Les salariés des centres d'appels de Free à Paris, Bordeaux et Marseille ont fait grève ce lundi 9 décembre, date d'entrée en vigueur de la fin du télétravail dans leur entreprise, mis en place depuis la crise sanitaire. Une décision difficile à vivre pour cette télétravailleuse de Marseille.
Ce 9 décembre a sonné le glas du télétravail pour tous les salariés des centres d'appels de Certicall, filiale de Free. À Marseille, Bordeaux ou Paris, la CGT a marqué cette journée par un appel à la grève, dénonçant la perte d'un "acquis social". Free, comme d'autres grandes entreprises, a largement démocratisé le télétravail pendant la pandémie du Covid en 2021. Amazon, Google, Zoom, Disney... les pionniers de la généralisation du télétravail font machine arrière, imposant le retour obligatoire au bureau au moins trois jours par semaine.
À Free, c'est désormais 100% en présentiel. Une mesure brutale très mal vécue par Sandrine*, en télétravail depuis un an et demi. "J'ai travaillé deux jours en télétravail environ pendant six mois, après mon épilepsie s'est déclenchée", raconte la jeune femme, qui a bénéficié d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH). À ce titre, l'entreprise lui a accordé une journée de télétravail supplémentaire, jusqu'à ce que tout s'effondre, il y a un mois.
Une mesure incompréhensible et brutale
"La société a commencé par me retirer ma préconisation médicale, prétextant que toutes les préconisations médicales de télétravail sautaient". Une mesure incompréhensible pour Sandrine, d'autant plus brutale que peu après une autre décision a frappé son service : "j'ai reçu un mail me disant que je devais me rendre 100% sur site". Avec application, la semaine suivante. "On m'a dit non seulement tu perds un jour, mais en plus, tu perds aussi les deux autres jours, donc tu reviens une semaine à 100% sur site".
Un bouleversement auquel la jeune femme ne s'attendait pas. "J'habite à 35 km du travail, le faire deux jours par semaine, il n'y a aucun problème, mais faire 70 km pendant cinq jours, avec mon traitement, je ne peux pas me le permettre, c'est ma santé qui va en prendre un coup".
Les télétravailleurs sont unanimes sur les effets positifs de cette organisation sur leur vie professionnelle et privée. Sandrine a surtout ressenti les bienfaits du télétravail sur sa santé. "J'économisais ma fatigue au niveau des trajets, et je le mettais dans le travail".
Je me réveillais le matin plus performante, en meilleure forme.
Sandrine, télétravailleuse à FreeFrance 3 Provence-Alpes
"Si j'allais au centre, j'étais vite fatiguée, donc vite dépassée et vite démotivée, ajoute-t-elle.
"C'est une punition"
"Ils ont dit que si on n'atteignait pas les chiffres de production qu'ils avaient définis, on n'avait plus du tout de télétravail pendant trois mois, renouvelable trois mois, puis encore trois mois, si on ne revenait pas aux chiffres qu'ils nous demandaient".
"Pour moi, c'est clairement injuste, dit-elle, si vous ne rentrez pas dans les chiffres, vous êtes punis, pour moi, c'est clairement une punition".
Derrière cette fin du télétravail généralisée décidée à Paris, Sandrine voit une volonté de pousser certains salariés vers la sortie. "Je pense qu'ils veulent faire du tri, et dire aux gens si vous n'êtes pas contents par rapport au télétravail, vous partez,
Ça leur fait des effectifs en moins et c'est ce qu'ils cherchent ces derniers temps. On pense que c'est un plan social un peu déguisé.
Sandrine, employée Certicall à Marseille
Sandrine se souvient qu'il y a deux ans, quand elle a été embauchée, le télétravail était même plutôt encouragé. "Au début, on avait des ordinateurs fixes, ils ont même équipé tout le monde de portables, pour que tout soit transportable, pour tout le monde".
Elle ne veut pas envisager un retour complet en présentiel. La salariée espère obtenir une rupture conventionnelle pour partir. À 38 ans, Sandrine envisage même de créer sa société : "ce sera plus gérable pour moi, d'être à mon compte et d'avoir cette souplesse, le temps que ma santé évolue".
*Le prénom a été modifié