Référendum d'autodétermination en Nouvelle-Calédonie : un scrutin "illégitime" pour les indépendantistes

Les habitants de Nouvelle-Calédonie ont dit "non" à l'indépendance, lors du troisième référendum d'autodétermination de l'archipel, tenu ce dimanche 12 décembre. Un scrutin marqué par une forte abstention, après l'appel au boycott des indépendantistes.

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L'issue du scrutin ne faisait guère de doute. Avec 96,24% des voix exprimés, le non a triomphé, dimanche 12 décembre, dans le troisième et dernier référendum d'auto-détermination en Nouvelle-Calédonie prévu par les accords de Nouméa.

Un score écrasant dont s'est félicité le président de la République, Emmanuel Macron, vantant une France "plus belle car la Nouvelle-Calédonie a décidé d'y rester". Mais qui pointe aussi une autre réalité, celle d'une abstention record, après l'appel des indépendantistes à boycotter le scrutin : seulement 43,90% de participation, en forte baisse par rapport aux deux précédents référendums. Ces derniers invoquaient l'impossibilité d'organiser "une campagne équitable", du fait de l'épidémie et réclamaient le report du vote à septembre 2022.

"Nous sommes bien évidemment satisfaits de ce taux de participation, qui se place dans une ligne droite des différentes perspectives que nous avions donnée, compte tenu des différentes situations sur le territoire : la crise sanitaire, la non-préparation de la consultation en terme de campagne électorale...", a réagi Mickaël Forrest, membre du bureau politique du FLNKS, le Front de libération nationale kanak et socialiste. "Il faut retenir le fait que le peuple des Kanaky a suivi le mot d'ordre et c'est important pour nous."

"Nous considérons qu’en termes de légitimité juridique et politique, il n’y a que deux référendums, 2018 et 2020"

Reste désormais la question de la légitimité de ces résultats. Lors des précédents scrutins, le non l'avait déjà emporté à la question "Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ?", mais uniquement d'une courte tête : 53,26% en 2020 (pour 85,7% de participation), et 56,67% en 2018 (pour 81% de participation).

Mais pour les indépendantistes, ce nouveau référendum n'en était pas un, et la victoire du "non" appelle à l'ouverture de nouvelles discussions plutôt qu'à leur clôture. Les militants ont fait savoir leur refus de reconnaître les résultats, pour un vote qui leur a été "confisqué".

Sur FranceInfo, Roch Wamytan, président indépendantiste du congrès de la Nouvelle-Calédonie et ancien chef du parti kanak FLNKS a regretté un "retour à la case départ". "Nous considérons qu’en termes de légitimité juridique et politique, il n’y a que deux référendums, 2018 et 2020. Celui-là, c’est le référendum de l’Etat français et de ses soutiens en Nouvelle-Calédonie, pas le nôtre. […] Nous viendrons aux discussions avec la personne qui va sortir des urnes de la prochaine présidentielle. Nous attendrons le prochain. Si c’est Emmanuel Macron, nous allons continuer à discuter."

"Il s'agit d'un référendum où une seule communauté a participé", analyse le politologue André Fazi, les Caldoches -  la partie de population néo-calédonienne essentiellement d'origine européenne, installée en Nouvelle-Calédonie depuis une ou deux générations -, quand les Kanak représentent pourtant la moitié de la population. Une porte ouverte pour le mouvement pro-France, qui se présentait donc sans véritable adversaire.

"À mon sens, cela enlève énormément, pour ne pas dire toute sa portée politique" au référendum, tranche André Fazi.

Le fait qu'une communauté ait choisi de ne pas participer à ce vote ne fait que renforcer la difficulté et les frustrations de ceux qui sont la moitié du problème.

André Fazi, politologue

"Même si les Kanak avaient participé à ce vote, poursuit-il, il y aurait eu des difficultés à l'issue de celui-ci, parce qu'à vote serré 52/48, pour ou contre l'indépendance, cela ne règle pas tout. Les dispositions de la Nouvelle-Calédonie sont qualifiées de transitoire dans la constitution, donc il y aurait forcément eu de nouvelle discussions institutionnelles. Le fait qu'une communauté ait choisi de ne pas participer à ce vote ne fait que renforcer la difficulté et les frustrations de ceux qui sont la moitié du problème."

Poursuite du combat "pour la pleine souveraineté"

Quelle suite envisager désormais ? "Le plus simple serait de stabiliser les actuelles institutions, qui reposent sur un gouvernement et exécutif partagés entre Caldoches et Kanak. Mais il est fort probable que les Kanak ne l'entendent pas de cette manière.

Avant toute chose, le FLNKS et les organisations indépendantistes entendent "prendre le temps d'analyser la situation, aussi bien" avec l'ensemble des composantes du FLNKS, mais aussi des membres du conseil stratégique indépendantiste de non-participation", détaille Mickael Forrest. Cela afin de déterminer les futures perspectives "pour la suite de notre combat pour la pleine souveraineté."

Le militant FLKNS l'assure pour autant : aucune manifestation violente n'est envisagée. "Nous avons lancé un appel au calme, et avions donné à nos maires et conseillers municipaux la consigne de faire le scrutin en toute transparence."

Soutien des mouvements nationalistes corses

En Corse, le vote a été scruté de très près par les mouvements nationalistes, qui dénoncent un déni de démocratie. Gilles Simeoni, président du conseil exécutif, a ainsi indiqué au nom du parti Femu a Corsica le soutien de la majorité territorial au peuple Kanak, "qui vient de subir une parodie de référendum".

Corsica Libera a apporté son "soutien fraternel au peuple Kanak", regrettant que "le reniement des accords passés, le mépris de la volonté des peuples et de leurs droits imprescriptibles demeurent des constantes de toutes les politiques coloniales."

Le député européen François Alfonsi a de son côté estimé que "l’avenir de la Kanaky ne peut être décidé de Paris sur la base d’un faux référendum qui a exclu le peuple kanak de son déroulement. L’autodétermination reste à accomplir en Nouvelle-Calédonie."

 

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