Ce jeudi 4 juillet, la cour d'assises spécialement composée de Paris a acquitté Cédric Courbey de l'assassinat de Christian Leoni en 2011 à Moriani, mais reconnu coupable d'association de malfaiteurs. Il est condamné à 12 ans d'emprisonnement.
Ce jeudi 4 juillet, la cour d'assises spécialement composée de Paris a acquitté Cédric Courbey de l'assassinat de Christian Leoni, mais reconnu coupable d'association de malfaiteurs. Il est condamné à 12 ans d'emprisonnement, 10 ans d'interdiction de porter une arme et sera inscrit au Fijait.
Un verdict qui soulage les proches de l'éleveur de 45 ans, et qui, pour Me Eric Barbolosi, un des avocats de la défense, n'est "que justice".
La décision est plus amère, cependant, pour la famille de Christian Leoni. Pour leur avocat Me Jean-François Santacroce, le verdit est une déception : " La cour d'assises s'est prononcée et a acquitté Cédric Courbey, nous en prenons acte. Ceci ne règle pas les questions qui sont posées : pourquoi ? et par qui ?".
Le Ministère public, s'il le souhaite, a dix jours pour faire appel de l'acquittement.Un prochain procès pourrait donc se tenir à nouveau dans les prochains mois à la cour d'assises de Paris.
Jean-Christophe Albertini, co-accusé, est lui reconnu coupable d'association de malfaiteurs. Il est condamné à 5 ans d'emprisonnement, 10 ans d'interdiction de porter une arme et sera inscrit au Fijait.
► Les plaidoiries de la défense
Mes Philippe Dehapiot, Christian Saint Palais, Marc-Antoine Luca et Eric Barbolosi se sont levés ce jeudi 4 juillet dans après-midi aux intérêts de Cédric Courbey. Ils ont fustigé la peine de réclusion criminelle à perpétuité réclamée quelques heures plus tôt par l’avocat général à l’encontre de leur client, la jugeant « disproportionnée », « horrible », « empreinte de méchanceté ».
Une peine « que l’on n’a pas requise contre Yvan Colonna à son dernier procès » et qui confère « à Christian Leoni le même statut qu’au préfet Érignac », de l’avis de Me Eric Barbolosi. Une peine que « le parquet sera contraint de requérir à l’encontre du terroriste djihadiste Salah Abdeslam lorsque celui-ci sera renvoyé aux assises ».
« Les fantômes du FLNC »
La défense réclame d’une voix commune l’acquittement de Cédric Courbey des poursuites les plus sérieuses (la participation à l’assassinat de Christian Leoni et l’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste) mais accepte une condamnation pour le délit connexe d’infraction à la législation sur les armes, à condition qu’il soit « ramené à de justes proportions ».
Bref, l’essentiel pour les conseils de l’éleveur de 45 ans, c’est que « Cédric Courbey puisse sortir et retrouver la Corse » à l’issue du procès.
Premier à se lever pour la défense, Me Philippe Dehapiot a -en une plaidoirie d’une heure conduite sans aucune note, dans une maîtrise parfaite de la langue et servie par une logique sans failles- déconstruit point par point une accusation jugée par lui trop légère, injuste et ne démontrant pas la culpabilité de l’accusé.
À sa suite, Me Marc-Antoine Luca a pointé du doigt « les fantômes du FLNC que l’avocat général veut faire planer sur un dossier alors qu’il y a un seul homme dans le box » et défendu d’un point de vue plus personnel « le projet agricole sérieux que Monsieur Courbey a fait pour l’avenir ».
Pour sa part, Me Eric Barbolosi a regretté « un renversement de la charge de la preuve », estimant « que devant la cour d’assises spécialement composée, on demandait à Cédric Courbey de démontrer son innocence alors que l’on devrait prouver sa culpabilité et qu’on ne l’a pas fait ». Or, selon le pénaliste, dans le dossier, « le doute existe et il doit profiter à l’accusé ».
