CHU de Nantes : "des pratiques délétères" dénoncées par le CHSCT, malaise au sein du service mortuaire

Le CHSCT, le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, du CHU de Nantes souhaite la nomination d'un expert pour le service mortuaire, une demande d’expertise non validée par la direction du CHU. Un syndicat pointe des "problèmes éthiques pour le personnel soignant."

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Audience ce jeudi matin au tribunal de Nantes. Le CHSCT du CHU de Nantes demande que soit nommé un expert pour le service mortuaire, un souhait que ne valide pas la direction du CHU.

Au fil du temps, les conditions de travail se sont dégradées malgré les nombreuses alertes des agents et du syndicat FO. La Direction du CHU n’a pas pris la mesure des conséquences des risques psychosociaux sur les hospitaliers et a contesté l'expertise demandée par le CHSCT, c'est ce que reproche le syndicat FO du CHU à sa direction.

"Le CHU de Nantes estime que la situation ne justifie pas l’organisation d’une expertise pour "risque psychosocial"au regard de l’analyse approfondie menée en interne et avec des experts extérieurs", écrit dans un communiqué ce jeudi après-midi l'établissement de santé.

"Je ne comprends pas la décision de la direction qui est de contester cette expertise alors qu'il y a vraiment un malaise", a déploré, pour sa part, maître Samuel Gaillard, l'avocat du CHSCT.

"Depuis plusieurs années, l’activité du service mortuaire augmente et il y a un problème de personnel, expliquait ce jeudi matin Stéphane Naulleau, secrétaire adjoint FO au CHU Nantes, il y a également un problème d’absentéisme et le personnel n’est pas remplacé depuis plusieurs mois. De plus, s’ajoute à cela des pratiques professionnelles médicales qui perturbent le personnel soignant qui exerce au sein de ce service. Cela pose des problèmes éthiques pour le personnel soignant."

"L'équipe, hors médecins, est censée comporter 8 agents hospitaliers, nous a expliqué l'avocat du CHSCT, hormis le cadre, qui, en raison de ses fonctions ne pouvait témoigner (...) tous les agents hospitaliers ont témoigné" notamment "d'un problème d'éthique".
 

Un morceau de crâne manquant

"On se trouve devant des pratiques délétères", a expliqué à l'issue de l'audience publique de ce jeudi matin devant le tribunal, Stéphane Naulleau, il y a eu notamment un crâne qui a été prélevé sur un mort, un patient, ils nous disent qu'il y a eu une autorisation de prélèvement de crâne, nous on sait qu'il n'y en a pas".

"De ce que l'on a vu il n'y a pas eu d'expertise en bonne et dûe forme,
a expliqué, de son côté, l'avocat, de ce qui m'a été indiqué, ce n'est pas un simple morceau d'os du crâne, c'est quasiment tout le crâne sauf la face, les orbites et le devant, le nez".

Ce morceau de crâne serait manquant et le défunt aurait été enterré comme ça

Maître Samuel Gaillard, avocat du CHSCT

"La solution que propose l'hôpital, de ce que j'ai compris, c'est qu'il va être procédé à la destruction de ce morceau de crâne pour ne pas alerter la famille, ce qui est quand même problématique", affirme l'avocat du CHSCT.

"Il y a des prélèvements de symphyses pubiennes (l'articulation antérieure du bassin NDLR) qui se font hors cadre médico légal, a également affirmé Stéphane Naulleau, le syndicaliste, expliquant que ces symphyses prélevées sont dans le bureau du médecin chef à la fac de médecine".

Afin de procéder à des prélèvements sur un mort, "il y a toute une législation, c'est vraiment hyper encadré, et là il y a des pratiques qui sont douteuses", a expliqué le syndicaliste.

Et Stéphane Naulleau de poursuivre, "la direction ne veut pas l’entendre, le CHSCT avait demandé une expertise dans le cadre de ses fonctions et la direction a contesté cette expertise du CHSCT. On se trouve aujourd’hui devant le tribunal judiciaire pour faire valoir cette expertise. On est devant le magistrat pour faire valoir ce droit."
 
Afin de bénéficier d’une analyse totalement indépendante, le CHU a également sollicité une expertise de la Société Française de Médecine Légale. Elle avait pour mission d’évaluer la conformité des pratiques médicales et le fonctionnement du service, ainsi que de faire des préconisations quant à l’amélioration de son fonctionnement.


Une seule salle aux normes

Ce jeudi matin, devant le tribunal, les revendications ont également porté sur plus de moyens. Toujours selon Stéphane Naulleau de FO, "il y a de plus en plus d’expertises judiciaires médicaux légales, nous n’avons qu’une seule salle aux normes et mes collègues font des expertises médicales dans une autre salle qui n’est pas du tout aux normes et en conformité pour évacuer les déchets organiques. Nous avons aussi le problème du formol, ce n’est pas une salle qui est ventilée comme elle devrait l’être"

"On demande plus de moyens, notamment une deuxième salle d’expertise aux normes, plus de personnel avec des équipes administratives et des aides-soignants plus nombreux" a précisé le syndicaliste.

Toujours selon Stéphane Naulleau de FO, "les membres du CHSCT à l’unanimité ont voté oui, pour cette expertise. Toute l’équipe du service mortuaire accompagné des trois organisations syndicales FO, CGT et CFDT demandons que l’expertise ait lieu. Les premières revendications dates de 2019, la direction refuse qu’elle ait lieu."

"Ce sujet a été pris en compte par le CHU de Nantes dès la fin de l’année 2019. Ainsi, différentes mesures ont été mises en œuvre pour comprendre la situation (accompagnements internes, entretiens professionnels, réunions de service, rencontres en présence des partenaires sociaux…)",
a poursuivi la direction de l'hôpital dans son communiqué.

"Afin de bénéficier d’une analyse totalement indépendante, le CHU a également sollicité une expertise de la Société Française de Médecine Légale. Elle avait pour mission d’évaluer la conformité des pratiques médicales et le fonctionnement du service, ainsi que de faire des préconisations quant à l’amélioration de son fonctionnement", a précisé l'établissement de santé.

"Dans ce cadre, la Société Française de Médecine Légale a confirmé la conformité des pratiques médicales du service. Elle a cependant soulevé un défaut de communication entre les professionnels. Des actions ont été mises en œuvre sur ce point et d’autres sont en cours de définition", a poursuivi le CHU.

Dans cette affaire entre le CHU de Nantes et son CHSCT, le tribunal a choisi de mettre son jugement en délibéré au 3 septembre prochain.
 
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