En réunion ce samedi à Ajaccio, des patrons de pêche du sud de l'île ont fait part de leur exaspération concernant une formation de premiers secours qu’ils sont obligés d'effectuer à Bastia. Ce qu’ils ne comprennent pas.
À l’origine, la réunion organisée ce samedi après-midi à Ajaccio par la prud’homie des pêcheurs avait pour objectif de préparer les élections d’avril prochain au comité régional des pêches.
S’il a été beaucoup question des possibles candidatures, un autre dossier s’est lui aussi invité dans les discussions : il s’agit du "Médical 1", du nom d’une formation de premiers secours à bord que les patrons pêcheurs doivent suivre tous les cinq ans.
Le problème pour eux, c’est qu’elle se déroule à Bastia. "L’aberration, c’est qu’on fait monter tous les pêcheurs de Corse-du-Sud au lycée maritime de Bastia, explique Joseph Sanna, patron pêcheur et élu prud’homme à Ajaccio. Pourquoi ne pas faire déplacer un formateur et organiser une session à Ajaccio puis une autre à Bonifacio ?"
Dans la salle du palais des Congrès d’Ajaccio, ses confrères du sud de l'île, mais aussi ceux descendus du nord, partagent son avis. "Ce n’est pas à nous de monter alors que c’est à une seule personne de se déplacer", lâche un pêcheur. "On est tous d'accord là-dessus", prolonge un autre.
"Avec cette histoire, on perd deux ou trois jours de travail, poursuit Xavier D’Orazio, premier prud’homme des pêcheurs d’Ajaccio. On ne peut pas se le permettre. Sans compter les frais que cela engendre et les contraintes liées au déplacement. Il y a 5 ans, lors de la mise en place de cette formation, le formateur était descendu à Ajaccio."
Les marins ne comprennent pas pourquoi cette année la donne a changé. "À l’heure où on nous demande de faire des économies de carburant et d’éviter d’avoir une empreinte carbone, le lycée maritime ne veut pas entendre que ce serait plus facile de faire descendre un formateur que de faire monter cent pêcheurs", ajoute l’un d’entre eux.
"Epée de Damoclès"
L’autre problème soulevé concerne le caractère obligatoire de cette certification médicale. En effet, aucun patron pêcheur ne peut prendre la mer tant qu’il ne l’a pas effectuée. "On a une épée de Damoclès au-dessus de la tête, souligne Joseph Sanna. Si on ne valide pas la formation, on ne peut plus travailler."
Le 6 décembre dernier, une session "Médical 1" avait lieu au lycée maritime de Bastia. "Certains sont montés la faire par peur de ne plus pouvoir travailler, glisse Xavier D’Orazio. L’État et les contraintes administratives font peur."
Derrière la question de cette formation de secours se pose également, pour les 170 patrons insulaires, celle d’une liste de réglementations à respecter qui ne cesse de s’allonger. "Cela fait 15 ans que l’on assiste à une complexification des obligations administratives, souffle l'un d'eux. Certaines sont absurdes. En plus, que l’on soit marin sur une embarcation au long cours, motoriste ou petit patron pêcheur, on est tous astreints aux mêmes règles. Aujourd’hui, il faut être spécialiste de tout. Nous, notre métier, c’est d’aller en mer pour pêcher. Malheureusement, avec toutes ces règles complexes, certains jettent l’éponge. Et cela ne va pas aider à convaincre les jeunes de se lancer dans un métier déjà très difficile et contraignant."
A l’heure actuelle, on n’a aucune réponse positive du lycée maritime."
Pour les pêcheurs présents ce samedi à Ajaccio, il semblerait que le mot d’ordre collectif soit, pour l’instant, de ne pas monter à Bastia en formation. Avec le risque de ne pas avoir sa certification en poche pour pouvoir naviguer.
"S'il le faut, on sortira quand même en mer pour travailler, mais il ne faudrait pas en arriver là, explique Joseph Sanna. Il faut être partenaire et pas adversaire. C’est tout ce que l’on demande. On ne dit pas qu’on ne veut pas passer le diplôme mais il faut se mettre à notre place. À l’heure actuelle, on n’a aucune réponse positive du lycée maritime. Nous sommes tolérants jusqu’à un certain principe, mais s’ils veulent un rapport de force, malheureusement, on le leur donnera. Mais il ne faudrait pas, là aussi, en arriver là. Il faut être conciliant avec tout le monde."