SNCM : Stef sort par une porte, Baja Ferries revient par une autre

Décidément, le feuilleton des transports maritimes Corse-continent français n’en finit pas de rebondir. Stef a retiré son offre de reprise de la SNCM tandis que Baja Ferries veut revenir dans la course.

Le 9 octobre le groupe STEF annonce qu’il retire sa candidature à la reprise de la SNCM. Dans un communiqué la société d’Orbigny Maritime, qui représente les intérêts du groupe STEF estime que « les demandes de l’Autorité Française de la Concurrence et de la Commission Européenne ne permettent pas en l’état à STEF de devenir l’actionnaire de référence de la future compagnie dédiée aux activités corses et donc d’en garantir la pérennité ».  L’offre de STEF était « conjointe » et « indissociable » d’une offre déposée par le groupe franco-américain Baja Ferries.

STEF se proposait de reprendre les activités de la SNCM sur les lignes Marseille- Corse et Baja Ferries était candidate pour les lignes Marseille-Maghreb (Tunis-Alger). Le retrait de STEF élimine, mécaniquement, le groupe franco-américain.
Mais le 10 Octobre, le  journal Le Marin nous apprend que Baja Ferries veut revenir dans la course. Pour ce faire son PDG, Daniel Berrebi, demande au Tribunal de commerce de Marseille de reporter son audience prévue le 14 Octobre et annonce qu’il est de nouveau intéressé par la reprise de l’ensemble des activités de la SNCM (Maghreb et… Corse).

On peut lire, ici, le courrier de Daniel Berrebi envoyé au tribunal de commerce de Marseille


On ignore encore la position du tribunal. A ce jour, il reste trois candidats en lice :
L’offre de Christian Garin, celle du groupe Rocca Transports et celle du Consortium d’entreprises insulaires Corsica Maritima.

Ces derniers rebondissements mettent en lumière une série de problèmes, notamment :
.L’échec, provisoire, du projet STEF préparé de très longue date.
.La position qualifiée de « dogmatique » de la Commission Européenne.

STEF, un risque de position dominante

STEF se retire parce que la Commission Européenne n’est pas sure que l’offre de STEF ne se trouve pas en situation de position dominante sur le marché Marseille-Corse.

On peut lire, ici, le courrier de la Direction Générale de la Concurrence en date du 24 Septembre

Cette position de la DG Concurrence est à mettre en parallèle avec les doutes soulevés par l’Autorité de la Concurrence.

On peut lire, ici, le courrier de l'autorité française en date du 24 Septembre.


Aujourd’hui une partie du service public maritime Marseille-Corse, assuré par cargos mixtes (fret et passagers), est effectuée par la compagnie La Méridionale propriété du groupe STEF.
Si ce même groupe, par l’intermédiaire d’autres somites, reprend les activités de la SNCM, certains craignent un « monopole déguisé sur le fret ».
De manière directe (La Méridionale)  et indirecte (la future SNCM reprise), STEF aurait chapeauté deux compagnies qui devraient bénéficier de subventions publiques.
De plus, ce groupe aurait, directement et indirectement, le transport de près de 80% du fret maritime entre le continent français et la Corse.

La Commission Européenne considérée comme dogmatique

Ce risque de « position dominante », sur le fret, est réel. Cependant plusieurs observateurs notent que la DG Concurrence se pose moins de questions sur une situation semblable pour le marché des passagers.  En effet, depuis cette année, la Corsica Ferries France assure plus de 80% du trafic passager entre le continent français (Toulon-Nice) et la Corse.
A ce jeu, ne n’est pas STEF qui aurait eu la plus grosse position dominante.
Pour plus d’un connaisseur de ce dossier, la Commission Européenne a réduit la concurrence « au nom de la concurrence ».

