Les faits se sont déroulés dans la nuit du 25 au 26 novembre, sur la petite commune de la Chataigneraie, en Vendée. Une femme, tuée dans son sommeil d'un coup de fusil de chasse. Puis le mari, qui se suicide à côté d'elle. Un meurtre qui aurait pu n'être jamais recensé comme un féminicide.
"Lundi dernier, féminicide à la Chataigneraie. Il l'a tuée avec son fusil de chasse pendant son sommeil, puis a retourné l'arme contre lui. Les enfants n'ont porté que son cercueil à elle."
C'est par ce message d'un proche que le collectif "Féminicide par compagnon ou par ex" est alerté, via les réseaux sociaux.
Une première information, rapidement confirmée par l'avis de décès, publié dans le journal.
"Un double avis de décès. L'homme et la femme qui meurt en même temps, en général, ça nous met la puce à l'oreille", explique une personne du collectif dont les membres scrutent, quotidiennement, les quotidiens régionaux pour comptabiliser les féminicides.
En l'occurrence, un couple modèle, selon l'image renvoyée par les réseaux sociaux.
Lui, 61 ans, parcours brillant, physique soigneusement entretenu, explique se ressourcer régulièrement en Corse.
Elle, 55 ans, tient une boutique de vêtements d'occasion, dont la page Facebook annonce encore, à la veille de sa mort, une opération de promotions, des soldes avant les soldes.
La soixantaine, un âge souvent critique quand il s'agit de meurtres par conjoint, a constaté Anne Bouillon, avocate nantaise très impliquée dans ces dossiers : "D'un point de vue criminel, les féminicides chez les personnes âgées, c'est assez récurrent, de même que l'auteur qui met fin à ses jours. On n'a pas d'explication sociologique pertinente, mais c'est ce qui est observé".
Il n'y aura jamais de procès
Chez ce couple de la Chataigneraie, pas de contexte de violences conjugales nous explique le parquet de La Roche-sur-Yon, c'est à dire pas de plainte, d'hospitalisation de l'épouse, ni de dépôts de main courante. Mais une explication possible, le mari avait récemment perdu son emploi.Dans l'appartement, il n'y avait aucune trace de violence, l'homme a été retrouvé le fusil de chasse à la main, et l'autopsie a confirmé les causes du décès. Mais il n'y aura jamais de procès, jamais de poursuites.
"Si les auteurs se suicident, il ne peut plus y avoir de poursuites pénales", explique Anne Bouillon. "On ne fait pas de procès aux morts."
30 à 40% des auteurs de féminicides se suicident
Dans ces suicides, qui représenteraient 30 à 40% des meurtres par conjoint, l'avocate voit néanmoins un phénomène révélateur de cette volonté de capter l'autre, de se l'approprier. "Le fait de se suicider, c'est l'ultime lâcheté. Le fait de ne pas vouloir répondre de ses actes, et d'échapper à toute poursuite possible".À toute poursuite, et parfois aussi, à toute comptabilisation comme des féminicides, car sans procès, ces meurtres restent encore souvent inconnus du grand public.