Vous l'appelez comme vous voulez, vous payez ce que vous voulez, le nouvel album du trio nantais Gaume est sorti

Appelez-le comme vous voulez ! Voilà comment s'appelle le dernier album de Gaume. En anglais, ça donne Call It What You Whant, onze titres qui sonnent rock, pop et folk. Rencontre avec le boss Roman Gaume à l'occasion de l'un des rares concerts que le groupe a pu donner en ces temps de covid-19...

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Celle-là, on ne me l'avait jamais faite. À l'heure du rendez-vous que nous nous étions fixés au Ferrailleur, la mythique salle de concerts de Nantes où il devait se produire le soir même, Roman Gaume me laisse un message : "Éric, c'est Roman, excuse moi, j'ai un souci, je ne peux pas rentrer dans le parking de ma résidence, je ne peux pas prendre ma voiture, ils ont dû changer la serrure...".

Bon, finalement, un résident équipé d'un bip le sort de cette petite mésaventure et nous voilà réunis pour l'interview avec quelques minutes de retard, mais l'éternité devant nous ou presque pour discuter. À commencer de la pluie et du beau temps, de la pluie surtout en ce 18 septembre. Elle est annoncée et pourrait bien compromettre le concert du soir qui doit se jouer impérativement en extérieur, covid-19 oblige. "Je n'annule pas pour du crachin", prévient Roman Gaume. Les nuages sont prévenus, ils n'ont plus qu'à bien se tenir...

Bonjour Roman, ce n'est pas trop dur à vivre toute cette période étrange, cette pandémie qui n'en finit pas, ces annulations de concerts... ? 

Roman Gaume. Ça dépend des jours. On n'est pas des grandes lignes droites d'émotion nous les gens, Autant quand tout s'est s'arrêté, je l'ai plutôt bien vécu, autant là, que ça ne reparte pas, je le vis difficilement. On a un métier de projection, on passe notre temps à se projeter a moyen et long terme que ce soit pour les concerts ou les albums. Et là, se projeter est impossible. Je n'ai pas envie de faire pleurer dans les chaumières, on n'a pas été lâché au niveau de l'intermittence, dans d'autres pays, c'est bien pire, et il y a des corps de métier qui sont encore plus impactés que nous, je pense aux commerçants, aux auto-entrepreneurs.... Mais j'ai peur qu'on perde ce qui nous lie socialement, tout ce qui est fédérateur, le sport, la musique... Il y a beaucoup d'occasions de se séparer les uns les autres et peu de se rassembler. On doit défendre ce qui nous unis. Les lieux de concerts sont en train de souffrir très durement et j'ai peur que lorsqu'on sortira de tout ça, il n'en existe plus que la moitié. Ça, c'est vraiment source d'inquiétude.

Si je sais encore compter, c'est ton septième album, troisième sous pavillon Gaume après Square one et Woodland recordings. C'est bien ça ?

Roman. Oui c'est ça, il y a eu aussi un EP.

On rentre dans une espèce de routine quand on en arrive là ?

Roman. Non, c'est difficile de rentrer dans une routine quand tu fais un disque, ce nest pas comme si c'était métro boulot dodo, c'est à chaque fois différent, avec des enregistrements différents, des approches différentes, des morceaux différents, des gens différents, des endroits différents. On cherche toujours à évoluer, à faire sonner autrement.

Ce nouvel album sonne rock, très rock, mais il est aussi très folk (Blowing on Dust, Smithereens), très pop (Timeless Anger) avec pas mal d'arrangements, d'instruments additionnels, des violons et même de la harpe...

Roman. Oui, bien joué, c'est Cécile Gravot du groupe After the Bees à la harpe...

Et tout ce petit mélange fait Gaume ?

Roman. J'ai toujours aimé la pop orchestrale, c'est vraiment mon style, je me découvre au fil des albums et je découvre ce que j'aime faire. Effectivement, j'aime bien quand c'est orchestré, arrangé, quand ça brille. Il faut que ça serve la mélodie, que ça reste en tête, j'aime que ce soit riche au niveau du son, de la production, et donc oui les cordes c'est important. J'ai eu l'opportunité avec Sébastien Christmann de mettre un peu de cordes sur mes disques, quant à Cécile, c'est une copine, et la harpe c'est beau. En plus, avoir des invités sur un album, ça donne un prisme différent. En richessse, en panel sonore. Je n'ai pas envie que ce soit basse batterie guitare tout le long.
En quoi cet album est-il différent ? Comment tu le vois toi ?
 
Roman. C'est difficile pour moi de répondre à cette question, de toute manière, ça reste de la pop rock folk, c'est ce que j'aime faire, ce que j'aime écouter, je ne vais pas rechercher une rupture par rapport à mes albums précédents, je vais plutôt chercher à avoir une évolution dans le son, dans la production, dans la réalisation...

L'apport de Nicolas Bonnière dit Nikko (ex-guitariste de Dolly, actuel guitariste de Eiffel) à la réalisation a été essentielle ?

