Coups de téléphone répétés, réunions secrètes dans des hôtels : douze industriels du jambon et de la charcuterie vont devoir payer 93 millions d'euros au total pour avoir formé un "cartel" afin de s'entendre sur les prix entre 2010 et 2013.
14,7 millions d'euros, c'est l'amende que devra payer Fleury Michon.
L'industriel vendéen a été condamné ce jeudi 16 juillet avec 11 autres groupes industriels pour des ententes sur les prix des pièces de jambon.
La plus forte sanction (35,5 millions d'euros), rendue publique jeudi par l'Autorité de la concurrence, vise le leader français de la production porcine, la coopérative Cooperl, qui possède six sites intervenant dans la fabrication de charcuterie.
La Cooperl et Fleury-Michon feront appel de cette décision, ont annoncé les deux groupes à la mi-journée.
"Fleury Michon n’est pas concerné par les griefs pour entente sur les prix de vente de produits (entente à l’aval), a réagi l'industriel basé à Pouzauges en Vendée, Fleury Michon conteste avoir participé à une entente anticoncurrentielle portant sur le prix d’achat de certaines matières premières (entente à l’amont). Fleury Michon regrette que l’Autorité de la concurrence n’ait pas tenu compte des éléments qu’elle a communiqués pour sa défense".
Des ententes pour acheter le jambon moins cher
"Les industriels concernés (les "charcutiers-salaisonniers") se coordonnaient pour acheter moins cher les pièces de jambon auprès des abatteurs et/ou s'entendaient par ailleurs sur les hausses de prix des produits charcutiers qu'ils entendaient pratiquer auprès des enseignes de la grande distribution, pour leurs marques de distributeurs (MDD) ou "premiers prix", indique l'Autorité de la concurrence dans un communiqué."Les ententes ont concerné de très nombreux produits de consommation courante (jambon cru, jambon cuit, saucissons, rosette, chorizo...)", ajoute l'Autorité de la concurrence.
"Les charcutiers-salaisonniers se contactaient individuellement par téléphone avant le début des négociations avec les abatteurs, généralement le jeudi après-midi ou le vendredi matin, afin d'aboutir à une position commune de négociation", explique l'Autorité.
Une procédure de clémence
Les pratiques mises au jour ont "notamment été révélées grâce à la procédure de clémence, qui permet aux entreprises ayant participé à une entente d'en dévoiler l'existence à l'Autorité et d'obtenir, sous certaines conditions, le bénéfice d'une exonération totale ou partielle de sanction pécuniaire", précise l'Autorité."En l'espèce, deux groupes, Campofrio et Coop, ont sollicité la clémence et apporté des éléments à l'instruction", est-il indiqué. Ils ont néanmoins été sanctionnés, à hauteur respectivement d'un et six millions d'euros.
Dans un communiqué, la Cooperl dénonce une "manipulation", "sur la base d'éléments aussi faux que calomnieux qui ont été créés de toutes pièces par un groupe concurrent".
De son côté, l'entreprise Fleury Michon "regrette que l'Autorité de la concurrence n'ait pas tenu compte des éléments qu'elle a communiqués pour sa défense" et "déplore d'autant plus la décision de l'Autorité de la concurrence que la sanction pécuniaire est particulièrement lourde et frappe un secteur fragilisé".