Dans un document daté du 14 avril, Gérald Darmanin demande des comptes à Jean-Félix Acquaviva. Le président de la commission d'enquête parlementaire avait déclaré détenir des messages compromettants de préfets en exercice après la mort d'Yvan Colonna.
Il aura fallu un mois à l’exécutif national et Gérald Darmanin pour réagir aux propos de Jean-Félix Acquaviva.
Le 8 mars dernier, le député entendait Jean Castex à la commission d’enquête parlementaire. L’ancien premier ministre, interpellé à ce sujet par le président de la commission, avait nié l’existence de vengeance d’État, et déclaré que la haine n’avait jamais guidé ses décisions.
Pour rappel, eu égard à la position d’Éric Dupont-Moretti, l’ancien chef du gouvernement était directement en charge des dossiers des membres du commando Erignac.
Passablement énervé par la position de Jean Castex, Jean-Félix Acquaviva avait répondu de manière incisive : « nous avons été en possession de messages entre préfets en exercice. Vous entendez ce que je veux vous dire ? Entre préfets en exercice, qui disent qu’il fallait décorer Elong Abé, qui disent qu’il a fait ce qu’ils auraient dû faire depuis bien longtemps. Vous entendez ce que je dis ? »
"Ces propos, qui ont été rendus publics, constituent une accusation particulièrement grave"
Gérald Darmanin
Dans un document daté du 14 avril révélé par Corse Matin que nous avons pu nous procurer, Gérald Darmanin s’adresse à Jean-Félix Acquaviva après les mots prononcés le 8 mars dernier : « Ces propos qui ont été rendus publics, constituent une accusation particulièrement grave et je considère qu’il est indispensable de savoir ce qu’il en est réellement ».
Le ministre, dont dépendent les préfets, poursuit : « J’imagine que vous ne les avez prononcés qu’en ayant en main les preuves correspondantes : en ma qualité de ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer, il me reviendrait alors d’en tirer toutes les conséquences ».
Par l’intermédiaire de ce courrier, Gérald Darmanin demande alors des comptes : « Dans ces conditions, je vous demande vivement que vous me transmettiez les éléments de toute nature ».
À l’occasion de la session du 27 avril de l’Assemblée de Corse, Jean-Félix Acquaviva a réagi au courrier. « Je suis serein, la commission d’enquête parlementaire, était le lieu pour dire ce que j’ai dit le 8 mars dernier. J’ai évoqué ces éléments en tant que preuve supplémentaire, parce qu’il y en a d’autres, en faisant valoir qu’il y avait un esprit qui empêchait le rapprochement des membres du commando dit Erignac. Une logique de vengeance qui était dans la tête de certains préfets, de fonctionnaires ou de politiques de manière historique dans ce dossier. Moi je confirme ces échanges, je suis serein sur l’évolution de la situation quant à ces éléments. […] Ils sortiront lorsque le pouvoir du parlement fera le bilan et le diagnostic des travaux de la commission d’enquête parlementaire ».
Relancé sur la question, le conseiller Fà Populu Inseme martelle que ces messages sortiront en temps voulu : "Ces textos existent, vous comprenez ce que je vous dis ? Donc à un moment donné ils sortiront, voilà."
La conclusion des travaux de la commission d'enquête parlementaire est prévue à la fin du mois de mai.
Jusqu’alors, le député n’a pas donné preuve de ce qu’il avançait en commission d’enquête parlementaire.
Difficile de dire de dire si ces affirmations sont avérées ou non à ce stade, mais cette nouvelle passe d’armes intervient dans un timing qui pourrait poser question. Pourquoi a-t-il fallu un mois au ministre pour décider de demander des explications par écrit au député de Haute-Corse ?
Cette lettre est en effet rendue publique après une longue interruption et plusieurs reports des rencontres. La prochaine réunion Place Beauvau est prévue le 16 mai, elle portera sur le foncier.
Quel effet pourrait avoir ce nouvel épisode des relations entre le gouvernement et les élus de la majorité nationaliste sur le processus en cours ?
Le moins que l'on puisse dire c'est qu'il ne semble pas avancer dans les conditions les plus apaisées.