Le reggae inscrit au patrimoine immatériel de l'Unesco : une "excellente nouvelle" pour l'association nantaise Get Up !

Il y a quelques semaines, le reggae de Jamaïque rejoignait le carnaval de Granville et la calligraphie chinoise sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité. À Nantes, l'association Get Up! oeuvre pour sa promotion depuis des années. Rencontre avec son directeur Olivier Bruneau...

Si le reggae émerge à la fin des années 60, c'est au cours de la décennie suivante, grâce notamment à des artistes comme Bob Marley et les Gladiators, qu'il rencontre un succès d'envergure internationale. Plus qu'un style musical, le reggae est aujourd'hui une culture à part entière avec ses codes, sa mode vestimentaire, son style de vie... 

Le 29 novembre dernier, l'Unesco l'a inscrit sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité, une très belle reconnaissance pour cette musique dont "la contribution au discours international sur les questions d’injustice, de résistance, d’amour et d’humanité souligne sa nature à la fois cérébrale, socio-politique, sensuelle et spirituelle", déclare l'organisation.

Depuis 10 ans, l'association nantaise Get Up!, nom qui nous ramène immanquablement au Get Up Stand Up de Bob Marley, oeuvre pour que le reggae soit reconnu et accessible au plus grand nombre à travers différentes actions, notamment le Dub Camp Festival, premier festival européen entièrement dédié au mouvement sound-system en extérieur.

Directeur et programmateur du festival, olivier Bruneau évoque avec nous le reggae, son inscription au patrimoine culturel, le festival dont la 6e édition se tiendra cet été, les nouvelles tendances, les groupes émergents...

Depuis quelques semaines, le reggae est inscrit sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité. En quoi cette reconnaissance est importante selon vous ? Qu'est-ce que ça peut lui apporter, nous apporter ?
   Olivier Bruneau. C'est une excellente nouvelle ! Le reggae n'a jamais eu la reconnaissance qu'il mérite et a toujours été un peu à la marge, catalogué.
Cela lui apporte un peu plus de visibilité. Il y a une certaine reconnaissance pour la richesse de la culture et de la musique jamaïcaine qui véhicule des valeurs fortes d'humanité, d'amour, d'égalité...

Du mento, en passant par le ska, le rocksteady et le sound system, le reggae a toujours su trouver sa place et se réinventer !

N'est-ce pas une manière de le ranger un peu vite dans une belle vitrine dorée de musée ?
   Olivier Bruneau. Non je ne pense pas ! C'est une musique en perpétuelle évolution, transformation, nous le voyons depuis les années 60 ! Du mento, en passant par le ska, le rocksteady et le sound system, le reggae a toujours su trouver sa place et se réinventer!

Après, si cette musique rentre dans les musées, ce n'est pas plus mal ! Il y a d’ailleurs eu une exposition à la Philharmonie de Paris l'année passée "Jamaica, Jamaica!" organisée par Sébastien Carayol, qui retraçait l'histoire du reggae. Cela a permis de faire découvrir au public une culture très riche qui dissimule une singularité qui va bien au-delà de la musique. Mais aussi de faire découvrir cette culture au plus grand nombre, à ceux qui ne viennent pas forcement en concert ou en festival. C'est ce que l'association Get Up! tente de faire toute l'année dans la région nantaise au travers d'expositions, de conférences, de concerts et bien sûr du Dub Camp Festival qui propose une programmation riche, variée, pointue et accessible à tous.
Pour beaucoup, le reggae commence et s'arrête avec Bob Marley. Mais pour les amoureux du genre, le reggae est bien évidemment beaucoup plus large que ça. En quelques mots, c'est quoi au juste le reggae aujourd'hui ?
   Olivier Bruneau. Le reggae aujourd’hui s'est nourri d’énormément d’influences et à énormément influencé de nombreux courants musicaux (HipHop, musique électronique...). Le reggae est, et sera toujours, une musique populaire, qui évolue avec son temps. Au delà de l'aspect festif, le reggae est une musique militante et revendicatrice avec un foisonnement d'artistes, de mouvements, de studio mythiques qui ont révolutionné le genre et la musique en générale.