« Tout est possible, mais rien n’est démontré »
Faute de doute, Me Christian Saint Palais, le dernier avocat appelé aux intérêts de Cédric Courbey, a une conviction : « L’examen du dossier ne permet pas d’entrer en voie de condamnation contre l’accusé ». « Hors ADN, il n’y a aucune preuve, mais quelques indices », pose l’avocat. Et l’ADN de Cédric Courbey sur un branchage proche de la scène de crime ne prouve pas la culpabilité de l’accusé, de l’avis de Me Saint Palais.
D’ailleurs, le reste ne pèse pas bien lourd non plus, une fois passé au tamis de la plaidoirie. La personnalité, le casier judiciaire, le cadre familial ? « Cela ne démontre pas l’appartenance au FLNC ».
Les renseignements anonymes ? « ce sont des éléments de départs qui doivent être vérifiés et qui ne valent rien par eux-mêmes ». Les amitiés, la téléphonie, les armes ? D’autres cochent les mêmes cases et n’ont pas été poursuivis. En résumé, « tout est possible, mais rien n’est démontré et la thèse de l’accusation n’est pas plus probable qu’une autre », tranche la robe noire.
Et de conclure comme il avait commencé : en réclamant l’acquittement.
► Réquisitions
Ce jeudi 4 juillet, après huit jours de procès, l’avocat général Guillaume Portenseigne s’est levé pour porter la voix du ministère public.
En ouverture de son propos, le magistrat n’a fait mystère ni de ses intentions ni de son intime conviction : il réclame une condamnation car pour lui, non seulement il ne fait aucun doute que c’est bien un commando du FLNC qui a exécuté Christian Leoni, mais il est également certain que Cédric Courbey faisait partie de ce commando.
La preuve ? Le FLNC a revendiqué l’assassinat de Christian Leoni, entrepreneur dans le BTP de 49 ans , réputé proche de la brise de mer. L’organisation clandestine avait même, dit-il, « annoncé le crime lors d’une conférence de presse clandestine » et donné le mobile : « faire œuvre de justice » après l’exécution de son militant Charles Philippe Paoli en juin 2011 et dont le « seul tort était de s’investir dans le développement de son entreprise », dixit le FLNC.
Pour l’avocat général, l’assassinat a bien un caractère « politique et terroriste » mais les causes du crime s’ancrent également « dans une guerre de l’immobilier à Moriani plage ».
Une guerre entre deux hommes différents mais aux intérêts communs, pour le magistrat qui déroule sa présentation : « A ma gauche, Christian Leoni, mafieux sur le retour qui veut prendre toute sa place dans le BTP en employant des méthodes d’intimidation. A ma droite, Charles Philippe Paoli, entrepreneur de BTP mais aussi militant nationaliste et homme de l’ombre participant à la clandestinité, considéré comme un lieutenant du haut dignitaire du FLNC Charles Pieri ».
Pour l’avocat général le tableau criminel est facile à peindre : Christian Leoni voulait s’installer dans le secteur du BTP dans la région, où Charles Philippe Paoli avait pourtant déjà pignon sur rue. La tension monte, l’établissement du premier est plastiqué, puis le complexe du second l’est également. Finalement Christian Leoni décide d’employer la manière forte en tuant Charles Philippe Paoli, chose dont il se serait d’ailleurs vanté abondamment selon une conversation téléphonique entre deux tierces personnes interceptée en procédure.
En réplique au premier crime, jamais judiciairement élucidé, le FLNC aurait donc commis le second, aujourd’hui discuté devant la cour d’assises. Voilà pour le contexte.
Un alibi « sorti du chapeau »
Au motif politique s’ajoute, selon le ministère public, un motif « personnel » au crime, en témoignent « les termes affectifs et personnels du communiqué de revendication de l’assassinat».
Or, « s’il ne fait aucun doute que Cédric Courbey a fait partie du FLNC (il a d’ailleurs été condamné à trois reprises dont une devant la cour d’assises spécialement composée), il était aussi certainement le meilleur ami de Charles Philippe Paoli», déroule Guillaume Portenseigne.
Autre élément déterminant de l’accusation : l’ADN de Cédric Courbey, retrouvé sur des branchages situés sur ce qui ne peut être que le chemin de fuite emprunté par les tueurs de Christian Leoni.
