C'est un sacré numéro qui, longtemps, n'hésitait pas à demander celui des filles: binaire, jovial et dragueur, Pierre-Ambroise Bosse, sacré champion du monde mardi à Londres, affiche dans la vie une image à l'opposé de l'ascétisme du 800 m, sa discipline.
Tout commence par un accent. Pas celui du bassin d'Arcachon, où il a grandi et où il est toujours licencié au club de Gujan-Mestras. Non, Bosse ne l'a jamais eu cet accent : il est né à Nantes, en mai 1992.
L'accent, c'est plutôt celui qu'il a décidé d'ôter à son nom: Bosse, plutôt que Bossé, comme ses parents l'avaient inscrit à l'état-civil.
"Mon nom, c'est Bosse", avait-il proclamé en 2012 à Helsinki, lors de championnats d'Europe qui l'avait révélé (médaille de bronze). A la grande colère de son père, qui avait voulu rétablir la vérité.
Peine perdue, "PAB" a préféré mettre l'accent sur la vie.
"Je ne me prends pas trop la tête avec l'athlé. Je joue de la guitare, je gratte deux trois accords de Brassens et je regarde des mangas. Je fais l'amour à ma femme et je bois une bière avec mes potes. C'est zéro ou un. Binaire", s'auto-résume le demi-fondeur de 25 ans.
Binaire, c'est un peu court, jeune homme. Bosse est bien plus riche que cela.
L'athlète au regard bleu perçant n'est pas qu'un clown. Et il a ressenti le besoin de le faire savoir, un jour à la presse avant les JO de l'an dernier, alors que son image de fêtard commençait à le saouler.
"Vous aimez bien ma fraîcheur dans mes déclarations, alors racontez aussi que je travaille", avait-il calmement demandé.
Diagnostiqué hyperactif dans sa jeunesse, le garçon a toujours eu du mal à trouver le sommeil, à se reposer, à se poser.
"Je ne courrais pas sans passion"
Alors forcément, ça trotte dans la tête, en permanence. L'athlétisme ne peut être qu'un temps de passage dans sa vie.
Et que peut bien faire la nuit un garçon en pleine force de l'âge ? Il prépare l'avenir, bien sûr.
En février dernier, avec un pote, il a lancé l'application "Deserve Her", un site de rencontres, "une start-up lancée en se servant de notre réseau sportif. Mon objectif est d'être business man", confie Bosse.
Avec sa mèche savamment travaillée, Bosse aime soigner son style.
"Ca ne m'intéresse pas de faire des études, je n'ai pas le temps en même temps que le sport. Alors on fait d'une idée un projet: c'est un site de rencontres, on veut concurrencer Tinder. Ca correspond à mon image et ça ne choquera pas les gens. C'est très sérieux", racontait le Français avant le lancement de l'application.
Bosse n'avait pas hésité en 2013, à son arrivée à Moscou pour les Mondiaux, à tweeter un message de salutations à destination de Maria Sharapova.
Attention, le jeune homme a depuis trouvé l'amour.
"J'ai beaucoup d'idées et j'espère que j'aurais assez de temps et de fonds pour les concrétiser", réfléchit-il. "L'athlé sert à ça. L'athlé, c'est mon boulot, mais je ne courrais pas sans passion, surtout pas du 800 m", souligne-t-il.
"Je vois ma carrière comme une étape dans ma vie et si je dois m'arrêter, je m'arrêterai, c'est comme ça. J'aurais eu un beau moment de vie à voyager partout, à rencontrer des gens, franchement j'ai fait de belles rencontres et j'en suis super fier". Pour le moment, Bosse a encore envie de bosser en sport: à l'athlétisme français d'en profiter.