Condamné à un an de prison, un homme est accusé de faire du braconnage de chardonnerets, espèces d'oiseaux protégés, sur le marché aux puces de Marseille. Ce trafic en pleine expansion participe au déclin de ces volatiles. En 18 ans, plus d'un tiers de leur population a disparu.
Les chardonnerets élégants, la nouvelle poule aux œufs d'or. Le trafic d'oiseaux rares et protégés est en pleine expansion à Marseille. Ce mardi 14 janvier, un homme a été condamné par le parquet de Marseille à un an de prison avec sursis pour trafic d'animaux, confirme à France 3 Provence-Alpes la police municipale. Une quarantaine de chardonnerets élégants, connus pour leur belle robe et leur chant mélodieux, avaient été saisis, ce dimanche 12 janvier, sur le marché aux puces de Gèze dans le 15e arrondissement de la cité phocéenne.
Un vendeur condamné à un an de prison
Alors que la police était en patrouille dans ce quartier du 15e arrondissement, ce dimanche 12 janvier, un homme est interpellé. Il avait en sa possession 41 chardonnerets et deux serins cinis, espèces d'oiseaux appartenant à la famille des fringillidés. Les volatiles étaient enfermés dans des cages et cachés sous des cabas. L'individu a nié et affirmé devant la justice avoir été présent sur le marché de Gèze uniquement pour boire un café.
Déjà interpellé le 17 novembre 2024 en possession de 53 oiseaux proposés à la vente, il est passé en comparution immédiate cette fois. L'enquête a été confiée à l'Office français de biodiversité. L'homme, originaire d'Algérie et sous le coup d'une obligation de quitter le territoire, a été condamné à un an de prison avec sursis, assorti d'une interdiction de venir en France pendant cinq ans.
Un tiers des espèces ont disparu
En 18 ans, les chardonnerets sont en déclin de 35 %, soit plus d'un tiers de leur population, selon la LPO (Ligue pour la protection des oiseaux). Chaque année, à Marseille, des dizaines de dossiers comme celui-ci sont présentés devant la justice. "Le trafic illégal d'espèces animales et végétales apparaît aujourd'hui comme une des principales causes de leur disparition", affirme le gouvernement.
Si le marché de vente illégale de ces oiseaux protégés est en pleine expansion à Marseille, mais aussi à Toulon, c'est parce que le chardonneret est une espèce répandue dans la région. "Il y a une grosse quantité de ces oiseaux en Provence, car le climat y est doux", nous explique Anaël Marchas, chargé des missions juridiques à la LPO Paca.
Ces volatiles sont particulièrement appréciés pour leur chant. "Il chante extrêmement bien, nous poursuit l'expert, même mieux qu'un canari." Il attire également les convoitises grâce à "son masque rouge et sa robe jaune et noire". C'est également pour des raisons culturelles que ces animaux sont dans le viseur des braconniers. "Dans le pourtour méditerranéen, les chardonnerets représentent le symbole de prospérité", détaille Anaël Marchas.
Un marché lucratif en pleine expansion
Le trafic d'animaux est selon la Fondation 30 Millions d'amis devenu le troisième trafic au monde, après les trafics d'armes et drogues. D'après Anaël Marchas, l'individu pourrait être rattaché à un réseau de braconniers, dont il serait le vendeur.
Le marché de ces oiseaux protégés est lucratif. Un chardonneret est vendu entre 50 et 200 €. L'homme interpellé aurait donc pu récolter ainsi 4 000 €. Une désolation pour Anaël Marchas : "C'est un moyen de gagner gros sans avoir d'impact judiciaire".
D'autant qu'il affirme que ces oiseaux, capturés à la glu, sont victimes de maltraitance. Depuis 2021, la classe à la glu est déclarée illégale par la justice. Pour attirer les volatiles, "les braconniers mettent des oiseaux captifs dans des cages ou diffusent par les haut-parleurs le chant de chardonnerets". Souvent, ces oiseaux élisent comme domicile les milieux ouverts, tels que des friches, notamment sur le secteur de La Valentine ou dans les quartiers nords. Adultes, ils sont visibles seulement l'hiver. "Et au printemps, les braconniers capturent les oisillons qui sont restés dans les nids."
D'après Anaël Marchas, lors du braconnage, il y a beaucoup de mortalité. Sur 30 oiseaux pris en piège, uniquement 10 survivent. "En se collant aux branches et à la végétation, ils cassent leurs ailes et s'arrachent leurs plumes." Les volatiles meurent sur place ou sont abandonnés par les braconniers et perdent la vie peu de temps après.
Jusqu'à 3 ans de prison pour les propriétaires
Pas seulement les chardonnerets, les rouges-gorges sont aussi pris pour cible par les braconniers. Pour une autre raison, cette fois, à but comestible, nous explique Anaël Marchas. "C'est typique des Bouches-du-Rhône et du Var. On offre une brochette à Noël, une tradition de nos grands-parents, une habitude qu'avait Marcel Pagnol."
Au-delà des amendes, on demande des peines de prison pour rendre ces pratiques dissuasives.
Anaël Marchas, chargé de mission juridique à la LPO Pacaà France 3 Provence-Alpes.
Des sanctions sont imposées pour tout propriétaire possédant une espèce protégée. Ils peuvent être condamnés jusqu'à trois ans de prison et 150 000 euros d'amende, en application de l’article L. 415-3 du code de l’environnement.
De son côté, la LPO tente de sensibiliser le parquet de Marseille face au braconnage illégal d'espèces en voie de disparition. Au cours de plaidoiries, les juristes appuient sur le déclin de ces espèces protégées. Ils travaillent également quotidiennement sur un programme de comptage et recensement des espèces protégées.