Sur ce point, central dans l’affaire, l’avocat général s’emploie à évacuer un à un les arguments que La Défense ne devrait pas manquer de développer. Pour le magistrat, les analyses ont été faites « de manière régulières et sont fiables », l’ADN date très certainement « du jour du crime car il a plu les jours précédents » et que l’empreinte génétique « n’aurait pu être conservée si elle avait été déposée précédemment ».
« Comment Cedric Courbey pourrait il être innocenté d’un crime qu’il avait déjà toutes les raisons de commettre alors que son empreinte génétique se trouve sur les lieux ? », interroge alors Guillaume Portenseigne, faussement candide.
Et de poursuivre son œuvre de destruction de La Défense en s’attaquant à l’alibi « sorti du chapeau » un an après son arrestation par Cédric Courbey. « Le temps de trouver le bon pigeon » pour le lui fournir, insiste lourdement le magistrat.
Le maximum prévu par la loi
Bref, pour l’avocat général tout oriente vers la culpabilité de Cédric Courbey : « un renseignement anonyme, son appartenance au FLNC, sa proximité avec Charles Philippe Paoli, son alibi qui ne tient pas la route, sa vie en clandestinité et son interpellation en possession d’armes ».
Pour le magistrat « c’est une peine de mort que Cédric Courbey et ses petits copains ont prononcé contre Christian Leoni ». Et l’accusé « a de la chance car la justice française n’ordonnera jamais qu’on lui rafale le visage à la Kalachnikov ».
En répression le magistrat réclame à l’encontre de Cédric Courbey le maximum prévu par la loi : la réclusion criminelle à perpétuité assortie de 22 ans de sûreté.
A l’encontre de jean Christophe Albertini, Co accusé de Cédric Courbey jugé par défaut, le ministère public a réclamé 10 ans de prison. C’est également le maximum prévu par la loi, puisque l’accusé n’est poursuivi que pour des délits connexes d’association de malfaiteurs et d’infraction à la législation sur les armes.
Le verdict devrait être rendu en fin de journée
► 6e jour de procès
Plus tôt dans la journée, plusieurs personnes, faisant partie de l’environnement de Cédric Courbey, ont été entendues pour évoquer le contexte à l’époque des faits.
En début d'après-midi se sont tenues deux visioconférences, dont celle de Carl’Andria Sisti.
Carl'Andria Sisti, de la prison où il est incarcéré, a été clair...
Je ne sais rien, je ne veux rien savoir, et même si je savais quelque chose je ne vous dirais rien...
L'homme avait été cité par le président de la cour d'assises spécialement composé, la semaine dernière.
Le magistrat l'avait présenté comme l'un des lieutenants de Christian Leoni :
► 5e jour de procès
Comment l’ADN de Cédric Courbey s’est-il retrouvé sur des branchages à proximité de la scène de crime ? Cette question, centrale dans le dossier, a occupé une bonne partie des débats de la journée avec le passage à la barre, notamment, d’un expert en génétique.
Il a procédé à l’analyse du scellé qui fonde le socle de l’accusation. Pourtant, sa déposition semble pencher en faveur de la défense. L’expert l’assure, il est scientifiquement impossible de dire si c’est le jour du crime ou à un autre moment que l’ADN de Cédric Courbey a été déposé sur les lieux.
« C’est un endroit où il se rendait assez fréquemment. Il prenait ses précautions, il ne se garait pas sur le parking et il empruntait un chemin. C’est sur ce chemin que l’ADN a été retrouvé. C’est la raison pour laquelle il a toujours, dès qu’on lui a notifié l’expertise, expliqué que c’était possible que ce soit son ADN, mais que c’était impossible que son ADN ait pu être déposé à l’endroit où il a été retrouvé le jour des faits », soutient Eric Barbolosi, avocat de Cédric Courbey.
