Stéphane Moitoiret a été condamné, vendredi 22 novembre au soir, en appel à 30 ans de réclusion criminelle pour avoir tué le petit Valentin, en 2008, dans l'Ain, après d'âpres débats sur son état mental.
Les jurés ont été beaucoup plus cléments pour son ex-compagne, Noëlla Hégo. Acquittée du chef de complicité d'assassinat, elle a été condamnée à cinq ans de prison, dont quatre ferme, pour non-assistance à personne en danger et "tentative d'enlèvement" d'un autre enfant.
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"Oui, justice est faite. On va pouvoir se reconstruire autrement", a confié au bord des larmes Véronique Crémault, la mère de Valentin, 10 ans, mortellement touché de 44 coups de couteau en juillet 2008 dans les rues de Lagnieu (Ain).
La condamnation de Moitoiret, marginal de 44 ans, est assortie d'une peine de sûreté de 20 ans. Elle est conforme aux réquisitions de l'avocat général, mais inférieure à la réclusion à perpétuité prononcée en première instance dans l'Ain, en 2011.
Les jurés n'ont pas suivi les "16 à 18 ans" requis contre Noëlla Hégo, dépeinte par l'avocat général en "ange noir" qui aurait "allumé la mèche" de Stéphane Moitoiret, "baril de poudre criminel", en le poussant à tuer. A l'inverse de la cour d'assises de l'Ain, qui l'avait condamnée à 18 ans de réclusion, ils l'ont seulement jugée coupable de n'avoir pas prêté assistance à Valentin Crémault, et d'avoir tenté en 2006 d'enlever un autre enfant prénommé Valentin, avec Moitoiret.
'Vengeance judiciaire'
Les deux pèlerins, jugés psychotiques par une majorité d'experts, avaient tenté d'acheter cet enfant de 5 ans qu'ils considéraient comme "l'élu", présentant leurs papiers d'identité aux parents avant de repartir. "Que la responsabilité de Moitoiret ait été reconnue est pour nous d'une importance essentielle", a déclaré Me Gilbert Collard, l'avocat de la mère de Valentin, car "on sait que Valentin n'a pas été tué par une chose mais par un être humain".
"C'est essentiel pour la maman que la justice ait dit qu'on ne peut pas tuer un enfant, le voir mourir, saigner, pleurer, sans être conscient", a ajouté l'avocat pour qui "c'est justice" que Mme Hégo ait été "moins sévèrement condamnée".
"Ce soir, contre toute attente M. Moitoiret est content, il n'est pas malade mental", s'est exclamé pour sa part l'un des ses avocats, Hubert Delarue.
Dans la matinée, la défense de Stéphane Moitoiret avait supplié la cour de "ne pas céder aux sirènes de la vengeance judiciaire" en condamnant ce "fou" pour ce crime "atroce" mais de le déclarer irresponsable. "Je vous conjure de ne pas confondre l'individu et le crime", avait supplié Me Franck Berton, demandant à la cour de "répondre non" à la question de savoir si l'accusé était "conscient" quand il avait poignardé cet enfant qu'il ne connaissait pas. Il n'a pas été suivi.
L'avocate de Noëlla Hégo, Roksana Naserzadeh, avait plaidé l'acquittement pour complicité, invitant les jurés à opérer "un tri massif entre fantasmes et vérités établies".
Une audience en appel qui tranche avec le premier procès en 2011 à Bourg-en-Bresse.
Sous camisole chimique, Moitoiret et Hégo étaient restés mutiques et avaient été respectivement condamnés à la perpétuité et 18 ans de réclusion.
A Lyon, ils se sont exprimés abondamment, plongeant les jurés dans leur univers fait de "clones", de "boîtes à voeux", de réincarnations et de "missions divines". Mais Moitoiret, accablé par son ADN retrouvé sur l'enfant, a continué à nier.
Comme en première instance, les experts psychiatres se sont déchirés sur la folie de l'accusé. Quatre d'entre eux évoquent une "abolition" du discernement, synonyme d'irresponsabilité, et six parlent d'"altération", qui permet une condamnation, moins catégoriques à l'audience, deux ont finalement refusé de se prononcer.
Quant à Noëlla Hégo, 53 ans, tous les experts la jugent responsable de ses actes malgré un "délire" mystique, mais ils se sont montrés très sceptiques sur son implication dans le meurtre. "Vous ne pouvez pas la dissocier de ce crime", avait lancé l'avocat général à la cour. Pour lui, "la source de cette affaire n'est pas leur délire" mystique.