujourd’hui, 1,2 million personnes touchent l’Allocation Adulte Handicapé et 270 000 couples sont bénéficiaires de l’AAH (allocation aux adultes handicapés). Mais d’une AAH dégressive, puisque l’on tient compte du revenu du ou de la conjoint·e.

A l'avenir, si cet amendement est adopté, cette allocation sera déconjugalisée et ne sera donc plus dégressive puisqu’elle ne tiendra plus compte des revenus du conjoint… mais seulement de la personne en situation de handicap. "Une mesure de justice sociale qui pourrait être votée plus vite qu'espéré", précise le député Horizons de la Mayenne Yannick Favennec. 

A l'occasion de son discours de politique générale devant l'Assemblée nationale, le 6 juillet 2022, la Première ministre Elisabeth Borne annonce plusieurs mesures en faveur du handicap. Parmi elles, la très attendue déconjugalisation de l'Allocation adulte handicapé (AAH). Concrètement, les revenus du conjoint ne seront bientôt plus pris en compte dans le calcul de cette allocation versée à 1,22 million de Français, dont environ 270 000 en couple. "C'est une question de dignité !", avance la cheffe du gouvernement. Une victoire pour les associations du secteur qui militent, depuis bien longtemps, pour cette mesure favorisant l'autonomie des personnes en situation de handicap.

Le 1er juillet, Yannick Favennec (député Horizons et apparentés de Mayenne) annonce avoir déposé une proposition de loi sur ce sujet, sa "première initiative parlementaire". "Je m'y étais engagé pendant ma campagne", a-t-il tweeté, ajoutant "C'est une mesure de justice sociale et une promesse d'Emmanuel Macron". Vraiment ? Une évocation peut-être mais pas de promesse pour le moment ! Il assure avoir transmis immédiatement sa proposition à la nouvelle ministre déléguée aux Personnes handicapées, Geneviève Darrieussecq. Le député espère faire voter cette mesure "avant la fin de l'année".

Dans l'article 2 de sa proposition de loi, Yannick Favennec appelle par ailleurs le gouvernement "à remettre un rapport au Parlement dans les douze mois suivant l'éventuelle adoption de la loi sur la situation sociale et financière des bénéficiaires de l'AAH".

 

La question plus large des ressources

La question, aussi passionnée que controversée, de l'individualisation de l'AAH n'est que la partie émergée de l'iceberg. C'est l'ensemble de ressources des personnes handicapées qui alimente les débats et surtout les inquiétudes, a fortiori dans une période où l'inflation menace le porte-monnaie des Français les plus vulnérables. Un autre vieux serpent de mer se glisse donc plus que jamais dans l'actualité : l'augmentation de l'AAH. Comme les retraites et d'autres minima sociaux, le gouvernement réitère le 26 juin son intention de la réévaluer, ainsi que les rentes accident du travail-maladie professionnelle), de 4 % dès le 1er juillet 2022 à titre rétroactif (si elle met du temps à être votée par les députés), sans retour en arrière en cas d'inflation plus faible que prévu (article en lien ci-dessous). L'AAH atteindrait alors 956 euros. Mais cette hausse ne suffirait pas encore à couvrir l'inflation estimée à plus de 5,5% en 2022.

 

Le texte sera débattu à l'Assemblée Nationale d'abord en commission à partir de ce mardi puis en séance publique la semaine prochaine. Yannick Favennec plaide pour une application au 1er juillet 2023.

 

Aujourd’hui l’AAH est d’environ 900 euros, sauf que lorsque la personne bénéficiaire est mariée, pacsée ou lorsqu’elle vit en couple. Cette allocation est dégressive, parce que l’on prend en compte le revenu du conjoint·e, ce qui n’est pas normal puisque lorsque l’Allocation Adulte Handicapé, créée par Valéry Giscard-d’Estaing lorsqu’il était Président de la République, était une allocation d’autonomie, c’est-à-dire une autonomie notamment financière

Yannick Favennec (Député Mayennais-Horizons

"Ne plus choisir entre l’amour et le portefeuille "

 Il est inconcevable de "choisir entre l'amour et le portefeuille" estime Yannick Favennec. "La première proposition de loi qui a été déposée était de Jeannine Dubié (ancienne députée PRG), et j’étais d’ailleurs le rapporteur de cette proposition de loi et malheureusement, la majorité de l’époque l’a repoussée. Elle a était présentée à différentes reprises par différents groupes politiques et à chaque fois la majorité de l’époque l’a repoussé. La grosse différence maintenant, c’est que pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a dit qu’il était favorable à la déconjugalisation. Et évidemment, en entendant cela, dès l’ouverture de la session parlementaire, lundi dernier, j’ai déposé, sur le bureau de l’Assemblée, une proposition de Loi visant à déconjugaliser l’AAH" .

Il ajoute : "Ce que j’ai fait également, c’est puisque l’on a un projet de Loi sur le pouvoir d’achat qui va être discuté à partir de cette semaine en commission et la semaine prochaine en séance publique, puisque ça concerne aussi le pouvoir d’achat des personnes handicapées, j’ai décidé non seulement de déposer la proposition de loi et de déposer un amendement pour le projet de loi sur le pouvoir d’achat, pour aller vers la déconjugalisation et je l’ai fait d’autant plus que la première ministre, dans son discours de politique générale la semaine dernière, a dit qu’elle y était également favorable. Donc autant battre le fer tant qu’il est encore chaud, puisque la première ministre a confirmé l’engagement d’Emmanuel Macron, et bien profitons de la loi pouvoir d’achat pour aller tout de suite vers la déconjugalisation de l’Allocation Adulte Handicapé".

David Combot, militant syndical, déplore : "L’initiative à la base, elle est bonne pour la reconnaissance de l’individu. La grande crainte que j’ai, c’est que ça crée une deuxième part fiscale et qu’au final, ça soit un cadeau empoisonné.  Concrètement, ça va être déclarable comme un vrai salaire, un salaire à part entière et donc une part fiscale supplémentaire. Alors qu’au départ, c’est censé être une allocation ! Une revalorisation qui passera à 956 euros, c’est pas négligeable pour les gens qui ont des petits revenus. Mais soyons honnête, on ne vit pas avec 956 euros, même si on vit seul ! Mais le problème, c’est qu’ils risquent d’être rattrapés par les impôts. Bref, une opération zéro en fait, une opération cachée où le gouvernement donne d’un côté, et reprend de l’autre".

 

Maxime, 47 ans, en couple avec Nathalie, Ouvrière Spécialisée qui gagne 1400 euros net, témoigne :

"Côté psychologique, c’est une grand pas de fait. C’est très positif, c’est la reconnaissance du handicap en lui-même. La reconnaissance de la personne handicapée en tant que personne. C’est vrai que c’est un peu gênant d’être toujours considéré en tant que personne handicapée, comme si on était différent alors que l’on est comme tout le monde. Je dirai même qu’à cause du handicap, on voit les choses différemment. Côté financier, bien sûr que ça va nous changer la vie, surtout dans le contexte actuel où le pouvoir d’achat est en berne et l’inflation, généralisée ! L’augmentation est la bienvenue et ne peut que mettre du beurre dans les épinards. On passe de 913 à 956 euros par mois, ça fait environ 40 euros de plus, soit près de 500 euros dans l’année. J’ai calculé avec ma compagne, ça représente environ 4% ! Quand on va faire les courses, on arrêtera d’acheter l’entrée de gamme. On va pouvoir se faire plaisir et aux enfants aussi ! ".

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