Coronavirus : trop de masques en tissu fabriqués, la faute aux masques jetables

On en a manqué, maintenant on en a trop, les ateliers de confection de la région arrêtent la fabrication de masques textiles, la faute aux importations massives de masques jetables depuis l'Asie ! 

On les retrouve partout. Dans les caniveaux, les espaces publics, bouchant les égouts ou les stations d'épuration avertit le Centre d'information sur l'eau, un regroupement de professionnels des réseaux de distribution, en appelant à privilégier les poubelles d'ordures ménagères.

Et déjà, on en retrouve dans les fleuves et à la mer selon les associations de protection de l'environnement, comme Mer propre en Méditerranée.

La France a importé deux milliards de ces masques jetables et continue de le faire. Durant le confinement, les Nantais ont pu observer les allées et venues, depuis Nankin dans l'est de la Chine, d'avions aux couleurs d'Air Caraïbes.

 

60 millions de masques disponibles

L'État a fait appel aux industriels du textile, qui se sont mis à fabriquer des masques en tissu conformes à la réglementation sanitaire en la matière. Ils en ont fabriqué des centaines de milliers qui leurs restent sur les bras désormais !

Ainsi en Pays de la Loire, 42 ateliers se sont mis à fabriquer des masques "alternatifs" à la demande d'Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances.

42 ateliers, ce sont 350 personnes qui ont trouvé là du travail pour palier la baisse de l'activité constatée dans l'industrie textile régionale. Difficultés d'approvisionnement en matières premières, conjuguée avec les fermetures des marchés aux USA et en Europe, l'activité tourne au ralenti.

"Deux millions de ces masques "alternatifs" ont été fabriqués et validés par la DGA, la Direction Générale de l'Armement, autorité habilitée à évaluer la respirabilité des masques" précise Laurent Vandenbor, délégué général de Mode Grand Ouest.

Confectionneurs, fabricants d'élastiques, etc, se sont organisés au plus fort de la crise sanitaire pour unir leurs efforts. Et ça a marché ! Il y a en ce moment 60 millions de masques textiles recyclables disponibles !

"On dit partout ; le gouvernement (!), mais ce sont les acteurs qui sont responsables de la situation ! Nous ne pouvons pas tout, tous seuls dans notre coin ! Ce sont les mairies, régions, départements, collectivités, entreprises qui doivent avoir un réflexe territorial !", poursuit Laurent Vandenbor.

Ainsi la Métropole de Nantes a-t-elle acheté ses premiers masques lavables au Portugal. "Il faudrait que l'impôt serve à revenir vers les entreprises des territoires, vers l'emploi régional. Pour un emploi direct dans un atelier, on trouve 3 emplois en amont dans la filière, et 3 emplois en aval. En continuant de commander des masques jetables en Asie, on prive les filières de travail. Dans l'urgence, c'était recevable, mais maintenant, c'est inacceptable."

 

Revenir au cercle vertueux d'une production pérenne

L'encouragement à la production et la distribution de masques réutilisables par les pouvoirs publics serait tout à fait justifiée.

Jusque dans les années 1970 personnes n'avait eu l'idée d'utiliser des masques jetables. Ce n'est qu'avec l'apparition de publicités dans les revues médicales de la société 3M aux États-Unis que, petit à petit les masques jetables dits "chirurgicaux" ont remplacé les masques lavables, tous stérilisables, et qui n'avaient pas à souffrir d'un manque de performance.

Ces masques chirurgicaux sont, avant tout, destinés à protéger les personnes opérées des projections de salive... des chirurgiens !

Et 3M, selon le biologiste et historien des sciences, Bruno Strasser (dans Une histoire du masque médical et l'essor de la culture du jetable), "à force de pleines pages de publicités très agressives, et sans autre argument que de les présenter comme supérieurs, et surtout sans études comparatives, fini par les imposer."

Le masque recyclable présente cependant un énorme défaut dans nos sociétés où les comptables et la logique de gestion des stocks sont rois, il faut employer des personnels de buanderie, qui enlèvent la pièce métallique nasale, puis les réassemblent une fois le lavage terminé !

Et l'historien de confirmer que la stratégie de stockage n'est pas la bonne solution en situation de pandémie. "Une réserve stratégique sera toujours insuffisante dans pareille situation. Il faut donc cesser de créer notre propre vulnérabilité en stockant des millions de masques jetables et périssables."

Les industriels du textile des Pays de la Loire partagent assurément ce point de vue, un masque en tissu lavable à 10 reprises coûte 1,60 euro hors taxes, un masque pour 50 lavages, moins de 4 euros hors taxes !

D'autant que ces masques textiles font déjà l'objet de solutions de recyclage avec une stérilisation à base de peroxyde d'hydrogène selon les expérimentations du Centre National de la recherche scientifique (CNRS) et du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), qui réunissent 48 équipes hospitalières, académiques et industrielles...

Dommage que l'argent public des collectivités territoriales ne serve pas à développer ce cercle vertueux. Et pérenne !

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