300 experts se sont rassemblés à Nantes pour une discussion sur la prostitution des mineurs. L'objectif était de mieux comprendre ce phénomène afin d'améliorer la prise en charge. En Loire-Atlantique, une hotline est disponible pour les jeunes victimes de la prostitution. [Article initialement proposé en octobre 2022]
“14,3 ans. C’est la moyenne d’âge des jeunes en situation de prostitution en Loire-Atlantique, et en grande majorité des jeunes filles” explique Léa Messina, chargée de projet du dispositif “Mineur.es en situation de prostitution” piloté par l’ATDEC (association territoriale pour le développement de l’emploi et des compétences de Nantes Métropole).
C’est elle qui répond à la ligne d’écoute - 06 03 68 39 50 - mise en place il y a un peu plus d’un an pour les professionnels, les parents ou les mineur.es concerné(e)s directement. “Ce sont surtout les professionnels qui nous appellent, indique Léa, et de plus en plus les proches”. Entre dix et trente appels par semaine. Quant aux mineur.es,
elles/ils ne se sentent pas victimes la plupart du temps parce qu’elles/ils sont sous emprise et dans un continuum de violence qui, à un moment, bascule dans le système prostitutionnel
Loin de clichés de la prostitution
Depuis janvier, plus de soixante-dix situations de prostitution de mineur.es ont été signalées en Loire-Atlantique et une trentaine de mineur.es sont actuellement accompagné(e)s par l’association.
Cette plateforme d’écoute encadrée par un dispositif pluridisciplinaire, qui regroupe neuf associations, est unique en France. Car il s’agit bien d’un phénomène difficile à repérer.
En France, plus de 10 000 mineur.es se trouveraient en situation de prostitution.
Un phénomène “largement sous-estimé, selon Léa. Quand on a commencé à intervenir, il y a deux ans, on nous disait qu’il n’y avait pas de prostitution ou quasiment en Loire-Atlantique. Mais, la prostitution des mineur.es est insidieuse, il faut bien regarder pour la voir, souligne-t-elle.
Car le plus souvent, elle ne passe pas par la rue, mais par les réseaux sociaux. Elle est très organisée, cachée, et se déroule dans les hôtels ou dans les appartements. On est loin de la prostitution de rue.
De plus, “toutes les classes sociales sont touchées", insiste Léa, qui précise que ce qui se joue, “c’est ce continuum de violence depuis le plus jeune âge que l’on ne retrouve pas uniquement chez les classes sociales les plus défavorisées”.
Repérer les signaux faibles
Il existe des signaux d’alerte, mais ils ne sont pas toujours évidents à détecter.
Ce qu’on repère systématiquement, c’est un phénomène de fugue très important, mais une fugue de quelques heures en journée.
"Puis on observe un glissement vers des fugues plus longues et parfois le soir, la nuit et le week-end. Il peut aussi y avoir un absentéisme scolaire, une baisse des résultats, un changement de comportement”.
À chaque signalement, Léa Messina se tourne vers la CRIP (cellule de recueil des informations préoccupantes) afin de savoir si d'autres alertes ont déjà été enregistrées au sujet du ou de la mineur.e concerné(e).
Dans les 48 heures, une réunion est organisée avec les représentants des neuf associations partenaires, spécialisées dans le soutien psychologique, l'aide juridique et les addictions, afin d'organiser le suivi. “Si on arrive à intervenir avant la bascule des conduites prostitutionnelles, ce sera une véritable réussite. Cela nécessite de bien se former, s’informer, et de sensibiliser les proches et les enfants, dès le plus jeune âge, sur les questions du consentement, du plaisir et de la sexualité”.
Plateforme d’écoute : 06 03 68 39 50
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