Ancien président du comité régional d’équitation, Pierre-Toussaint Gaffory est accusé d’abus de confiance, d’escroquerie, de blanchiment aggravé, de fraude aux prestations sociales et de travail dissimulé. Son procès s'est ouvert ce mardi 15 novembre au palais de justice de Bastia.
Octroi de primes exceptionnelles et indues à son propre centre équestre, financement occulte de formations délivrées par ce même ranch, faux frais de transport et d'équipements...
Au total, ce sont plusieurs centaines de milliers d'euros qui auraient été détournés, selon le parquet, par Pierre-Toussaint Gaffory.
Abus de confiance, blanchiment aggravé, escroquerie et travail dissimulé
Agriculteur de profession et figure bien connue du monde agricole, Pierre Toussaint Gaffory est nommé en janvier 2010 à la tête du CRE, soit l'antenne régionale de la fédération nationale d'équitation.
La structure recense alors autour de 80 clubs hippiques adhérents, et dispose d'un budget annuel compris entre 150.000 et 200.000 euros, indique-t-il, principalement alimenté par des subventions versées par la fédération d’équitation nationale et la région.
En mai 2012, il démissionne de son poste, pour se consacrer, dit-il, à ses fonctions de président du centre départemental des jeunes agriculteurs (CDJA), pour lesquelles il a été nommé en janvier de la même année.
En janvier 2013, Pierre-Toussaint Gaffory est également élu premier vice-président de la Chambre régionale d'agriculture de la Corse, au sein de la liste d'union FDSEA et Jeunes Agriculteurs de Corse-du-Sud, menée par Stéphane Paquet, puis président de la FDSEA à compter de mars 2014.
C'est dans le cadre de toutes ces fonctions qu'il lui est reproché d'avoir commis des abus de confiance au préjudice du CRE, et des escroqueries au préjudice d'entités publiques ou d'organismes chargés d'une mission de service public.
Un préjudice estimé à plusieurs centaines de milliers d'euros
L'affaire débute en juillet 2013, avec le dépôt d'une plainte auprès du procureur de la République d'Ajaccio par la présidente qui a succédé à Pierre-Toussaint Gaffory au comité régional d'équitation. Celle-ci indiquait avoir découvert, par le biais d'un audit réalisé sur les exercices 2011 et 2012, des "anomalies de gestion" qu'elle estimait imputables à Pierre-Toussaint Gaffory.
Le document, accablant, pointe l'utilisation de la CRE par ce dernier comme une "structure écran" pour détourner plusieurs centaines de milliers d'euros.
Cela via des surfacturations, des faux frais de transport, des aides directement versées sur son compte en banque personnel, ou encore une prime exceptionnelle indûment versée au centre équestre appartenant à sa famille. Il aurait également financé via, un organisme de fonds d'aide à la formation des agriculteurs, des formations délivrées par ce même centre équestre auprès du CDJA, dont il était alors le président, pour un montant de plusieurs dizaines de milliers d'euros.
je pense aujourd'hui que je n'aurais jamais dû être président du CRE.
Pierre-Toussaint Gaffory
Interrogé de longues heures à la barre ce mardi, Pierre-Toussaint Gaffory a reconnu une partie des faits, et plaidé un certain manque d'expérience aux fonctions de présidence du comité d'équitation régionale, indiquant avoir été "démarché par des gens pour prendre le poste."
"J'étais flatté, je ne vais pas mentir, j'ai accepté. Mais je pense aujourd'hui que je n'aurais jamais dû être président du CRE. J'ai eu le temps de mûrir tout cela depuis, et pour moi, c'était vraiment un mauvais épisode de ma vie. Je l'ai fait parce que je suis vraiment passionné par ce milieu, par les vaches, par les chevaux, mais ce n'était pas pour moi."
Il nie néanmoins tout déplacement fictif, "tous mes déplacements sont vrais", et toute accusation de formations supposément non-assurées, et pourtant bien payées à son ranch familial. "Ce sont les gens qui mentent alors, vous avez des ennemis ?", le questionne le président, Alexandre Julien. "Oui, ce sont des mensonges", insiste Pierre-Toussaint Gaffory.
"C'est un dossier qui a pris du temps, qui a demandé beaucoup d'investigations, rappelle son conseil, Me Stéphane Nesa. Il y a des faits qui ne sont pas contestés et qui sont pour certains très anciens, 12 ans. Il va falloir que la justice se pose la question de ce qu'on fait 12 ans après. Sur certains autres faits, il y a effectivement des discussions. [...] Monsieur Gaffory est là pour s'expliquer. On ne lui a rien épargné, mais il est là pour s'expliquer, et il le fera dans le calme et dans la quiétude qui sont les siennes."
Outre Pierre-Toussaint Gaffory, huit autres personnes sont jugées dans cette affaire, notamment pour complicité d'escroquerie et de blanchiment aggravé.
Le procès se poursuit ce mercredi 16 novembre, avec les réquisitions et les plaidoiries.