Le journaliste Loup Bureau, sous le coup d'une expulsion, devrait regagner Paris dimanche matin au grand soulagement de sa famille et de ses amis, après plus de cinquante jours d'incarcération dans une prison turque sous l'accusation d'appartenance à "une organisation terroriste armée".
Le père du journaliste, Loïc Bureau, qui a quitté la banlieue de Nantes en direction de Paris, devait être reçu samedi après-midi au ministère de la Culture. "C'est pour régler l'agenda de la journée", a-t-il expliqué à l'AFP. "Tout le comité de soutien, sa petite amie, viennent à Paris" mais "tant qu'il n'est pas sur le sol français, je garderai une petite appréhension", a-t-il ajouté.
La libération de Loup Bureau, emprisonné en Turquie à Sirnak depuis 51 jours, avait été annoncée vendredi par son comité de soutien et son avocat, selon lequel il a passé la nuit dans un poste de police.
Cette libération, intervenue dans la foulée d'une visite de Jean-Yves Le Drian à Ankara, constitue "un grand soulagement", avait salué le président Emmanuel Macron.
Interrogé sur une éventuelle contrepartie à cette libération, l'avocat a déclaré: "Je n'ai aucune raison de le penser". "Simplement faire comprendre aux autorités turques tout le tort qu'elle se faisaient en persistant à emprisonner un journaliste français (...) a pu être suffisant", a-t-il dit.
Le journaliste avait été interpellé le 26 juillet à la frontière entre l'Irak et la Turquie, après que des photos le montrant en compagnie de combattants kurdes syriens des YPG (un mouvement considéré comme une organisation "terroriste" par Ankara) eurent été trouvées en sa possession.
Ces images datent, selon sa défense, d'un reportage réalisé en 2013 sur les conditions de vie des populations syriennes.
"Plus de 100 journalistes en détention"
Loup Bureau est soupçonné par la justice turque d'être un "membre" des YPG, selon son acte d'accusation relayé par son avocat français.La justice turque avait rejeté à deux reprises une demande de libération conditionnelle du journaliste âgé de 27 ans.
"Tout a basculé au milieu de la semaine dernière avec l'acte d'accusation et la fixation d'une audience", a expliqué Martin Pradel. Suite à la rédaction de cet acte d'accusation, le dossier de Loup Bureau a été transféré à un juge.
"Le juge a immédiatement voulu recevoir Loup et a immédiatement statué sur la question de sa libération alors que par ailleurs l'enquête se poursuit", a ajouté l'avocat. "Cette expulsion, même si le combat n'est pas terminé, permettra à Loup de retrouver sa famille", a souligné l'avocat, évoquant des conditions de détention "extrêmement dures".
"Il a toujours au dessus de lui un risque de condamnation, une condamnation extrêmement grave puisque cela voudrait dire que Loup est un terroriste", a-t-il rappelé.
"La libération de Loup Bureau est une bonne nouvelle en soit, c'est la fin d'un déni de justice qui a été trop long mais la liberté de la presse en Turquie demeure absolument déplorable", a pour sa part estimé Christophe Deloire, le secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF). "Malheureusement je ne crois qu'on puisse l'interpréter comme un signe positif plus global pour la liberté de la presse en Turquie puisqu'il y a toujours plus de 100 journalistes en détention parce qu'ils font leur métier", a-t-il conclu.