STEF, un échec cuisant… pour l’instant

Le groupe frigoriste se prépare à la reprise des activités de la SNCM depuis vingt ans. C’est dire si ce retrait peu être lu comme un échec. C’est aussi la défaite de ce qu’il est convenu d’appeler le « capitalisme à la française ».
Le PDG de STEF, Francis Lemor est une figure emblématique du patron d’entreprise venant du Public. Cet ancien Inspecteur des Finances a été administrateur de la SNCM publique. Depuis vingt ans, il prépare la reprise des activités de la SNCM. Le rapport parlementaire « sur les conditions de privatisation de la SNCM » estime même que :
« M. Lemor dont la légitimité professionnelle est certaine a eu une influence, sans doute déterminante, pour détourner du dossier d’autres entreprises éventuellement intéressées »

Il faut ajouter que la Compagnie Méridionale et, à travers cette dernière le groupe STEF, bénéficient du soutien affiché des Président du Conseil Exécutif de Corse et de l’OTC (Office des Transports de la Corse).  De droite à gauche, en passant par des nationalistes, on ne tarit pas d’éloge sur « l’exemplaire Méridionale ».

Après l’échec économique, assiste-t-on à un échec politique ? Il est trop tôt pour le dire.

Baja Ferries revient

Lors d’un précédent appel d’offres lancé par le tribunal de commerce de Marseille, le groupe franco-américain avait déjà été candidat à la reprise de la totalité des activités de la SNCM.
Puis à la faveur du dernier appel à candidature, son PDG Daniel Berrebi s’était allié avec STEF. Les deux sociétés se partageant les marchés de Corse (STEF)  et du Maghreb (Baja Ferrie).
Après le retrait de STEF, Baja Ferries se retrouve, mécaniquement, éjecté.
Mais, le PDG de Baja revient à la charge. Il demande au tribunal de Marseille de retarder son audience prévue le 14 Octobre et souhaite être candidat à la reprise des activités Corse et Maghreb de la SNCM. Voir lettre de Daniel Berrebi, au tribunal, plus haut.

Pour certains observateurs, ce rebondissement permet au groupe STEF de rester en liaison avec Baja Ferries. Dans son courrier au tribunal Daniel Berrebi précise : « Baja Ferries et la CMN se sont accordés sur le principe d’une convention de subdélégation pour l’exploitation des lignes Corse, permettant donc la reprise par Baja Ferries des liaisons avec le Maghreb mais également de celles avec la Corse tout en levant les incertitudes précédemment exprimées sur la pérennité d’une reprise présentée isolément par Baja Ferries ».

En attendant l’éventuelle future DSP

La CTC doit prochainement débattre du contenu du futur contrat de service public maritime entre Marseille et la Corse.
En effet, l’actuel DSP (Délégation de Service Public) a été annulée par le Tribunal Administratif de Bastia, le 8 Avril 2015. Le TA a fixé un terme à l’actuel DSP, elle prendra fin le premier Octobre 2016.
Le Conseil Exécutif, par l’intermédiaire de l’OTC (Office des Transports de la Corse) doit donc revoir sa copie.
Le futur service public ne ressemblera pas à l’actuel. Le montant des subventions sera inférieur et le service pourrait être moins contraignant (moins de rotations sur les ports « secondaires » Propriano, Balagne et Porto-Vecchio).
Il n’est même pas certain qu’il  y ait une DSP assortie de subventions.
En attendant le 1er Octobre 2016, il va bien falloir continuer à assurer un service de cargos mixtes entre Marseille et la Corse.

Si le tribunal de commerce de Marseille désigne un repreneur de la SNCM, c’est ce repreneur qui assurera le service en « subdélégation » de La Méridionale. Il s’agira d’une continuité du servie public actuel, en attendant que l’assemblée de Corse fixe de nouvelles règles qui seront appliquées en Octobre 2016.
Comment se service, provisoire,  va-t-il se dérouler et avec quelle compagnie ?
C’est là, aussi,  que peuvent arriver de nouvelles surprises.
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