Après la chute du gouvernement de Michel Barnier, on vous résume la position des quatre principaux syndicats d'agriculteurs dans la région.
Tandis que la crise politique se poursuit et après la chute du gouvernement de Michel Barnier, les agriculteurs, dans la bataille depuis trois semaines, se retrouvent dans l'expectative face à l'absence d'interlocuteur au sommet de l'État. Au lendemain de l'action coup de poing de 200 agriculteurs devant le Grand Palais à Paris, ce jeudi 5 décembre, les organisations syndicales ont chacune leur position quant à la suite à donner à leur mouvement, mais restent sur le qui-vive.
La FDSEA 13 entre colère et inquiétude
La FDSEA qui avait annoncé une mobilisation la semaine prochaine "déplace le tir", comme l'explique Romain Blanchard, porte-parole de l’organisation dans les Bouches-du-Rhône. "On va se tourner vers nos parlementaires". Selon lui, en votant la motion de censure, les députés ont "balayé d'un revers de main des avancées (...) on espère qu'ils sont un plan B. Je ne veux pas croire qu'ils soient irresponsables à ce point et ne se rendent pas compte de ce que leurs administrés vivent sur le terrain."
Le mode d'action sera donc dans les jours à venir d'aller frapper à la porte des élus pour leur apporter "la lettre aux pères Noël des agriculteurs", en exigeant des mesures "efficientes" début janvier 2025
Les gens qui sont en colère et ont peur peuvent parfois faire des choses déraisonnables. On peut comprendre que le désespoir pousse parfois à passer la ligne.
Romain Blanchard, porte-parole de la FDSEA 13France 3 Provence-Alpes
"On n'a pas trois mois à attendre qu'ils tergiversent", conclut Romain Blanchard, rappelant que sur le terrain, beaucoup d'exploitants sont à l'agonie, au bord du dépôt de bilan. "Si on doit leur expliquer qu'il faut d'abord que nos dirigeants règlent leurs petites affaires à Paris et qu'ils se passent les plats", ajoute-t-il, "il va potentiellement se passer des choses qu'on ne maîtrise pas", craignant de ne pouvoir contenir encore longtemps la colère et l’inquiétude qui les animent.
La Coordination rurale 13, dans l'attente d'un interlocuteur et d’un cap pour 2025
Les textes budgétaires se retrouvant presque définitivement enterrés, la Loi d'orientation agricole reste, elle aussi, en friche, déplore Caroline Lecanuet, porte-parole de la Coordination rurale 13, "repoussée à l'hypothèse d'un futur gouvernement", tout comme les dernières annonce de la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard. Pour son organisation syndicale, le Mercosur, en bonne voie d'être signé par l'Europe, n'est pas une priorité. "Ce qu’il faut, c'est un cap pour l'année à venir". Caroline Lecanuet s'interroge cependant face à l'absence d'interlocuteur : "on se demande si on n’a pas basculé pas dans une instabilité permanente".
Les exploitants qui arriveront à traverser cette transition, devront continuer à faire tenir le Titanic pour éviter de nouvelles prises d'eau.
Caroline Lecanuet, présidente de la Coordination rurale 13France 3 Provence-Alpes
Le syndicat envisage lui aussi d'interpeller les parlementaires locaux dans les jours à venir. "Il n'y a pas de projet pour l'agriculture française", regrette Caroline Lecanuet, qui espère cependant que "cette crise gouvernementale débouchera sur quelque chose de plus ambitieux pour le monde agricole", avant de conclure :"de toute façon, ça ne peut pas être pire".
Les Jeunes agriculteurs "démoralisés", dans un autre mode d'action
Après la dissolution de l'Assemblée Nationale le 9 juin 2024, cette motion de censure contre Michel Barnier "fait une nouvelle fois patatras", selon Florian Pellegrin, vice-président des Jeunes agriculteurs en Paca. "On est un peu démoralisés" avoue-t-il. Faisant référence par ailleurs au feu vert de la Commission européenne, donné au Mercosur, accord de libre-échange avec cinq pays sud-américains, le syndicaliste se désole : "Au sein de l’UE, tout se fait sans nous et à notre détriment". Toujours axés sur la souveraineté alimentaire de la Nation, les Jeunes agriculteurs regrettent "beaucoup d'énergie perdue" ces derniers mois.
Il y avait énormément d'attente sur des projets de loi et c'est à nouveau un échec. On perd un temps précieux, en espérant qu'il n'y aura pas trop de casse d'ici là...
Florian Pellegrin, porte-parole des Jeunes agriculteurs 13France 3 Provence-Alpes
"Il reste de la combativité, parce qu'il y va de la survie de la profession, mais il y a de l'usure", confie Florian Pellegrin. Pas d'action visible prévue pour l’instant, mais un nouveau mot d'ordre sur le terrain administratif : "puisqu'on nous méprise, on refuse désormais tous les contrôles sur nos exploitations tant que l'on n'a pas d'interlocuteur crédible".
La Confédération paysanne 13, indifférente
Après l'intervention d'Emmanuel Macron, ce jeudi 5 décembre, François Borel, porte-parole de la Confédération paysanne des Bouches-du-Rhône, ne s'attend pas à un réel changement, "dans la continuité d’un gouvernement de centre droite". Opposée historiquement à tous les accords de libre-échange, la Confédération paysanne, avait manifesté dans la journée devant le Grand Palais à Paris. Une action qui a mal tourné, avec "cinq collègues en garde à vue". Le sujet préoccupe davantage François Borel, qui s’indigne d'un "deux poids, deux mesures", un traitement "différent de ses adhérents par rapport à ceux des autres organisations syndicales".
Nous exigeons la libération de nos 5 camarades toujours en garde à vue dans le commissariat du 5eme à Paris. Suite à notre manifestation au grand palais pour défendre le #revenupaysan et dénoncer le libre-échange #StopSpeculation @UnionSolidaires @attac_fr https://t.co/t2EU9APdOh
— Conf' Paysanne (@ConfPaysanne) December 6, 2024
"Les gens de ce bord nous écoutent tellement peu", conclut François Borel,"qu'il y ait un interlocuteur ou pas, ça ne change pas grand-chose".