Quels artistes, quels courants, faut-il particulièrement suivre en ce moment ?
   Olivier Bruneau. La nouvelle scène new roots jamaïcaine est très prolifique. On vous conseille : Chronixx, Samaury I ...
De nos jours, la scène dub et sound system est extrêmement foisonnante avec des artistes internationaux comme les Londoniens d'Aba Shanti, Channel One, Jah Shaka ou encore les Néerlandais de King Shiloh  mais aussi beaucoup d'artistes français qui s'exportent à l'étranger : Black Board Jungle, O.B.F, Legal Shot ou encore RDH ...
L'association Get Up! est née il y a 10 ans pour pallier le manque de structures et d'associations agissant pour la promotion de cette culture reggae. Est-ce que ce manque est toujours flagrant?
   Olivier Bruneau. Nantes a une image de ville "rock" mais a toujours eu une scène reggae très prolifique avec par exemple les soirées de Zion Gate HI FI qui ont inspiré de nombreux amateurs du genre partout en France. L'association a été créée par des passionnés qui souhaitaient passer des disques et diffuser la musique qu'ils aimaient. Aujourd'hui, il ne se passe pas un mois sans un événement reggae/dub. La musique reggae se démocratise de plus en plus et c'est très bien !

Est-ce que vous sentez une différence dans vos relations avec les pouvoirs publics, les partenaires financiers, depuis le classement par l'UNESCO ?
   Olivier Bruneau. Honnêtement, pas vraiment... :) mais on espère vraiment que cela va évoluer.
Depuis 2014, vous organisez le festival Dub Camp Festival à Joué-sur-Erdre. Avez-vous le sentiment d'avoir comblé un vide dans le domaine ?
   Olivier Bruneau. Le Dub Camp Festival est un événement unique en Europe. Nous sommes, pour le moment, les seuls a proposer un festival dédié au Sound System en extérieur dans la pure tradition des bals jamaïcains. De ce fait, beaucoup d'internationaux viennent au festival pour son caractère unique : des New-Yorkais, Japonais, Australiens, Mexicains, Italiens, Anglais, Autrichiens etc.

Nous sommes heureux de proposer une diversité musicale sur le territoire, de faire découvrir ou (re)découvrir des artistes aux festivaliers.
Je ne sais pas si nous avons comblé "un vide". En tout cas, l'objectif du festival est de démocratiser cette culture et de la faire découvrir au plus grand nombre, de casser les barrières et les clichés associés à cette musique.

C'est gratifiant de voir, après 5 éditions, différents publics sur le festival : des jeunes, des familles, des personnes âgées, des passionnés, des néophytes, des curieux...
Vous avez ouvert la billetterie il y a quelques jours sans avoir dévoilé un seul nom à l'affiche. On pense au Hellfest bien sûr. Est-ce que, à l'instar du festival de musiques extrêmes, vous êtes parvenu à établir un lien de confiance avec les festivaliers ?
   Olivier Bruneau. Oui effectivement, les billets sont partis encore plus vite cette année en 1h à peine. C'est incroyable !
D'année en année, les gens nous font confiance et ça nous donne encore plus envie de nous dépasser. Cela nous mets une certaine pression car nous n'avons pas envie de décevoir les festivaliers. Nous travaillons pour toujours proposer une programmation innovante et surprenante.

Même sans programmation le public reste fidèle et acteur du festival. L'ambiance si particulière présente au Dub Camp fait que le public vient aussi bien pour la musique que pour les rencontres, l'ambiance, les animations,... Les festivaliers se retrouvent dans les valeurs portées par le Dub Camp.

Nous organisons en avril à Stereolux la première "Dub Camp Launch Party" !

Je suppose que vous avez déjà des noms confirmés pour l'édition 2019. Est-ce qu'on peut en avoir un en primeur ? Ou tout au moins des pistes ?
   Olivier Bruneau. Nous allons proposer aux festivaliers des artistes de renommée internationale, des valeurs sûres en sound system, des chanteurs jamaïcains, mais aussi des artistes émergents que l'on ne voit jamais en France. C'est cette mixité d'artistes qui fait l'âme du festival. Nous pouvons vous donner une petite exclu ! Nous organisons en avril à Stereolux (salle maxi et micro) la première "Dub Camp Launch Party" ! Nous vous dévoilerons la programmation très bientôt mais on vous promet du lourd avec du live et du Sound System !
On parle beaucoup de mixité, de fraternité, d'humanité à propos du reggae, de résistance et d'émancipation aussi. Ces valeurs sont-elles toujours siennes ? Et comment se traduisent-elles sur le site du festival ?
   Olivier Bruneau. Ces valeurs sont très ancrées dans la musique en effet. Le Dub Camp Festival est organisé par l'association Get Up! Ce sont 800 bénévoles de tous âges, tous pays, hommes et femmes, portées par la passion, la motivation, l'aventure humaine qui font le festival ! Sans eux, il n'y aurait pas d’événement. Ils sont garants de l'éthique qu'il y a derrière l'organisation et cela se traduit par le travail de groupe, l'entraide, le travail au local avec nos partenaires et prestataires,  le respect de l'environnement...

Merci Olivier
Propos recueillis par Eric Guillaud le 21 décembre 2018

Le Dub Camp Festival se déroulera à Joué-sur-Erdre du 11 au 14 juillet 2019. Plus d'infos ici
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