Avec le projet "Toques de poissons", le comité régional des pêches de Corse veut remettre au goût du jour des espèces "oubliées" par les consommateurs. Et ce, en proposant des fiches recettes élaborées avec des chefs cuisiniers. Un moyen également de diminuer la pression de pêche sur les espèces "nobles".
Avez-vous déjà goûté du chinchard, de l’oblade ou encore de la vive ?
Rares sont les consommateurs à jeter leur dévolu sur ces espèces soit méconnues, soit victimes d’une mauvaise réputation.
Et pourtant, selon les initiateurs du projet "Toques de poissons", elles seraient tout aussi savoureuses que les espèces dites "nobles" comme la dorade, la sole ou encore le Saint-Pierre.
"L’idée est de valoriser les poissons qui ont peu de valeur marchande et d’attractivité auprès des clients", explique Daniel de Fusco, président du comité régional des pêches de Corse.
Objectif affiché : préserver la ressource et diminuer la pression exercée sur les espèces très demandées, mais aussi permettre aux pêcheurs de vivre de leur activité toute l’année.
"En hiver, il y a très peu de ventes, et beaucoup de poissons que les pêcheurs sont en capacité de pêcher ne sont plus connus et donc plus consommés, complète Coralie Duchaud, secrétaire générale du comité. On a voulu redynamiser cette vente pour, derrière, redynamiser la pêche."
15 espèces oubliées
Financé à hauteur de 90 000 euros par le plan France relance, le programme "Toques de poissons" ambitionne de mettre en avant, au total, 15 espèces "oubliées". Pour cela, pêcheurs, poissonniers, cuisiniers et apprentis du centre de formation des apprentis (CFA) de Haute-Corse ont travaillé de concert afin d’élaborer des fiches recettes.
Celles-ci ont été distribuées au printemps dans une cinquantaine de points de vente, dans toute la Corse. "Nous avons donné des livrets, des fiches individuelles par poisson mais aussi des QR Code renvoyant vers des recettes dans les poissonneries, les supermarchés qui vendent du poisson local mais aussi auprès des pêcheurs qui font de la vente directe", détaille la secrétaire générale du comité.
Pêcheur et propriétaire d'un restaurant à Bastia, Sébastien Rialland, est directement concerné par les problématiques soulevées par le programme. Raison pour laquelle il est partie prenante de la démarche.
"Le comité essaie de trouver des solutions pour que les pêcheurs puissent vivre de leur métier dans de bonnes conditions, c’était important pour moi de contribuer à ce genre de projet. Je suis pêcheur, je sais ce que c’est. Ces espèces-là, on les jette, donc en les valorisant dans mon restaurant, c’est une chose de gagnée. Le poisson noble se fait de plus en plus rare, alors pourquoi ne pas valoriser une ressource plus facile à pécher ?"
"Faire découvrir ces espèces à un maximum de personnes"
L’hiver dernier, le professionnel a proposé dans son établissement un menu spécial afin de mettre à l’honneur ces espèces oubliées.
"Vive, congre, crabe bleu, raie… L’idée était de faire découvrir à un maximum de personnes ces espèces, avec une préparation façon gastronomique, dans l’air du temps", se souvient-il.
Si l'opération "Toques de poissons", initiée en novembre 2022, devrait se terminer à la fin de l'année, Sébastien Rialland, lui, compte bien organiser de nouveaux dîners spécialement dédiés à ces espèces.
"Cet évènement a marqué les clients. Un an après, on m’en parle encore, cela me motive pour le refaire. Cela a des répercussions tellement énormes que j’entends bien le refaire, même plusieurs fois durant l’hiver", annonce-t-il.
Alors, pari réussi ? "Les gens ont des habitudes difficiles à changer, reconnaît le président du comité régional des pêches Daniel Defusco, on sait qu’on ne pourra pas tout révolutionner avec cette initiative mais on espère que cela pourra donner envie de découvrir et valoriser tous les produits pêchés en Corse."
Rendez-vous est pris à la rentrée, pour un premier bilan.