Le passage à la barre des experts ADN pourrait porter un coup dur à l’accusation, dont le scénario semblait clair jusqu’à présent. Pour l’avocat général, une chose est certaine, Cédric Courbey a fait partie du commando qui a exécuté Christian Leoni et s’est en s’enfuyant qu’il aurait laissé son empreinte génétique sur un chemin jouxtant les lieux du crime.
Un autre problème va se poser à l’accusation : aucune des demandes de contre-expertise faite par la défense n’a été acceptée. Et une erreur de courrier a entraîné la destruction du scellé en cours d’enquête.
► 4e jour de procès
Ce vendredi 28 juin, la cour d’assises spéciale de Paris s’est replongée dans la matinée du 28 octobre 2011 avec la déposition des quatre personnes qui ont assisté à l’exécution de Christian Leoni à Moriani plage.
L’ancien gérant de l’établissement devant lequel se sont produits les faits raconte.
Christian Leoni est un habitué du bar-restaurant. Il arrive ce jour-là vers 9 h 30, demande à voir le propriétaire.
Ce dernier étant absent, il repart presque aussitôt.
Le gérant entend ensuite un coup de feu, se retourne et voit Christian Leoni, à terre, gisant au pied de son véhicule. Deux hommes cagoulés, vêtus de noir et armés s’approchent de la victime, lui donnent le coup de grâce.
L’ancien gérant et les trois clients présents dans l’établissement se jettent au sol pour protéger leur vie.
À la barre, le témoin se souvient de sa terreur au moment des faits : « Pour moi, il venait pour nous exécuter, nous étions des témoins », explique-t-il.
L’audience reprendra lundi avec l’audition très attendue des experts en génétique.
► Procès - 2ème jour
Soutien de Corsica Libera
ce matin, ce sont François Sargentini et Jospeh Colombani qui se sont présentés devant la cour d'assises spécialement composée pour apporter leur témoignage.
Des témoignages de moralité en faveur du militant de Corsica Libera accusé d'avoir assassiné Christian Leoni.
François Sargentini, conseiller exécutif, en a profité pour faire passer un message...
Si la Corse, de son côté, a tourné la page de la violence politique, c'est du donnant donnant, et chacun doit faire un effort.
Hier, c'est Jean-Guy Talamoni, sur nos images au côté de la mère de Cédric Courbey qui s'est rendu au procès pour manifester son soutien.
Le père et la mère de Cédric Courbey ont également été entendus.
► Procès - 1er jour
Retour sur l'affaire :
C'est un assassinat que l'on peut qualifier de politique, puisqu'il s'agit du dernier revendiqué par le FLNC avant le dépôt des armes, intervenu en juin 2014.
Principal accusé à comparaître devant la Cour d'Assises spécialement composée de Paris :
Cédric Courbey, militant de Corsica Libera et proche de Charles Pieri.
L'accusation dispose d'un argument de poids contre le mis en cause : son ADN a été découvert près du lieu du crime.
Mais pour Eric barbolosi, avocat de la défense, il ne s'agit pas d'un élément probant:
L'ADN a été retrouvé sur un chemin dans les alentours, et pas sur le pas de tir, ce qui change beaucoup de choses. C'est un chemin qui est très emprunté, et monsieur Courbey fréquentait l'établissement devant lequel les faits se sont produits. Il n'est pas incohérent que son ADN puisse se retrouver sur ce chemin à proximité...
Christian Leoni tué pour venger Charles-Philippe Paoli
Reste un autre élément à prendre en considération, selon l'accusation :
Le contexte.
Christian Leoni est assassiné le 28 octobre 2011 dans ce restaurant de Moriani Plage.
Un mois plus tard, le FLNC revendique le crime et le justifie :
L'organisation clandestine a agi, dit-elle, en réplique à l'assassinat d'un de ses militants, Charles-Philippe Paoli, un autre proche de Charles Pieri exécuté par un commando armé en juin 2011.
Un contexte qui pourrait peser dans la balance, d'autant que la situation en Corse demeure compliquée.
Les tensions entre le gouvernement et la majorité nationaliste sont plus marquées que jamais.
Et les attentats commis au printemps contre des résidences secondaires et des bâtiments des impôts pourraient donner une nouvelle coloration au procès.