Sommes-nous prêts à changer nos habitudes et à réintroduire nos eaux usées, une fois traitées, dans notre consommation ? Voilà en tout cas l’objectif que s’est fixé le syndicat d’eau de Vendée avec son projet Jourdain. Cette unité d’affinage, unique en France, vient d’être inaugurée aux Sables d’Olonne.
Pour pallier le manque d’eau, accentué par le réchauffement climatique, c’est sans doute l’une des solutions d’avenir. Ce déficit est récurrent dans le département de la Vendée qui doit innover pour trouver de nouvelles ressources.
Une économie circulaire de l'eau
A priori, l’eau en sortie de station d’épuration n’est pas très ragoûtante. Jusqu’ici en Vendée, une fois traitée, des conduits permettaient de la rejeter en mer. Bientôt, cette eau pourrait alimenter les robinets de nos salles de bains et de ceux de nos cuisines.
Vendée eau, le syndicat mixte départemental, réfléchit depuis des années à un bouquet de solutions qui permettrait de pallier le manque d’eau chronique sur son territoire. L’une de ses solutions est la réutilisation des eaux usées pour la consommation. C’est ainsi qu’est né le projet Jourdain. Une unité d’affinage de l’eau tout juste installée à côté des Sables d’Olonne.
Un projet novateur et technique
L’installation paraît simple à première vue, l’eau transite de cuve en cuve à l’aide de pompes. Pourtant, ce projet est unique en France et novateur.
Julien Orsoni, ingénieur à Vendée eau et responsable du projet Jourdain, explique le principe.
"Il y a la première étape membranaire, qu’on appelle l’ultra filtration. Il faut imaginer des trous 10 000 fois plus fins que la taille d’un cheveu. On va pousser les eaux à travers ces trous, d’un côté, on retient la pollution et de l’autre côté, on obtient de l’eau épurée. Ça, c'est la première étape. La deuxième étape, c’est ce qu’on appelle l’osmose inverse. Là, ce sont des pores, des trous encore cent fois plus petits et, cette fois-ci, on va être capable de retirer tout ce qui est dilué dans l’eau".
Pour passer à travers ces trous microscopiques, l’eau doit être mise sous pression. L’objectif, dans cette deuxième étape de traitement, est de retenir tous les éléments qui sont dissous dans l’eau, à l’image du sucre ou du sel. Ce procédé d’osmose inverse permet d’extraire les micropollutions comme les résidus médicamenteux ou chimiques, mais aussi les traces de pesticides.
Résultat : une eau pure
L’objectif est d’arriver à une eau tellement pure, qu’en l’état, elle devient si pauvre en éléments, "sans goût", qu’elle n’est plus vraiment consommable.
Avant d’être réinjectée dans le réseau de distribution, cette eau doit donc être déversée dans le milieu naturel où, au contact des sols et des roches, elle va se recharger en oligo-éléments et en minéraux.
En sortie d’affinage, des conduits amènent donc l’eau pure dans la retenue d’eau du Jaunay. C’est seulement, après ce passage dans cette zone de transition naturelle et végétalisée, qu’elle pourra être ponctionnée pour alimenter à nouveau le réseau d’eau potable.
La Vendée, un territoire pauvre en eau
En Vendée, l’eau potable provient à 90 % des eaux superficielles, qui de fait sont les plus soumises aux effets de la sécheresse.
Pour le président du syndicat Vendée eau, Jacky Dallet, cet apport d’eau supplémentaire issu des stations d’épuration, vu les caractéristiques hydrologiques de la Vendée, est indispensable."Sur notre territoire, nous n’avons pas de grands fleuves, nous n’avons pas de grandes nappes, et donc chaque année notre système de production d’eau potable est mis à mal, que nous soyons en année de sécheresse ou en année quasi normale comme en 2023 ; notamment sur la frange côtière où la population touristique provoque une multiplication par deux de la consommation d’eau."
Une technique encore expérimentale
Cette unité d’affinage, tout juste sortie de terre, sera en test et sous surveillance pendant un an avant que l’eau, ainsi purifiée, soit remise dans le circuit de consommation. À terme, on estime que le déficit en eau de la Vendée sera de 8 millions de mètres cubes chaque année. Cette toute nouvelle unité d’affinage permettra de combler seulement un quart de ces besoins.
D’autres solutions, comme la désalinisation de l’eau de mer, mais qui restent très énergivores, sont aussi développées en parallèle par le syndicat d’eau de Vendée.
Un projet pour demain
Au départ, la quantité d’eau traitée par cette unité aux Sables d’Olonne sera marginale. Après 2027, un bilan de cette réutilisation circulaire de l’eau sera fait. En fonction des résultats, le syndicat Vendée eau espère dupliquer ce type d’installation afin de réduire le déficit en eau récurrent. sur tout son secteur côtier. Elle espère aussi, avec ce projet, faire évoluer la réglementation dans le domaine de la distribution de l’eau potable.
La Vendée doit trouver une palette de solutions pour éviter de subir des coupures d’eau en pleine saison estivale.
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