Roman. Je le voyais sur scène quand j'avais 13 ou 14 ans avec Dolly. C'est tout ce petit monde qui m'a donné envie d'en faire partie. Nikko, je ne le connaissais pas plus que ça, je l'ai croisé dans les locaux de Trempolino il y a deux ans et on a eu envie de faire deux morceaux ensemble, puis trois, quatre... et finalement on a fait un disque. Il a vraiment amené une plus-value dans le son des guitares, dans l'approche, il a vraiment une belle vision...

L'album s'appelle Call it What You Want. mais aussi Love what You want, And pay what You want... C'est original... Le choix appartient à celui qui l'achète...

Roman. En fait, lors de ma première date à New York l'année dernière, dans un club où je jouais, il y avait un tag dans la loge : Call it what you want, appelle le comme tu veux. J'ai trouvé ça drôle, je me suis dit que j'appellerai mon prochain album comme ça. Et ça sonne plutôt bien. On a décliné le tag en Love What You Want, And Pay What You Want. Depuis aujourd'hui, 18 septembre, il est en prix libre sur le shop de Eizer Records et sur le site du groupe.

Il n'existe pas en version physique ?

Roman. Si, il existe en édition physique mais avec un prix fixe parce que, bien évidemment, il est distribué en magasins et là tu ne peux pas donner ce que tu veux. Douze euros si tu veux l'objet, prix libre si tu le télécharges.
Et en version vinyle ? 

Roman. Pour le moment non, les vinyles coûtent chers et se vendent surtout pendant les concerts. Et il n'y a pas de concerts...

Cet album compte onze titres. Portent-ils la marque de ce que nous venons de vivre et vivons encore aujourd'hui ?

Roman. Non, il a été bouclé avant tout ça,. Par contre je n'ai pas fini ma route musicale même si je me pose des questions. J'ai encore envie de dire des choses, d'essayer des choses, ce que je prépare pour 2021 sera certainement plus marqué par ce qu'on vient de vivre et ce qu'on vit aujourd'hui encore. 

J'adore le titre Timeless Anger. Peux-tu nous dire ce qu'il raconte. Et globalement ce que raconte l'album ? Tu y causes de toi un peu ?

Roman. Timeless Anger parle d'une colère...

Ça t'arrive de piquer des colères ?

Roman. Oui ça m'arrive, ce sont des colères que je vis souvent très seul, je ne les partage pas, je suis très pudique par rapport à ça. Timeless Anger parle de ça. Je compare ces colères à un volcan en éruption qui ne prévient pas et dévaste tout sur son passage. Je pensais à Pompéi, une terre de cendres. Mais je ne parle pas que de moi, l'album n'est pas uniquement instrospectif, je peux parler des autres aussi. D'une manière générale, sur l'album, il y a des histoires complètement fictives comme dans Partner in Crime, le parcours d'un jeune embarqué par son meilleur ami dans des trucs pas possibles. J'essaie aussi de parler de ma vision du monde en essayant de trouver de belles images.
Qu'est ce qui te manque ou t'a manqué le plus ces temps-ci ?

Roman. Si on partle de mon métier, c'est d'avoir une tournée. J'aimerais avoir 15 dates demain et partir, ça me ferait du bien. Ça me manque de jouer et plus généralement ça me manque de voir le visage des gens, de voir des sourires. Le monde d'avant était quand même pas si mal. J'ai peur qu'on ne retrouve pas tout ce qu'on avait...

Ce soir, tu joues le dernier album en live sur la terrasse du Ferrailleur dans le cadre des concerts sauvages. Ça fait du bien de retrouver son public ?

Roman. J'ai déjà fait un concert en solo acoustique cet été mais c'est le premier en groupe. C'est la première fois qu'on présente les morceaux. Oui ça va faire du bien de faire notre métier. Et de voir les copains... J'ai hâte.

Ce sera certainement l'une des rares occasions pour toi en cette fin d'année. Était-ce bien censé de sortir l'album maintenant ?

Roman. Oui, c'est le seul concert, tous les autres ont été annulés. Était-ce bien censé de le sortir maintenant ? Certainement que non mais j'ai beaucoup réfléchi. Tu sais, entre le moment où tu composes un morceau et le moment où tu le sors en disque, c'est long. Je n'avais pas envie d'attendre que ce soit covid-compatible et de me retrouver en décalage total avec mon propos artistique, défendre des morceaux sur scène que j'ai écrit il y a deux ou trois ans. C'était important pour moi de le sortir malgré tout, même si c'est un peu gâché quelque part. Il n'y a rien de pire que de faire des albums, des pochettes et de ne pas les sortir.. Ça m'ai déjà arrivé, je ne l'ai pas bien vécu. Je ne fais pas de la musique que pour moi, il faut que ça vive, que les gens puissent l'écouter. Oui, j'avais besoin que ça sorte, de faire un peu de promo avec vous et de faire un concert de sortie. Et puis voilà, c'est tout, c'est la vie. Après, je suis déjà sur d'autres projets, avec Nikko, avec d'autres...

C'était l'objet de ma dernière question, de savoir ce que tu avais comme projet. Apparemment un album ?

Roman. Oui je suis reparti sur un album mais je ne peux pas en dire beaucoup plus aujourd'hui. J'ai envie de me renouveler artistiquement, d'essayer autre chose, on commence à enregistrer...

Merci Roman. Propos recueillis par Éric Guillaud le 18 septembre 2020
Plus d'infos sur Gaume ici

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