Ce n'est pas un hasard si les Guérando-rennais René, Nico et Fab ont choisi pour nom de groupe une anagramme de loup. Comme l'animal, Lupo aime l'esprit de meute, le mystère et les nuits, particulièrement les Nuits d'ailleurs, titre de leur premier single et de leur prochain album. Rencontre...
Après 17 ans passés au sein du groupe La Belle Bleue, René Bergier a entamé une nouvelle aventure musicale sous le nom de Lupo en compagnie de deux autres musiciens, Nicolas Hild à la batterie et Fabien Tabuteau aux synthés et machines.
Un premier single vient de sortir accompagné de son clip, l'album est attendu pour le 3 mars prochain. Un concert sera donné pour l'occasion au Ferrailleur à Nantes. En attendant, René nous parle de ce changement d'univers, de ses influences, de son écriture métaphorique, de l'importance de la langue française, d'ailleurs... Interview.
Lupo, c'est qui, c'est quoi ? Le projet d'un chanteur compositeur ? Un groupe ?
René Bergier. La question s'est posée au départ car j'avais envie de recentrer ma musique sur un axe plus personnel et intime mais la créativité, l'investissement et l'enthousiasme générés avec Nico à la batterie et Fab aux synthés et à la prod ont vite scellé la réponse, Lupo est un groupe.
D'où vient ce nom ?
René Bergier. C'est l'anagramme de loup, un animal qui représente bien l'énergie du groupe. Fragile, féroce, sauvage, mystérieux mais aussi habité par l'esprit de meute, de groupe justement.
Ces nouveaux paysages électroniques, ces climats plus sombres me permettent d'assumer une forme de mélancolie tout en gardant une assise très rythmique et profonde
René Bergier
De l'électro, du rock, du rap et de la chanson française. Lupo offre un sacré cocktail. On est loin de La Belle Bleue, votre groupe précédent ?
René Bergier. C'était justement mon souhait, faire évoluer ma musique, emmener mes chansons ailleurs, dans une autre esthétique musicale. Ces nouveaux paysages électroniques, ces climats plus sombres me permettent d'assumer une forme de mélancolie tout en gardant une assise très rythmique et profonde.
Un cocktail et au final un imaginaire assez sombre comme vous dites, très urbain, à l'image de votre clip sur le single Nuits d'ailleurs…
René Bergier. Je ne sais pas si c’est urbain, on est plutôt des ruraux d’ailleurs, heureux dans les grands espaces. Mais oui, comme dans le clip, on aime le contraste, partagés entre les cloisons des villes et les horizons infinis. On exprime justement dans Lupo tous ces paradoxes.
Pouvez-vous nous expliquer de quoi, de qui, de quelles envies cet imaginaire s'est nourri ?
René Bergier. Je crois que tout se construit très jeune. J'ai eu une enfance heureuse mais parsemée d'événements traumatiques alors j'ai vite trouvé dans l'écriture et le chant un refuge, un moyen d'expression, une façon de s'évader, de libérer des joies, des peurs, des questions, des souffrances. La musique a ce pouvoir de bonifier nos émotions, de les traduire dans une langue universelle.
Je suis pudique et la poésie me permet de parler de tout, de me mettre à nu, d’être dans une extrême sincérité
René Bergier
Vous portez une attention très particulière aux paroles, vous êtes même un amoureux de la langue française. De ce qui pourrait être une contrainte pour d'autres est une exigence pour vous. De là naît la poésie selon vous ? Votre poésie ?
René Bergier. Pour moi c’est l’essence de ma musique, jouer avec les mots, construire des vers, des strophes pour peindre une toile émotionnelle. Inventer des histoires, faire passer des messages, parfois les dissimuler, mentir, avouer. Ce style d’écriture très imagé, métaphorique, me protège aussi. Je suis pudique et la poésie me permet de parler de tout, de me mettre à nu, d’être dans une extrême sincérité.
Que raconte le single Nuits d'ailleurs qui vient de sortir, que racontent vos textes d'une manière générale ?
René Bergier. Nuits d’ailleurs, c’est l'histoire de retrouvailles, émotionnelles et charnelles. Dans nos quotidiens on est souvent absorbé par notre travail, par l’actualité, et une routine pesante peut s'installer sournoisement. Dans nos Nuits d’ailleurs, on s’évade, on s’extrait de tout ça, on est juste ensemble, juste bien, hors du temps. C’est une chanson d’amour en fait ?
Dans l’album à venir, je parle de rencontre, de fuite, d’évasion. Aussi, du courage des mères qui nous élèvent, du deuil et du lien invisible qui nous relie à nos fantômes. Je parle de l’enfance, d’un pays imaginaire, d’une cavale dans Milan, du confort qui nous détourne, d’une escale dans nos souvenirs.
Après le single, un album, il est prévu pour le 3 mars. C'est le premier. Comment vivez-vous ces instants ? Comment se prépare-t-on à ouvrir son âme au public ?
René Bergier. Très impatient de libérer l’album après de longs mois passés à écrire, arranger, enregistrer ces chansons. Je ne suis pas d’une nature très sereine donc il y a toujours de l’angoisse avant ce type d’échéance. C’est le revers de la médaille de nos métiers “passions”, on y met tout notre cœur, notre temps, nos tripes, mais au final les clefs de la réussite et du succès d’un album sont dans les mains du public. En tout cas, on est fier de ce qu’on a produit et on est très bien accompagné donc, let's go !
C’est le revers de la médaille de nos métiers “passions”, on y met tout notre cœur, notre temps, nos tripes, mais au final les clefs de la réussite et du succès d’un album sont dans les mains du public
René Bergier
Vous allez fêter la sortie de l'album au Ferrailleur le 3 mars par un "concert très spécial" dites-vous sur votre compte Facebook. En quoi sera-t-il spécial ?
René Bergier. On adore cette salle et l’équipe qui la fait vivre. Ils nous ont accompagnés pour travailler notre set et aidés à donner vie à nos chansons sur scène. Le 3 mars, c’est spécial car c’est le jour J, la sortie de l’album, toutes les chansons dévoilées et puis un concert au Ferrailleur, c’est toujours spécial pour nous.
Vous êtes sélectionné pour le Prix Georges Moustaki. C'est un nom qui vous causait auparavant ? Quels sont les artistes qui vous ont donné envie de faire de la musique ?
René Bergier. George Moustaki, magnifique bien sûr, même si je connais surtout ses tubes, “ma liberté, le métèque, ma solitude”. J’ai plus écouté Brassens de cette génération.
J’ai été très exclusif dans mes écoutes. À 7/8 ans, j’ai découvert Michael Jackson et tout l'univers autour (danse, clip, live). Une claque évidemment. Puis, au collège, Bob Marley m’a touché en plein cœur, c’est pour moi la musique parfaite dont je ne me lasserai jamais.
Mais c’est la sortie de l’école du micro d’argent d’IAM qui m’a fait bosser le chant, un album écouté et scandé en boucle.
Au lycée un pote m’a prêté une cassette d’un live de Noir Désir, coup de foudre pour l’énergie rock, la poésie, la voix… je commençais la guitare, j’ai donc appris toutes leurs chansons et commencé à écrire les miennes. Dans ma playlist 1er choix, il y a aussi les Doors, Bashung, Nirvana, Gainsbourg, Mano Solo, Radiohead.
Merci René, merci Lupo