Le sport est-il un vecteur d'égalité entre les hommes et les femmes ? A la Roche-sur-Yon, les basketteuses de la Roche Vendée Basket jouent en première division et en Coupe d'Europe; Et pourtant, si les écarts commencent doucement à se combler, on est bien loin de la parité....
Ce soir-là, les tribunes de la Halle des Sports de la Roche-sur-Yon affichent complet. Petits et grands sont venus encourager leur équipe féminine. Un engouement de plus en plus important pour le sport au féminin.
A 24 ans, Naomi Mbandu a étudié 4 ans aux Etats-Unis, à Miami, où elle a joué pour une équipe universitaire.
A niveau égal, les femmes gagnent moitié moins que les hommes
Là-bas elle a remarqué une véritable différence avec la France, en ce qui concerne le sport féminin : "On voit vraiment que les Américains veulent faire l'effort de mettre les hommes et les femmes sur un pied d'égalité. Par exemple, si l'équipe des garçons bénéficie d'un nouvel équipement, ils vont s'assurer que les filles aient la même chose. Pareil pour la télévision : ils vont faire des reportages sur les garçons et sur les filles. Aux Etats-Unis, on a quasiment tout ce que les garçons ont et c'est normal !", témoigne l'ailière forte de La Roche Vendée Basket.
De retour en France, Naomi, regrette la différence médiatique mais aussi salariale avec les hommes. En moyenne, une joueuse de première division du championnat français gagne 5000 euros/mois. La moitié du salaire moyen d’un basketteur de même niveau.
"On fait les mêmes efforts, les mêmes sacrifices et on aimerait être respectées autant que les hommes, avoir le même salaire. Si on arrive à mettre les moyens pour les hommes, je pense qu'on pourrait aussi les mettre pour les femmes", regrette Naomi Mbandu.
Tous les jours, la basketteuse part pour la salle s’entraîner avec ses coéquipières. Parmi elles, Ana Suarez. A 35 ans, la meneuse de jeu espagnole joue depuis 2017 dans le championnat français. Si elle y a vu la situation des femmes s’améliorer, la question de la maternité reste compliquée.
Etre mère et basketteuse Pro : un choix douloureux
Certaines joueuses ne peuvent pas se permettre de tomber enceinte en plein milieu de leur carrière.
"Si on prend mon exemple, si je m’arrête je ne sais pas si la saison d’après ils me reprendront dans l’équipe. C’est effrayant, on vit avec ça… Moi, depuis longtemps, je veux être maman mais je me suis dis : ok à la fin de ma carrière j’arrêterais et je deviendrai mère. Parce qu’on a peur de ça… On ne gagne pas assez d’argent", regrette Ana Suarez..
A 19 ans, Louise Preneau est la petite dernière de La Roche Vendée Basket. Elle bénéficie de meilleures structures que ses aînées : centres de formations féminins, logement payé par le club.
C'est dommage de faire autant d'efforts, de s'entraîner autant, parfois plus que les garçons, sans être récompensée...
Louise PreneauAilière
Passionnée depuis toute petite par le basket, si au départ il n’y avait pas de différence avec les garçons, ça n’a pas duré bien longtemps : "Là où j'ai vraiment vu la différence, c'est quand je suis arrivée dans le monde pro. Chez les garçons, il y avait forcément plus de moyens, que ça soit dans les déplacements pour partir à un match ou dans la salle où l'on s'entraînait, nos maillots, nos équipements. C'est frustrant, c'est notre quotidien", regrette Louise Preneau.
Malgré les inégalités encore présente, les choses avancent… A la tête de l’équipe de la Roche Basket Vendée depuis 12 saisons, Emmanuel Body a vu le sport féminin évoluer. "La Ligue féminine devient de plus en plus physique et athlétique. On se rapproche du basket masculin. Et sur les autres aspects, il y a beaucoup de ressemblance d'un point de vue tactique et technique", reconnaît Emmanuel Body.
Mais maintenant, le management a vraiment évolué et certaines portes s'ouvrent aux femmes
Emmanuel BodyCoach
Pourtant aujourd’hui, en terme de coaching, l’égalité semble difficile. En première division française, seules 2 équipes sur 12 sont entrainées par des femmes : "Je pense qu'il ne faut pas avoir peur de mettre une femme au poste de président, de directeur sportif ou de coach. C'est vrai que par le passé, on considérait que ces métiers étaient réservés aux hommes, les seuls capables de s'imposer et que les femmes ne pouvaient pas avoir d'autorité sur les équipes", constate le coach.
Ce soir-là, les Vendéennes reçoivent Basket Landes, qui compte dans ses rangs Céline Dumerc. A 40 ans, la meneuse de jeu française est l’une des pionnières du basket féminin. Et si pour elle la situation évolue dans le bon sens, il y a encore du boulot.
"Il faut continuer la médiatisation pour qu'il y ait plus de visibilité et que les gens soient de plus en plus nombreux à nous supporter et que derrière, les inscriptions montent en nombre en basket féminin. Par le sport, on véhicule de belles valeurs et on vit des choses qui nous permettent d'être bien dans notre vie de femme à côté. Si on peut continuer dans ce sens, c'est bien", estime Céline Dumerc.
Si l’égalité hommes/femmes dans le sport devrait être naturelle, la reconnaissance des sportives est encore difficile, dans un milieu où l’argent reste le nerf de la guerre…
Reportage vidéo de Quentin Carudel, Sophie Wahl, Raphaël Fischer et Carole Mijeon