Au niveau des Alpes-Maritimes, à l'exception de Villeneuve-Loubet, les villes où le loyer est le plus élevé se situent toutes à l'est du département, autour de Monaco. Un palmarès qui en surprend certains, à commencer par le maire du village de Peille.
Ce sont des données qui ne prendront personne par surprise, mais qui font tout de même parler. Il y a quelques jours, l'Observatoire des territoires et le ministère du Logement ont publié une carte interactive des loyers en France pour 2024, illustrant le prix au mètre carré d'un logement à la location, commune par commune (hors Mayotte).
Les données récupérées pour élaborer cette carte ont été extraites des sites "Seloger" et "Leboncoin", les deux principales plateformes d'annonces immobilières en France. Ces données ne concernent que les locations non meublées.
"Les indicateurs de loyers proviennent de prédictions de loyers charges comprises calculées pour des biens types mis en location au 3ème trimestre 2024", précise à France 3 Côte d'Azur le ministère.
Dans le top 100 des communes les plus chères de France, on retrouve huit communes des Alpes-Maritimes, dont Beausoleil et Cap-d'Ail, respectivement en cinquième et sixième positions. Ces deux villes, limitrophes de Monaco, affichent un tarif de 30€ et de 29,6€ le mètre carré à la location.
Si l'on regarde du côté du Var, trois communes apparaissent dans ce top 100 : Saint-Tropez (25,8€/m², 21e position), Gassin et Ramatuelle (affichant toutes deux 21,8€/m², 91e position).
Un signe d'attractivité, mais aussi d'inquiétude pour les élus
S'il y en a bien un qui est surpris par l'une de ces données, c'est Cyril Piazza, le maire de Peille. Sa petite commune est la 10e la plus chère du département dans ce classement, et la 106e à l'échelle nationale, avec un tarif de 21,6€ du mètre carré.
Je ne pensais pas qu'on était dans le top 10 !
Cyril Piazza, maire (DVD) de Peilleà France 3 Côte d'Azur
Pour le premier édile, "cela signifie deux choses : on peut penser que Peille est attractive, puisqu’on répond à l’offre et à la demande", ce qui pourrait par exemple "être le résultat d'un endroit où l'on se sent en sécurité, avec l'implantation de commerces comme le Proxi, mais c’est aussi une inquiétude pour les jeunes de ma commune pour qu’ils arrivent à se loger".
Cyril Piazza assume en tout cas de n'avoir porté, sur ses "10 ans de mandat, jamais aucun projet immobilier, ce qui était un engagement. La promesse était zéro artificialisation des sols, donc on ne peut pas construire du neuf".
Une décision qui a forcément contribué à la hausse des loyers dans cette commune relativement proche de la principauté monégasque, selon Séverine Amate, ancienne du groupe Seloger et experte de l'immobilier sur la Côte d'Azur.
"Pour réguler les prix, il faut plus de constructions", martèle-t-elle. Alors, en cas d'arrêté municipal de ce type, selon elle, l'une des seules solutions serait "de faire un vrai travail sur les logements vacants", présents en nombre dans la région.
Le maire de Peille appelle tout de même à prendre ces données, issues d'annonces de locations et non pas de contrats, avec des pincettes. "Peut-être que les contrats conclus sont moins élevés que les annonces", espère-t-il, faisant part de son "inquiétude pour les générations futures".
Un "marché locatif qui s'assèche"
Du côté de Cap-d'Ail, le maire Xavier Beck n'est, lui, "aucunement surpris" par la présence de sa commune en 2e position des communes les plus chères du département étant, tout comme Beausoleil, limitrophe de Monaco. Il dit pourtant, depuis trente ans qu'il est maire de sa commune, "avoir utilisé toutes les possibilités que nous avions" pour réguler ce marché, citant comme exemples les "trois programmes immobiliers en cours qui permettront de réaliser encore 57 appartements".
Rien d'anormal pour Séverine Amate, pour qui "c’est presque normal que le prix augmente pour un bien qui bénéficie d’une vue et d’un cadre agréable, où le cadre et les prestations le justifient, sans vouloir pousser à la hausse". Sur "un marché locatif qui s'assèche, parce qu’on a un stock de biens à louer qui ne se renouvelle pas", la hausse est donc relativement logique vis-à-vis de l'offre et de la demande.
Même l'encadrement des loyers a ses limites parce que, souvent, il n'est pas respecté. On voit que, bien souvent, on revient sur les décisions d’encadrement.
Séverine Amate, membre des Expertes France, présidente d’Amate Réseau'nanceà France 3 Côte d'Azur
Dans ces circonstances, lorsque l'on voit de tels prix au mètre carré, la spécialiste l'assure : "ça veut simplement dire que les loyers moyens ne sont pas respectés" par les propriétaires, qu'ils soient encadrés ou non. Une envolée qui aurait tout de même des limites, à en croire l'experte du secteur : "les gens qui cherchent à acheter n’achèteront pas plus cher que ce que ça vaut, et c'est pareil pour la location. Il ne faut pas louer n’importe quoi à n’importe quel prix".
"L'augmentation des loyers se fait surtout de particulier à particulier"
À Nice, Charlotte Lafeuillade, qui préside l'agence immobilière Savi Estève depuis 2008, n'est pas non plus surprise de la situation, puisque "ça a toujours été cher, à l'achat ou à la location". Mais dans son agence immobilière, elle estime qu'il n'y a "pas eu de sursaut au niveau des loyers", à l'inverse de ce que semblent indiquer les données du ministère du Logement et de l'Observatoire des territoires.
Selon elle, "l’augmentation des loyers se fait surtout de particulier à particulier car, en tant qu’agence immobilière, on n’a pas le droit d’augmenter les loyers quand on le souhaite. Par exemple : ce n'est pas possible pour des travaux d'embellissement, mais pour des travaux énergétiques, oui".
Les contraintes ne sont donc pas les mêmes pour les agences immobilières que pour les particuliers. Et pourtant, les deux s'entremêlent sur les plateformes "Leboncoin" et "Seloger", utilisées par l'État pour établir ces données.
Ce n'est pas la guerre. Mais, forcément, ils n’ont pas les mêmes contrôles ni les mêmes réglementations que nous.
Charlotte Lafeuillade, présidente de l’agence Savi Estève à Niceà France 3 Côte d'Azur
Désormais, Charlotte Lafeuillade a donc des personnes qui viennent la voir "en disant qu’elles préfèrent payer des frais d’agences et avoir un meilleur encadrement et des contrôles sur le loyer", plutôt que de passer par des particuliers. Jusqu'à calmer certains propriétaires, peut-être un peu trop gourmands ?