Ces jours-ci, Babeth ne sait plus comment penser, ni agir. Cette habitante de La Roche-sur-Yon, auxiliaire de vie depuis 29 ans, est pour la première fois confrontée à un dilemme : poursuivre son activité au contact des personnes visitées, au risque de leur transmettre le virus.
Babeth a toujours été au service des autres, les personnes âgées et handicapées surtout. Pour les soins, les repas, le ménage.
Elle nous reçoit entre deux visites, dans son petit jardin de La Roche-sur-Yon, et se pose cette question : "Est-ce que je dois continuer à les aider dans leur vie, au risque de leur donner la mort ?" Car Babeth a peur de transmettre le virus aux personnes qu’elle visite. Pour elle, impossible de respecter la distance de vie d’1 mètre. Elle les réveille le matin, les lave, revient le midi pour leur préparer le repas et parfois le soir pour les accompagner au coucher. "J’ai peur de leur faire du mal alors que je leur veux du bien. C’est difficile à vivre, surtout que ce sont des personnes très vulnérables", s’inquiète-t-elle.
"Des bisous, serrer la main, je ne fais plus"
Babeth est très attachée aux personnes à qui elle rend visite. Elle est souvent leur seule famille. Devoir maintenir ses distances en cette période de confinement est pour elle un crève-coeur : "On est des acteurs du plus près, des confidents, des acteurs de vie. Mais les petits bisous, serrer la main, je ne peux pas en ce moment parce qu'il faut les protéger. Et puis certaines personnes âgées sont inquiètes. On arrive de l’extérieur, c’est suspicieux, troublant. Des fois, elles vous disent qu’elles ont peur de vous".
"On m'a dit, "Fais une pause"
Babeth s’est posé la question d’observer son droit de retrait, pour se protéger et protéger les personnes qu’elle visite. "On m'a dit : Fais une pause. Je pourrais m’arrêter, c’est vrai pour protéger après tout mais ..., ça m’angoisse de vous dire ça parce que comment ils feront sans moi ? Ils m’attendent tous les jours. Si je n’y vais pas : comment ils vont se lever, se laver, manger ?"Au service des autres, Babeth explique être une passionnée de son travail : "Je ne vois pas quelle plus belle profession on peut trouver à part aider l’autre, le plus vulnérable, la personne dans le besoin", sourit-elle.
Auxiliaire de vie, un métier pas assez reconnu
Babeth touche à peine plus du SMIC chaque mois et estime que son métier n'est pas reconnu à sa juste valeur : "Pourquoi à la fin du mois, on est dans le rouge ? On a des salaires dérisoires. On roule avec nos voitures personnelles et on n'est pas toujours défrayé à hauteur des dépenses réelles. On est des acteurs de vie mais quelque part, on meurt de donner de la vie. C’est paradoxal".A la fin de cette période de confinement, Babeth espère que les consciences s'ouvriront pour que son métier soit reconnu d'intérêt collectif par le gouvernement : "Vous avez besoin de nous, donc prenez soin de nous !", exhorte-t-elle.