Depuis un an le drapeau breton flotte sur la mairie de Nantes. Mais au-delà des symboles, le dossier politique a-t -il encore une chance d’avancer ? En 2018, 105 000 citoyens de Loire Atlantique ont demandé à l’Etat d’organiser un référendum. Un vœu relayé par de nombreuses collectivités.
Ce voeu de référendum a été relayé de part et d’autre de la frontière administrative, mais il est resté lettre morte. On ouvre le débat dimanche 21 novembre dans "Dimanche en Politique" sur l'antenne de France 3 Pays de la Loire.
Pour Florian Le Teuff, adjoint aux enjeux bretons à la mairie de Nantes, “il est grand temps de faire avancer ce sujet qui traîne depuis 50 ans, il faut une solution démocratique en laissant les citoyens trancher”.
Michel Ménard, président du département de Loire Atlantique, estime lui aussi que les citoyens doivent s’exprimer. Il est en faveur d’un référendum décisionnel, organisé par l’Etat, mais à condition que ce dernier s’engage véritablement à respecter le verdict des urnes.
Si c’est pour organiser de nouveau une consultation qui n’est pas suivi d’effets comme avec Notre-Dame-Des-Landes, on créera encore plus de défiance chez les électeurs, donc il faut aller au bout avec un référendum décisionnel
Il prend l’engagement d’organiser une nouvelle délibération en ce sens au sein du conseil départemental, mais uniquement “après les élections de 2022, car il est préférable d’attendre d’avoir un nouveau président de la République et une nouvelle majorité à l’assemblée nationale, ou bien une équipe renouvelée en fonction du résultat des élections”.
Le sujet s’invitera-t-il d'ailleurs dans la campagne présidentielle ? “Ce sera inévitable pour tous les candidats qui viendront sur notre territoire, ils ne pourront pas y échapper” assure Florian Le Teuff.
Ce référendum peut il vraiment voir le jour ? “L’horizon 2024 semble un horizon raisonnable pour l’organiser après avoir eu en amont un débat de qualité, il ne faut pas aller plus vite que la musique” selon Florian Le Teuff.
Mais encore faut-il que l’Etat ait envie de l’organiser. Sarah El Hairy, secrétaire d’Etat au gouvernement, plutôt favorable à une fusion des deux régions, demande d’abord à ce que toutes les collectivités locales concernées se mettent d’accord. Un préalable pour que l'État engage le processus législatif.
“Il faut que la Bretagne, la Loire Atlantique, et la région des Pays de la Loire votent la même position. Aujourd’hui nous n’avons pas cette concordance, il faut être honnête sur la position des uns et des autres”
Les regards se tournent donc vers le Conseil régional des Pays de la Loire. Mais sa présidente Christelle Morançais l’assure à nouveau, pas question d’organiser une délibération sur cette question.
“Le temps démocratique nous l’avons eu au mois de juin, lors des élections régionales. Ça a été au cœur de nos débats, les Ligériens ont choisi. On a une culture bretonne, notamment en Loire Atlantique, mais sur le plan administratif je pense qu’on a d’autres priorités à gérer”.
Une réponse qui agace Florian Le Teuff. “Elle n'a pas bien compris le sujet madame Morançais, les citoyens ne demandent pas plus de cornemuses ou de binious, mais de pouvoir décider localement de leur avenir”. Selon l’adjoint nantais aux enjeux bretons, la position de Sarah El Hairy consiste “à donner un droit de véto aux partisans de l'anti-démocratie rangés derrière madame Morançais, c’est invraisemblable".
L’impasse politique semble donc inextricable. En attendant une hypothétique consultation, les deux invités s’engagent à faire vivre la culture bretonne. Mais Michel Ménard ne confirme pas s’être engagé sur un montant d’un million d’euros alloué à différentes associations pour organiser des projets culturels et linguistiques.
Concernant l’enseignement du breton, Florian Le Teuff dit “tout faire pour qu’il revienne à l’université de Nantes dès la rentrée prochaine. Ce n’est plus le cas depuis 2004, alors qu’on enseigne le breton à Harvard ou Cambridge. L’objectif est de pouvoir apprendre le breton à Nantes de la crèche à l’université en passant par le doublement des écoles publiques”.
La culture bretonne s’exprime donc, en dehors de la question du redécoupage administratif. Est-ce alors vraiment une priorité pour les citoyens ?
Pour Arnauld Leclerc, professeur de sciences politiques à l’université de Nantes, “ce n’est pas un sujet prioritaire pour l’immense majorité de l’opinion publique en Loire Atlantique, mais on constate que la mobilisation a changé de nature : une nouvelle génération de militants a fait passé la question d’une revendication culturelle à une revendication beaucoup plus politique”.
Pour lui, il y a surtout des postures dans ce débat. “Ce n’est pas une priorité politique pour tout le monde, notamment pour l’Etat qui laisse traîner les choses depuis longtemps. Mais la région des Pays de la Loire devra bien finir par se positionner, même si c’est pour dire “non” très clairement”.
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Le débat sur le rattachement de la Loire Atlantique en Bretagne est donc probablement loin d’être terminé.