Lutter contre les dépôts sauvages et les poubelles à ciel ouvert. C'est une préoccupation de la secrétaire d'Etat à la transition écologique. Mais à Nantes, on n'a pas attendu les annonces. Une brigade à été créée spécifiquement pour traquer les mauvais élèves.
Boudiaf et Karam sont des agents très spéciaux. Membres de la brigade verte de Nantes, ils sont à l'affût du moindre sac poubelle abandonné à même le sol.
Ils jouent les fin limiers. Inspecter le contenu d'une poubelle, c'est un peu entrer dans l'intimité de son propriétaire. Il suffit de quelques secondes pour avoir accès à une mine d'informations.
Un travail de police
"C'est presque un travail de police" explique Karam. "On va chercher les indices là où ils sont."En plein centre-ville, pas besoin d'arpenter les rues pendant des heures. Logiquement, l'auteur de l'infraction habite tout prêt.
"Il y a deux systèmes" précise Boudiaf devant le digicode du présumé coupable. "Soit le courrier, soit le téléphone. Là aujourd'hui, il n'y a personne. On va leur envoyer un courrier leur réclamant une amende de 68 euros."
Depuis sa création, en début d'année, la brigade verte a dressé 78 procès-verbaux. 2/3 des contrevenants sont des particuliers, le tiers restant se compose de commerçants et d'entreprises du bâtiment. Mais les dépôts sauvages auraient déjà diminué de moitié.
Une vraie incivilité
"Si on laisse une secteur sans être présent " constate Eric Bouchet, responsable de la propreté urbaine sur le centre ville de Nantes, "le secteur va se dégrader naturellement et de plus en plus vite. Donc notre objectif, c'est d'être présent pour éviter cette accumulation et que personne n'ait l'idée à terme de déposer un sac au pied d'une colonne."Des dépôts qui enflent à mesure que l'on s'éloigne des centres-villes. Dans plusieurs rues discrètes de l'est de Nantes, certains ont leurs petites habitudes : une fois encore, les gravats ont été déposés dans la nuit. Loin des regards. C'est sale, immoral, mais cela évite de payer l'accès à une déchèterie dédiée aux professionnels.
"On est sur de la vraie incivilité" estime Thomas Quéro, adjoint au maire de Nantes chargé de l'espace public. "Il existe des systèmes de décharges pour les professionnels mais il faut payer. C'est vraiment un problème de coût mais il peut y avoir aussi du travail au noir qui se dissimule derrière ces déchets du bâtiment."
A Angers, les sentinelles de la Nature
Les membres de France Nature Environnement connaissent bien le problème de ces poubelles à ciel ouvert. La Féderation de protection de la nature, qui rassemble une centaine d'associations locales en Pays de la Loire, a mis en place un système d'alerte via un site internet et une application dédiée, Sentinelles de la nature."On a un outil de suivi des alertes qui permet d'aller voir sur le territoire" indique Xavier Métay, membre de France Nature Environnement Pays de la Loire.
"Si on découvre une dizaine d'alertes sur la même thématique, on peut se dire "tiens, c'est bizarre" et on alerte tout de suite l'Etat et les collectivités locales. Après, on repasse de l'information aux citoyens pour leur dire attention il existe une déchèterie à tel endroit, leur indiquer les horaires d'ouverture pour éviter de retrouver des déchets dans la nature".
Des actions en justice pour stopper les dégâts
Exemple à Cantenay-Epinard. A quelques minutes du centre-ville d'Angers, une barrière est renforcée avec un nouveau cadenas qui avait sauté ces dernières années. En poursuivant le chemin, on trouve le sol jonché de plaques de fibro-amiante, des pneus, des bidons plastiques remplis potentiellement de produits toxiques.A 300 mètres se trouve l'île Saint-Aubin, formée par la Sarthe et la Mayenne. Une zone classée Natura 2000.
"Ici, on est en zone inondable" poursuit Xavier Métay. "Cet hiver s'il y a une crue de la Mayenne ou des basses vallées angevines, tous ces déchets vont se retrouver sous l'eau. On n'ose pas imaginer les conséquences en terme sanitaire ou tout simplement de qualité de l'eau."
Le réseau Sentinelles de la nature en Pays de la Loire existe depuis le mois de février. Sur les 150 alertes reçus à France Nature Environnement, 44 ont fait l'objet d'une fiche de signalement, une dizaine de dossiers ont débouché sur une action en justice.
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