Le tribunal de commerce de Nanterre doit se prononcer aujourd'hui sur la reprise du groupe sidérurgique Ascométal (1900 emplois sont en jeu). Depuis des semaines, la bataille est acharnée entre deux prétendants à la reprise : le groupe brésilien Gerdau et l'offre française appelée Asco Industries.
Aujourd'hui, le tribunal de commerce de Nanterre doit désigner le repreneur du groupe sidérurgique Ascométal, dont 1.900 emplois sont concernés.
Quatre prétendants ont déposé une offre pour reprendre ce fleuron de la sidérurgie française, en redressement judiciaire depuis le 7 mars, après l'échec de négociations entre son actionnaire, le fonds américain Apollo, et ses créanciers, les banques américaines Morgan Stanley et Bank of America.
Le match est serré entre le groupe brésilien Gerdau et l'offre française emmenée par l'ex-directeur général d'Arcelor, Guy Dollé, ont indiqué des sources proches du dossier. Les deux autres candidats sont les fonds américains Apollo et Anchorage.
Les candidats ont bataillé pendant des semaines, surenchérissant jusqu'à l'examen des offres devant le tribunal de commerce de Nanterre le 14 mai, pour reprendre l'ancienne filiale d'Usinor spécialisée dans les aciers spéciaux pour l'automobile et le secteur pétrolier.
La proposition du groupe Gerdau
Gerdau avance 390 millions d'euros de financement et propose de conserver 1.586 emplois et d'embaucher 166 personnes. Il garantit aussi qu'il ne fermera aucun site pendant sept ans, sauf Ascométal Allevard au Cheylas (Isère).Des quatre offres sur la table, celle de Gerdau est celle qui reprend le moins d'emplois, mais le groupe brésilien a obtenu des soutiens de poids: l'administrateur et le mandataire judiciaire ont clairement marqué leur préférence pour le projet brésilien.
Pour "peser sur le rendu du jugement", la CGT a appelé à la grève mardi sur tous les sites. "On ne peut pas cautionner qu'un projet qui supprime 300 emplois soit privilégié au détriment d'un autre qui maintient 97% des emplois", a expliqué le délégué CGT Yann Amadoro.
L'offre française
La CGT, syndicat majoritaire, préfère l'offre française, qui porte le nom de Asco Industries et qui prévoit le maintien de tous les sites et de 1.820 emplois. Elle est portée par M. Dollé et Frank Supplisson, ex-directeur de cabinet d'Eric Besson au ministère de l'Industrie.Ils assurent avoir levé 230 millions d'euros de financement et peuvent compter sur un prêt de l'Etat de 35 millions d'euros, via le Fonds de développement économique et social (FDES). Le gouvernement envisage également de faire entrer au capital la Banque publique d'investissement (bpifrance).
Eux aussi ont obtenu des renforts: la CGT, l'Etat et des personnalités politiques de tout bord.
Le décrêt Alstom comme joker possible
Parmi elles, l'ancien Premier ministre, François Fillon, qui a appelé le gouvernement à utiliser le décret Alstom, adopté il y a une semaine par le ministre de l'EconomieArnaud Montebourg, qui impose aux groupes étrangers non européens de se soumettre à une procédure d'autorisation pour leurs investissements dans des secteurs stratégiques.
Interrogé sur une éventuelle utilisation du décret, le ministre a évité de brandir cette menace avant de connaître la décision de la justice. "Le tribunal doit être respecté dans sa souveraineté", a-t-il expliqué.
Des sources proches du dossier n'ont toutefois pas exclu un recours au décret si Gerdau était désigné. "La question se pose sérieusement, car Ascométal produit des aciers spéciaux" qu'il vend notamment à Alstom, ont-elles reconnu.
Les banques créancières américaines soutiennent Anchorage avec l'espoir de récupérer un jour leurs billes. Lors de l'audience du 14 mai, le fonds de retournement américain a créé la surprise en présentant une "proposition commune" de dernière minute avec l'industriel algérien Cevital, repreneur le mois dernier du fabricant d'électroménager FagorBrandt.
Selon une source proche du dossier, cette offre commune affichant 620 millions d'investissements et promettant finalement elle aussi de conserver le site du Cheylas n'a cependant "pas été présentée de manière définitive".
Cevital pourrait-il changer de cheval? Gerdau, lui, dit en tout cas chercher un partenaire pour le site de Fos. Le groupe brésilien assure en effet qu'il "continue à travailler pour trouver une solution de complément d'activité sur le site de Fos-sur-Mer afin de conserver le maximum d'emplois" et précis qu'il est "confiant sur l'issue des négociations en cours".
Gerdau n'a pas révélé avec qui il négocie, mais la fédération CFDT a fait part mardi de discussions "en cours" Cevital.