Les centres sociaux ont manifesté ce mardi à Marseille pour demander une revalorisation des subventions de fonctionnement. Le manque de moyen met en péril leur mission d'intérêt public et le lien social des quartiers.
"Dans les quartiers, il ne reste que les clubs de sport et les centres sociaux." Et si, faute de moyen, ils étaient amenés à disparaître ? C'est pour éviter ce scénario catastrophe que les bénévoles et salariés des centres sociaux ont manifesté devant la préfecture des Bouches-du-Rhône ce mardi
Ils demandent une revalorisation des subventions de fonctionnement compte tenu de l'inflation, une revalorisation des salaires et le financement de plusieurs postes clés.
"Cela fait des années que ça ne va pas. On est toujours à la recherche de financements. On est toujours sur le fil. Mais là, c'est de pire en pire." Dans le cortège, nos reporters Virginie Danger et Xavier Schuffenecker ont rencontré Evelyne Baylot. membre du bureau bénévole au centre social de La Capelette (Marseille 10e) depuis 30 ans.
"On reçoit des assistantes maternelles avec des bébés, des mères, un centre aéré. On a des tas de permanences en tous genres, par exemple pour les femmes victimes de violences... Si le centre ferme, tous ces gens ne seront plus aidés, il n'y aurait plus cette unité.
Le centre est un lieu de rencontre intergénérationnelle. Avec les écrans les gens ne se rencontrent plus, mais ils se rencontrent encore au centre social.
Evelyne Baylot, bénévole membre du bureau du centre social de la Capelette
Des financements qui réduisent d'année en année
Il existe 99 centres sociaux dans le département des Bouches-du-Rhône. Les financeurs sont l’État, la Caisse d’allocations familiales, le Conseil départemental 13, la Métropole AMP et les communes signataires.
Oui mais voilà, les moyens prévus pour les prochaines années "sont loin de répondre aux besoins réels des associations", alertent les centres sociaux.
Le centre social de La Capelette à Marseille est le plus ancien. Il date de 1957. Le centre a bénéficié de travaux de rénovation en 2002, depuis, rien.
Le budget annuel du centre social de La Capelette est de 900.000 euros. En trois ans, le centre a perdu 50% des subventions allouées par la Caisse d’allocations familiales, de 100.000 euros par an, à 50.000 euros.
On fonctionne toujours en fonction des besoins des habitants
Manon Millet, directrice du centre social de La Capelette
Le centre a des espaces dédiés à la santé, la précarité, l'accompagnement numérique, administratif, mais aussi des cours de capoeira, de couture et un centre de loisirs.
Le centre social a également ouvert une épicerie solidaire depuis 2021, un an et demi après l'explosion de la précarité alimentaire suite à la crise sanitaire. De nombreuses activités qui requièrent beaucoup de moyens humains.
La masse salariale correspond à 70% des subventions perçues. "Au centre social, on est 40 salariés et 40 bénévoles, explique Manon Millet, directrice du centre social de La Capelette depuis 15 ans. Il faut au moins ça parce que le social ça ne se fait pas avec juste des ordinateurs, ça se fait avec de l’humain".
Et l'humain semble être ce qui fait défaut. "L’humain disparaît progressivement de toutes les institutions qui nous entourent. En réalité, les gens vont où ? Dans les centres sociaux qui sont des espaces de proximité pour trouver une réponse."
Le centre reçoit également de nombreux jeunes. "Et si ces jeunes ne sont plus pris en charge le soir, ils sont dans la rue", ajoute Evelyne.
Dialogue rompu avec les financeurs
Pour la directrice du centre, le premier problème est l'absence de dialogue avec les partenaires financeurs. "On a en face de nous, des personnes qui ne veulent pas travailler main dans la main avec les centres sociaux. On est obligé d’aller à la pêche aux financements".
Le deuxième point, la précarité. "On subit de plein fouet la crise. Comment on va faire pour chauffer et éclairer le centre social ? Je ne sais pas si on va arriver jusqu’au 31 décembre en étant en déficit ou pas".
On travaille avec des précaires, avec des contrats précaires, dans la précarité. Mais on ne peut pas faire de bon travail quand on est tous dans la précarité et la pauvreté.
Manon Millet, directrice du centre social de La Capelette
"Les centres sociaux sont des espaces essentiels dans les quartiers prioritaires", martèle Manon Millet.
Le principal risque serait de devoir réduire la voilure : "supprimer des postes, des actions à destination des habitants."
Si le centre de La Capelette n'est pas encore en sursis, certains centres sociaux du département pourraient mettre la clé sous la porte.
Les centres sociaux ont été reçus par la sous-préfète chargée de mission politique de la Ville mardi. Une nouvelle manifestation est prévue le 1er décembre prochain.