Prix des carburants : "4 mois après l'avis de l'Autorité de la concurrence, que fait la Région ?"

A l'occasion de l'appel à mobilisation lancé par le collectif "Agissons contre la cherté des carburants en Corse" pour le 3 avril prochain, son porte-parole Frédéric Poletti revient sur les raisons des écarts de prix importants et persistants entre la Corse et le reste du territoire national.

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Un appel à mobilisation inédit : pour la première fois depuis sa création, le collectif "Agissons contre la cherté des carburants en Corse" a appelé les automobilistes insulaires à se mobiliser le 3 avril prochain à 14h30 devant la préfecture de Bastia pour protester contre le prix des carburants dans l'île.

Ainsi, malgré un taux de TVA de 13 %, contre 20 % sur le continent, le coût des carburants est nettement plus cher en Corse que sur le continent : selon une étude réalisée par l'Insee en 2015, le différentiel serait de 6,7 % pour le gazole et 5,3 % pour le SP95.

Un écart de prix qui grève lourdement le budget des ménages corses, très dépendants de la voiture pour leurs déplacements dans l'île.

Toujours d'après cette étude de l'Insee, les automobilistes corses dépenseraient en carburant, en moyenne, 300 euros de plus par an que le reste des ménages français. 

Alors que l'Autorité de la concurrence a rendu en novembre dernier son avis sur la situation en Corse, appelant à mieux réguler le monopole du stockage et de l’approvisionnement des carburants en Corse, le collectif "apolitique et citoyen" entend désormais faire pression sur les décideurs politiques et la Région, afin que ceux-ci sollicitent l'Etat pour réglementer le marché des carburants dans l'île.

Son porte-parole, Frédéric Poletti, ingénieur de formation et directeur de la campagne de Jean-Sébastien de Casalta aux dernières élections municipales, revient sur l'avis émis par l'Autorité de la concurrence, la situation monopolistique de l'approvisionnement en carburant dans l'île et les mesures à mettre en place pour y remédier : 

Comment s'explique la différence de prix par rapport au reste de la France ?

"C'est un dossier à la fois simple et technique : jusqu'en 1985, sous l'effet de la réglementation du prix des carburants, et d'une fiscalité avantageuse, la Corse était la région de France où les carburants étaient les moins chers.

Or, nous avons étudié le prix des carburants en comparaison avec le département des Bouches-du-Rhône, car nos deux territoires sont censés s'approvisionner au même endroit, et il ressort que l'écart de prix s'est creusé au cours des années, concomitamment à l'apparition du monopole du groupe Rubis en Corse.

Ce monopole de fait sur le stockage et la coordination des approvisionnements en carburant dans l'île est issu de la position majoritaire acquise par la société Rubis Énergie, propriétaire des stations de service ViTO, au capital de DPLC, l'entité propriétaire des deux dépôts pétroliers insulaires.

Il y a donc un lien de cause à effet entre cette situation monopolistique et la cherté des carburants."

Quelle analyse faites-vous de l'avis émis par l'autorité de la concurrence ?

"Celui-ci nous permet d'y voir plus clair, et confirme ce que nous savions déjà : qu'il existe en Corse une situation de monopole dans le domaine des carburants, et que c'est un facteur à prendre en compte pour expliquer les différences de prix avec le continent.

Pendant longtemps, on a avancé comme seule explication la topographie de l'île, son caractère insulaire et ses routes sinueuses. Mais les écarts de prix vont croissants, alors que l'île n'est pas devenue plus inaccessible ou plus montagneuse au cours des années.

Ce surcoût doit donc s'expliquer autrement."

Quelle est la solution préconisée par le collectif ?

"Nous demandons désormais à ce que l'Etat régule cette situation, et pour ce faire, il faut que la Région prenne ses responsabilités et se saisisse de cette question. Depuis la parution de l’avis de l’autorité de la concurrence le 17 novembre 2020, force est de constater que rien ne bouge.

La régulation n'est pas la meilleure des solutions, mais c'est la seule : elle vise à faire baisser les prix en fixant les marges à chaque étape de la distribution des carburants: approvisionnement, stockage et vente au détail.

La régulation n'est cependant pas une punition : il s'agit tout simplement de corriger un marché à tendance monopolistique. C'est la raison pour laquelle le code du commerce la prévoit.

La seule baisse de la fiscalité, en l'absence de régulation, ne peut constituer une solution : le taux de TVA à 13 % en Corse contre 20 % sur le continent représente à peu près 30 millions d'euros par an, tandis que la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) inférieure à celle que l'on a dans les autres territoires français parce que la Région Corse n'applique pas la majoration régionale sur cette taxe, soit environ 5 M€ par an.

Cela représente donc près de 35 millions d'euros par an d'allègement fiscal, et pourtant les usagers insulaires continuent de payer plus cher."

Pourquoi avoir attendu avril 2021 pour appeler à manifester ?

L'appel à mobilisation du 3 avril est le premier lancé par notre collectif depuis sa création en 2018, car nous avons voulu comprendre le problème, l'étudier et pouvoir avancer des solutions avant d'appeler les gens à manifester.

Nous ne sommes pas les meneurs, mais les initiateurs de ce combat. Celui-ci n'aura de sens que dans l'expression de la diversité.

C'est la raison pour laquelle nous avons appelé tous les syndicats et toutes les formations politiques à nous rejoindre, sous leurs propres couleurs.

A travers cet appel à mobilisation, il s'agit également de se battre contre un des maux insulaires, notre propre fatalisme : jusqu'en 1985 nous avions les prix les moins chers de France.

Cela montre bien que les écarts de prix actuels ne sont pas un fait immuable, mais bien liés à la présence d'un monopole dans l'île."

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