Le groupe privé Almaviva santé, détenteur d'une trentaine d'établissements sur le continent, a indiqué son souhait de racheter le groupe Maymard, opérateur de santé privé le plus important en Corse. Une opération qui "menace tout le secteur de la santé" insulaire pour Femu A Corsica.
Le groupe Almaviva santé, opérateur de santé privé à la tête de 36 établissements répartis en Ile-de-France et en Provence-Alpes-Côte d'Azur pourrait bientôt prendre ses quartiers en Corse.
C'est du moins ce que laisse entendre un communiqué du groupe paru le 1er décembre : Almaviva santé y indique ainsi entrer en "négociation exclusive pour l'acquisition des établissements du groupe Maymard à Bastia".
Maymard représente le premier groupe d'hospitalisation privé en Corse. Il est à la tête de la polyclinique Maymard à Bastia, mais également de "la clinique Filippi, la clinique Toga, une unité d'hospitalisation à domicile, le centre de dyalise Sainte-Catherine, ainsi que des activités de radiothérapie et de médecine nucléaire", rappelle la communiqué. Plus encore, il compte 70 praticiens, et 400 salariés.
La clinique Maymard, dans le centre ville de Bastia
"Assurer harmonieusement la pérennité du groupe Maymard"
Pour le président du groupe Almaviva santé, Yann Coléou, ce rachat vise à "apporter aux établissements du groupe Maymard, ainsi qu’aux patients corses une expertise médicale éprouvée ainsi que sa capacité d’investissement et de développement pour renforcer l’offre de soins sur le territoire de Haute-Corse, en partenariat avec l’hôpital public".Le rapprochement avec Almaviva […] permettra de continuer à assurer une prise en charge de proximité et de qualité aux habitants de la région de Bastia.
Une opération qui permettrait à Almaviva santé de détenir un total de 41 établissements, répartis en Ile-de-France, en région Sud et en Corse.
"Le rapprochement avec Almaviva, est une garantie pour assurer harmonieusement la pérennité du groupe Maymard et celle des pôles d’excellence de notre territoire de santé. […] Il permettra de continuer à assurer une prise en charge de proximité et de qualité aux habitants de la région de Bastia", s'est de son côté félicitée Lizy Maymard, présidente du groupe Maymard.
Pour le communiqué du groupe Almaviva santé, 01/12/2020
Ce rachat, ajoute-elle, "est dans la suite logique de ce que voulait [son] père", Ivan Maymard, ancien propriétaire du groupe récemment décédé. "C'est comme un hommage qu'on lui rend aujourd'hui."
Un CSE convoqué le 8 décembre
Un enthousiasme que ne partage ni le syndicat CGT de la clinique Maymard, ni Femu A Corsica.
La CGT de Corse indique ainsi que c'est par voie de communiqué, le 2 décembre, que "les salariés ont appris la vente de leur établissement". Le syndicat se questionne : "Quelles reprises d'activités ? Quelle offre de soin et quel projet de développement ? Quelles autorisations d'activités ? Quel plan de formation pour garantir le maintien des emplois ?"
Un CSE (comité social et économique) extraordinaire est convoqué le 8 décembre, durant lequel la CGT de Corse "exige que toute la transparence soit faite sur cette transaction." Si les réponses voulues n'étaient pas apportées, le syndicat prévient : "nous entamerons les mobilisations nécessaires".
Une opération qui "menace tout le secteur de la santé" insulaire, selon Femu A Corsica
Femu A Corsica, de son côté, "s'oppose avec force à ce qu'un groupe extérieur à l'île, propriétaire de 17 établissements en région Sud, et de 19 en Ile de France, puisse détenir, à travers le rachat projeté, une place majeure dans le secteur de la santé à Bastia et en Corse", indique le parti autonomiste dans un communiqué ce 3 décembre."Et ce d'autant plus que cette opération n'est qu'une déclinaison supplémentaire d'une logique prédatrice d'ensemble, mise en œuvre par des grands groupes extérieurs à l'île, et qui menace tout le secteur de la santé, celui du médico-social, et de l'aide en faveur des personnes âgées."
La Corse, poursuit le communiqué, "a vocation à construire un système de santé moderne, performant, où les structures publiques jouent pleinement leur rôle en faveur du droit à la santé pour tous (y compris à travers la création d'un CHU), et où les structures privées s'inscrivent dans un fonctionnement global cohérent avec la vision d'ensemble d'une société construite autour des valeurs de solidarité, d'entraide, et de justice sociale, pour les salariés et praticiens de ces structures comme pour leurs patients."
Femu A Corsica appelle de fait la collectivité de Corse, l'Etat et les structures publiques et privées et leurs institutions représentatives et syndicats à "poser un cadre global de discussion visant à mettre en oeuvre ces principes pour structurer une offre de santé conforme aux intérêts de la Corse et des Corses."Les acquisitions financières réalisées par de grands groupes externes dans le domaine de la santé,du secteur médico-social,de l'aide à la personne, se multiplient en #Corse.Le dernier épisode est la vente du groupe #Maymard.@Partitu_FemuAC @femuacorsica s'oppose à ces logiques ⤵️ pic.twitter.com/1qckHH7trC
— Jean-Félix Acquaviva (@JF_Acquaviva) December 3, 2020
En l'attente, le parti autonomiste corse demande que toute opération de rachat d'un établissement existant dans le domaine de la santé ou du médico-social "par un grand groupe extérieur soit [...] interdite."
Pérénnité des soins et protection des emplois
Un début de polémique que Lizy Maymard, présidente du groupe éponyme, assure avoir "entendu". "C'est logique qu'il y ait des questions, et ça me parait même sain". Mais la présidente du groupe souhaite désormais faire en sorte "que les choses se fassent calmement".Aucun document de rachat n'a encore été formellement signé, rappelle-t-elle. Mais si des négociations exclusives ont été entamées avec une entreprise continentale plutôt qu'insulaire, c'est parce qu'"aucune proposition locale n'était raisonnable". ""Le groupe Almaviva santé est un petit groupe que nous connaissons bien, et qui a l'habitude de reprendre des cliniques familiales. Nous pensons qu'il s'agit de la meilleure solution."
Contacté ce vendredi 4 décembre, elle assure qu'à la clinique et dans les autres établissements, "tout se passe normalement, le personnel travaille comme à l'habitude."Le groupe Almaviva santé est un petit groupe que nous connaissons bien, et qui a l'habitude de reprendre des cliniques familiales.
Les emplois des salariés du groupe, promet-elle, seront tous préservés. Plus encore, glisse Lizy Maymard, avec ce rachat devrait naître un "projet de santé ambitieux". Si aucun détail précis n'a pour l'heure été avancé, celui-ci aura pour objectif de "faire en sorte que les gens arrêtent de partir sur le continent pour se faire soigner, et puissent tous être pris en charge sur l'île."