L'ACCDM continue de chercher des solutions pour endiguer les déserts médicaux. Et demande des comptes au gouvernement. Qui fait la sourde oreille. Elle attend désormais une décision du Conseil d'Etat.
L’Association de Citoyens Contre les Déserts Médicaux (ACCDM) est une association présente dans cinq départements.
Elle a été créée en Mayenne en 2016 par Maxime Lebigot, infirmier à l’hôpital de Laval et actuel président. Son but : lutter contre les déserts médicaux.
L’association vient dernièrement, par la voix de son avocate Corinne Lepage, d’adresser un courrier au Premier ministre, Jean Castex, et au ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran.
En leur demandant de respecter que le droit aux soins soit applicable pour tous et partout. Réponse : pas de réponse.
Maxime Lebigot : "c’était en janvier 2021. Donc après deux mois, dans l’administration cela signifie un refus".
Ce qui évidemment déçoit ses dirigeants. L’objet du courrier était au nom des neuf millions de patients de "prendre les mesures immédiates et nécessaires afin de se soumettre à son obligation constitutionnelle d’égalité envers les citoyens".
Car, selon l’association, les chiffres de la désertification médicale ne cessent de s’aggraver. Et cela malgré, "le discours rassurant des Agences Régionales de la Santé sur l’efficacité à venir de l’augmentation du numerus clausus, de l’arrivée de médecins étrangers, du déploiement des infirmiers de pratique avancée, de la création de maisons de santé pluridisciplinaires..."
Des chiffres édifiants
Il est vrai que les chiffres sont édifiants : pour les médecins généralistes, les écarts montent de 248 médecins en moyenne au plan national pour 100 000 habitants à 114 en Mayenne et 122 dans La Nièvre ou 116 dans l’Yonne.
Pour le seul département de l’Eure, la densité est passée de 101,2 médecins en 2011 à 95 en 2018. En outre-mer la situation est encore plus grave.
Aujourd’hui, entre 9 % et 12 % de la population française vit dans un désert médical, soit entre 6 et 8 millions de personnes.
Pour le moment, toutes les parades et initiatives ont échouées.
Comme le cabinet de Corinne Lepage le rappelle : "aucune des lois Santé depuis 2009 n’a pris de mesures efficaces pour venir à bout de ce fléau. Pire, la loi du 13 août 2014 relative à l’assurance maladie, censée améliorer l’organisation des soins en prévoyant la mise en place d’un parcours coordonné autour d’un médecin traitant, pénalise encore plus ceux qui ne peuvent pas ou plus s’en remettre à un tel référent".
"Alors qu’en valeur absolue, les médecins n’ont jamais été aussi nombreux (ils sont 300 000, un chiffre jamais atteint au niveau national !), les inégalités sur le territoire n’ont de cesse de s’accroître, entre des zones largement sur-dotées et d’autres dramatiquement sous-dotées".
L’association espère donc la recevabilité de sa requête, et enjoint l’État à prendre les mesures nécessaires. A savoir une répartition de l’offre de soins sur le territoire, en faisant voter les lois qui le permettront.
Quant aux idées récentes comme la télémédecine, l’ACCDM n’y croit pas.
"Ce n’est pas une solution, ce n’est pas une médecine de qualité, elle ne diminue pas le temps médecin, et surtout elle introduit une rupture d’égalité dans les modalités de soin, en plus d’entretenir des discriminations territoriales".
D’autres problématiques satellites sont aussi à déplorer. Le manque cruel de spécialistes. Les services des urgences qui sont pratiquement débordés, et parfois pour des pathologies mineures du fait de l’impossibilité d’accéder à un médecin. Les sapeurs pompiers tout comme le SAMU sollicités sur des interventions secondaires.
"Tout cela évidemment exacerbé par la crise sanitaire que nous vivons"précise Maxime Lebigot.
Un président de l’ACCDM qui joue franc jeu, "nous sommes en période d’élections. Les départementales, les régionales et surtout la présidentielle. C’est le moment d’agir, nous voulons compter et nous voulons des résultats…"
Un problème déjà ancien
Et la situation ne date pas d’hier, lors du congrès des maires de France de novembre 2017, le maire de Saint-Claude, Jean-Louis Millet, avait pris la parole lors d’une table ronde pour défendre le service public en milieu rural.
"Quand je vois des villes comme la mienne où l’on démantèle la moitié des services de notre hôpital, ça fait frémir (…). En nous donnant comme justification : ‘maintenant, au lieu d’être soigné à 20 minutes, vous ferez deux heures d’ambulance mais vous serez accueilli par des praticiens beaucoup plus compétents’ (…).
Et bien moi, ça ne m’intéresse pas d’être accueilli par un praticien extrêmement compétent si je n’arrive pas vivant au bout du voyage."
Au final, la situation française apparaît plus dégradée que dans d’autres pays de l’OCDE puisque la France est en-dessous de la moyenne européenne et très en dessous de la situation dans les zones rurales de Suède ou de Finlande.